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Jean-Michel Cornu

LE GUIDE
DE L’ANIMATEUR
1 heure par semaine pour animer
une communauté

1

Licence CC-BY-SA 4.0
Le guide de l’animateur : Une heure par semaine pour animer une grande communauté,
de Jean-Michel Cornu (http://cornu.eu.org/), est disponible
sous la licence CC-BY-SA 4.0 Creative Commons.
Vous pouvez partager et adapter ce texte à condition de citer la source (Le guide de l’animateur :
Une heure par semaine pour animer une grande communauté, Jean-Michel Cornu, FYP Éditions, 2016)
et de le partager avec la même licence.
Hashtag #anim1h
Un ouvrage de la collection « entreprendre »
Edition : Florence Devesa, Lucia Di Bisceglie
Couverture de la version en téléchargement : Annemie Michils
Vous pouvez télécharger ce livre gratuitement sur http://www.cornu.eu.org/
Vous pouvez également acheter la version papier pour l’avoir dans votre bibliothèque, pour l’offrir ou pour soutenir l’auteur, sur le
même site ou dans toutes les librairies.

2

FYP Éditions, France
www.fypeditions.com

Biographie

Jean-Michel Cornu est un spécialiste de l’innovation, de la coopération et de
l’intelligence collective. Il est l’auteur de nombreux ouvrages et a initié de multiples
groupes virtuels ou locaux dans le monde depuis plus de vingt-cinq ans. Il est notamment
le fondateur de l’écosystème international Coop-group.org qui rassemble une trentaine de
groupes thématiques et territoriaux autour de l’innovation sociale.
http://www.cornu.eu.org

3

« Diangalma nappa, Mo Guene. ngua maye dieumé beuss bouné. »
Version wolof1 d’un proverbe chinois bien connu :
« Apprends-moi à pêcher pour avoir du poisson chaque jour. »

1. Le wolof est une langue véhiculaire parlée au Sénégal, en Gambie et en Mauritanie.

4

Sommaire
Préambule

Trois conseils pour faire échouer votre groupe

6

La carte de la communauté

13

Partie I

Comprendre les éléments clés du groupe

14

Chapitre 1

La carte d’orientation de la communauté

15

Chapitre 2

Des projets ouverts pour « faire ensemble »

19

Chapitre 3

Communauté : la puissance du nombre

27

Chapitre 4

L’information, premier moyen d’animation

35

Chapitre 5

Des rencontres pour « booster » les plus actifs

40

Chapitre 6

Des discussions entre les rencontres

47

y compris pour les moins actifs
Chapitre 7

L’espace de partage

59

Chapitre 8

L’écosystème de groupes, et plus si affinités…

68

Partie II

Mettre en place ou réorganiser une communauté pas à pas

79

Avant de commencer

80

Chapitre 1

Première étape : Le noyau de départ

85

Chapitre 2

Deuxième étape : La rencontre pour organiser la communauté

92

Chapitre 3

Troisième étape : Les moyens d’animation

103

Chapitre 4

Quatrième étape : Inviter et lancer le groupe

121

Partie III

Faire vivre la communauté

131

Chapitre 1

La vie du groupe semaine après semaine

132

Chapitre 2

Identifier les moments clés du groupe

139

Chapitre 3

Le fonctionnement de la communauté : parlons-en ensemble

148

Postface

170

Index

173

Remerciements 177

5

Préambule
Trois conseils pour faire échouer votre groupe

Allez, c’est parti !
Je vous propose un voyage. Au fil des différentes étapes, nous allons explorer ensemble
diverses facettes de la coopération et de l’animation de groupe. Nous chercherons à
comprendre ce qui se passe dans ce drôle d’être « collectif » que représente une
communauté, de quelle manière peut-on agir et quelles compétences devons-nous
acquérir.
Si un groupe est un ensemble de plus de deux personnes2, nous appellerons
communauté, un groupe qui rassemble le plus grand nombre possible de personnes
autour d’un territoire ou d’une thématique commune et avec son identité propre.
Nous appellerons projet collectif (ou parfois groupe de travail) un groupe souvent plus
réduit qui produit quelque chose pour d’autres personnes et parfois même pour le bien
commun. Les projets peuvent créer et développer une quantité de choses très diverses :
un jardin partagé, une éolienne, une application de santé, la cartographie d’un lieu, un
article pour une encyclopédie, etc. Ils peuvent également organiser une rencontre, une
formation ou mettre en place une exposition. Pratiquement toute activité humaine
aboutissant à un résultat montrable peut faire l’objet d’un projet. Ils peuvent être initiés
par une personne seule, une association, une entreprise ou une collectivité. Ils peuvent
être également portés par un groupe informel de personnes sans être rattachés à une
organisation. Nous parlerons de façon générale de « l’équipe projet » pour désigner ceux
qui contribuent à produire le résultat.
Il n’est pas toujours facile d’avoir à la fois le plus grand groupe possible, une
communauté, travaillant sur un même projet et sur une longue durée, sauf à décomposer
l’objectif initial en projets plus petits. Une solution consiste à concevoir la communauté
comme une mise en réseau de personnes et de projets. Chaque équipe projet reste assez
petite pour être facilement gérable, mais bénéficie de la grande communauté qui lui offre

2. À deux, il s’agit plutôt d’un échange interindividuel.

6

une visibilité, une légitimité, un réservoir de nouveaux contributeurs potentiels et
beaucoup d’autres avantages.
Si les actions concrètes se développent au sein des projets, que fait donc la
communauté ? Une première approche, qui nous vient du « community management »,
consiste à animer et fédérer « des communautés sur internet pour le compte d’une
société, d’une célébrité ou d’une institution3 ». Le community manager diffuse des
informations, aide les membres à se les approprier et cherche à les faire réagir. Mais dans
notre cas, nous souhaitons aller plus loin pour développer les échanges entre les
membres, faciliter l’entraide et le développement de plusieurs projets collectifs et
collaboratifs. Ces grandes communautés peuvent rassembler des personnes en ligne (les
communautés virtuelles), en présentiel (lorsque la communauté rassemble des personnes
sur un même territoire) et même assez souvent associer des activités en ligne et en
présence.
Nous participons tous à des groupes, associatifs ou professionnels, mais aussi familiaux,
amicaux, sportifs, etc. Il nous arrive même d’aider à les organiser et à les animer. Mais,
sans savoir comment faire, nous y passons beaucoup de temps, avec parfois de faibles
résultats. L’avènement de l’internet a permis de rendre plus faciles certaines tâches. Mais
les communautés dites « virtuelles » sont, elles aussi, constituées d’êtres humains
« réels ». Les communautés plus locales, qui se réunissent plus facilement, tireront
avantage des nouveaux outils pour prolonger les échanges entre une rencontre et la
suivante ou avec ses membres plus éloignés. Quoi qu’il en soit, grâce aux méthodes que
vous trouverez dans cet ouvrage, vous serez armé pour organiser et animer de grandes
communautés actives, sans y passer trop de temps.

3.
Cf.
la
définition
que
propose
Wikipédia
https://fr.wikipedia.org/wiki/Animateur_de_communaut%C3%A9

dans

l’article

« Animateur

de

communauté »

7

Pour en savoir plus :

La coopération, une aventure collective
De nouvelles méthodes d’animation, en présentiel et en ligne, qui permettent de tenir
sur le long terme dans l’animation de grands groupes, se sont développées depuis une
quinzaine d’années. Elles sont nées avec l’émergence des grands projets de logiciels libres
dans les années 1990. A posteriori, il a été possible d’en tirer des règles pour reproduire ce
qui semblait jusqu’alors impossible4. C’est la raison pour laquelle le domaine du logiciel
libre est, encore aujourd’hui, particulièrement actif dans l’animation de communautés5.
Puis, en partant de ces méthodes, j’ai cherché à extraire de nouvelles approches qui
soient indépendantes du développement logiciel et même de l’internet6. Petit à petit, s’est
développée une « approche francophone de la coopération7 » pour des projets
collaboratifs et des grandes communautés, ouvertes à tous et pas seulement aux militants.
Ces méthodes s’appuient sur un grand nombre d’expériences et de mises en œuvre
réalisées depuis une quinzaine d’années. C’est notamment le cas de l’écosystème Coopgroup (coop-group.org), développé initialement par l’association Imagination for People,
en 2010, qui rassemble une trentaine de communautés d’innovateurs sociaux à travers le
monde. Les méthodes développées se basent également sur les progrès récents dans
plusieurs domaines scientifiques : neurosciences, sciences cognitives, anthropologie,
psychologie, théorie des jeux, etc.
Plus récemment, se sont développés des échanges avec le monde anglophone — en
particulier sur le développement d’indicateurs d’activité et de coopération — et avec le
monde hispanophone qui a développé un grand savoir-faire concernant les groupes
militants — notamment avec le mouvement des Indignés (Indignados).

4. Voir, en particulier, Eric Steven Raymond, The Cathedral & the Bazaar: Musings on Linux and Open Source by an Accidental
Revolutionary, O’Reilly Media, 2001 : http://www.catb.org/~esr/writings/cathedral-bazaar/cathedral-bazaar/, version française : La
cathédrale et le bazar, disponible en ligne sur http://www.linux-france.org/article/these/cathedrale-bazar/cathedralebazar_monoblock.html.
5. Voir notamment : Karl Fogel, Producing Open Source Software. How to Run a Successful Free Software Project, O’Reilly Media, 2005,
version française : Produire du logiciel libre, disponible en ligne sur framabook.org ; Lydia Pintscher (éd.) et al., Open advice, Foss: What We
Wished We Had Knowed When We Started, janvier 2012, version française : Libres conseils, disponible en ligne sur
http://framabook.org/libres-conseils/ ; Stéphane Ribas (dir.), Patrick Guillaud, Stéphane Ubeda, Logiciels & objets libres : Animer une
communauté autour d’un projet ouvert, juin 2016, disponible sur http://framabook.org/logiciels-et-objets-libres/. À noter que ces trois livres,
tout comme celui-ci, sont sous une licence libre Creative Commons.
6. Jean-Michel Cornu, « La coopération, nouvelles approches », disponible sur http://wwwcornu.eu.org/texts/cooperation.
7. Pour un historique de l’approche francophone de la coopération, voir « Faire ensemble ! Manuel à l’usage des animateurs de réseaux
collaboratifs »,
projet
européen
Coop-TIC,
2013,
disponible
sur
http://ebook.cooptic.eu/francais/wakka.php?wiki=HistoriqueDeL039approcheFrancophoneDeLa.

8

J’ai cherché à rassembler dans ce guide, pour les partager avec vous :
1— des connaissances et expériences accumulées depuis plus de quinze ans ;
2— leur mise en œuvre durant sept années au sein de Coop-group, un écosystème
collaboratif centré sur l’innovation sociale, qui a servi de laboratoire, avec aujourd’hui une
trentaine de groupes très divers ;
3— et leur utilisation pendant deux ans, dans le cadre de CYou — un autre écosystème
orienté vers les sciences, les technologies et l’innovation —, pour en éprouver la
réplicabilité.

Comment profiter pleinement de ce guide
Ce guide est un véritable manuel pratique qui a pour but de vous rendre le plus
autonome possible pour animer une grande communauté active. Vous pouvez bien sûr le
lire, mais, pour en profiter pleinement, prenez des notes et faites les exercices individuels
et collectifs proposés, répondez aux questionnaires et réalisez les tâches résumées dans
les encadrés « À faire », consultez « Le courrier de l’animateur » et faites les jeux de
questions-réponses. Si vous souhaitez aller plus loin, lisez les encadrés « Pour en savoir
plus » et suivez les liens et les références fournis dans les notes de bas de page. Enfin, les
encadrés « Pour faire avancer les choses » s’adressent à ceux qui développent des outils
ou des méthodes et proposent quelques pistes pour imaginer l’avenir et ainsi rendre plus
facile l’animation de grandes communautés.
Pour profiter totalement de votre lecture, je vous propose de faire deux choses :
— tout d’abord, conservez précieusement la « carte d’orientation de la communauté »,
présentée au début du prochain chapitre, que vous allez détacher de ce livre. Elle vous
permettra d’avoir une vue d’ensemble et de ne rien oublier ;
— ensuite, après chaque partie, prenez un peu de temps pour noter ce qui vous a le
plus étonné, intéressé, intrigué. Ce « rapport d’étonnement » n’a pas besoin d’être
complet, inscrivez-y juste deux ou trois choses qui vous ont frappé. Vous pouvez le faire
sur un document personnel ou, mieux, sur un document collectif pour le partager avec vos
amis.
Pour nous mettre dans le bain, considérons trois erreurs assez fréquentes.

9

Première erreur : tout le monde coopère... surtout moi8
Bien sûr, la majorité des personnes souhaitent coopérer, a priori. C’est du moins ce que
l’on désire le plus souvent… lorsque nous sommes conscients. Je vous propose un petit
exercice qui peut être parfois assez difficile, car nous avons tendance à oublier les
moments qui ne correspondent pas à l’image que nous souhaitons donner de nousmêmes : vous rappelez-vous des moments où, face à une demande, vous n’avez pas « joué
le jeu » ? De la fois où vous auriez pu donner un coup de main, mais vous vous êtes défilé.
Si vous ne trouvez pas, essayez de faire le même exercice pour n’importe quelle personne
de votre entourage. Si vous arrivez à trouver des exemples de « défilade » pour tous les
autres, c’est probable que cela a dû aussi vous arriver…
Au lieu de nous lamenter de ceux qui ne coopèrent pas, nous pourrions plutôt chercher
les conditions qui maximisent le nombre de participants (y compris vous et moi) et
considérer que plusieurs ne coopèrent pas.

Deuxième erreur : tout le monde a du temps
Pourriez-vous citer au moins un groupe (professionnel, familial, sportif, amical, etc.)
dans lequel vous êtes plutôt actif ? (Allez, il y en a bien un !) Pourriez-vous citer un autre
groupe dans lequel vous êtes inactif ? (Il y en a certainement un aussi !) Cela signifie que
vous n’êtes pas toujours actif ou passif, mais que vous faites un calcul, souvent
inconscient, pour répartir votre temps et votre attention — ce que vous avez de plus rare.
Dans une période aussi dense que la nôtre, animer un groupe revient souvent à animer
un ensemble de personnes qui n’ont pas le temps auxquelles s’ajoutent d’autres
personnes qui, elles aussi, n’ont pas le temps ! Généralement, les militants, et parfois ceux
qui sont rémunérés pour une tâche, sont prêts à y consacrer du temps, mais cela ne vaut
que pour un nombre très restreint de groupes ou d’équipes dont ils font partie… Notre
temps est tendu, pas très élastique.

Troisième erreur : j’ai trouvé la solution
Au sein d’un groupe, imaginez que ni vous ni la plupart des autres membres n’ayez pas
du temps à consacrer. Au lieu de vous plaindre ou de contraindre chacun à contribuer,
essayez plutôt d’encourager la participation et d’organiser votre groupe pour qu’il puisse
8. Pour compléter ce petit jeu sur « comment faire échouer votre groupe », je vous recommande « L’antimanuel de coopération, l’art de
faire planter vos projets », réalisé par des stagiaires de la formation Animacoop PACA, disponible sur site http://coop.net/antimanuel.

10

être actif — même si, à un moment donné, le nombre de participants qui réagissent est
faible. Une super idée !
Mais il y a un hic. Focalisé sur le manque de temps de certains, vous avez oublié que
d’autres ne coopèrent pas pour d’autres raisons (ils n’osent pas, ils sont déçus par le
groupe, etc.). Dans le but de trouver une solution, nous nous focaliserons sur un seul
problème, laissant dans l’ombre toutes les autres questions. Rassurez-vous, nous sommes
tous comme cela. Edgar Morin parle « d’aveuglement paradigmatique ». Heureusement,
des cartes nous permettent de rassembler toutes les questions que nous devons nous
poser, sans en oublier quelques-unes au passage.

Que faut-il retenir ?
1— Nous n’avons pas, les uns et les autres, sans exception, tout notre temps à
consacrer au groupe, et nous n’avons pas toujours l’intention de coopérer. Il faut, bien sûr,
faciliter l’implication, mais également organiser le groupe afin qu’il fonctionne, même avec
une participation réduite.
2— Comprendre un aspect du groupe et trouver une solution pour l’améliorer ne suffit
pas. Si vous réparez un pied cassé de votre tabouret en oubliant les autres, vous risquez de
vous retrouver par terre ! Les cartes qui seront présentées par la suite vous permettent
d’avoir une vue d’ensemble des questions que vous devez vous poser pour ne rien oublier.
3— Au fait, n’oubliez pas de faire votre « rapport d’étonnement », deux à trois idées
suffisent. Vous pouvez le faire pour vous-même ou, mieux, pour le partager avec d’autres.

Qu’allons-nous voir dans ce livre ?
Dans un premier temps, nous allons voir comment organiser un groupe, en sachant que
tout le monde ne coopère pas toujours et que la grande majorité des personnes (y
compris vous) manquent de temps. Plutôt que de proposer une solution magique, nous
allons rechercher l’ensemble des questions à considérer pour comprendre comment
fonctionne votre organisation.
Dans un deuxième temps, nous verrons comment organiser ou réorganiser votre
groupe pas à pas, en fonction de vos réponses. Des check-lists vous aideront à ne rien
oublier dans chacune des quatre étapes qui vous mèneront vers une communauté active,
facile à animer.
11

Et pour terminer, nous verrons comment faire vivre la communauté dans le temps ;
comment, avec seulement une heure par semaine, vous pouvez permettre au groupe
d’être actif et de se développer naturellement. Nous verrons également les moments clés
de la vie du groupe (y compris les conflits) et, enfin, comment « sortir la tête du guidon »
en discutant tous ensemble du fonctionnement de la communauté.
Je vous propose maintenant un petit exercice amusant qui illustre parfaitement nos
limites cognitives et « l’aveuglement paradigmatique » que nous venons d’évoquer.

Exercice individuel

Prendre conscience que l’on ne voit pas tout

Regardez cette image9. Que voyez-vous : une femme ? Jeune ou veille ?
En réalité, il y a deux femmes dans la même image : une vieille et une jeune. Mais en
voir une rend difficile de voir l’autre.
Vous trouverez d’autres exercices de ce type sur le site Illusions d’optique (illusionsoptique.fr). Je vous conseille tout particulièrement celui qui consiste à faire disparaître de
votre vue une croix ou un rond.
Comme quoi, même si nous cherchons à tout voir pour tout
comprendre, nous devons également prendre conscience que
plus nous mettons notre attention sur certaines choses, plus nous
risquons d’en rater d’autres ! Si vous avez manqué certaines
choses en faisant ces exercices, sachez qu’il en va de même dans
ce que nous voyons de la communauté.
À faire : votre premier rapport d’étonnement, sur un cahier ou
une fiche à classer.

La carte de la communauté
9. Les illustrations, notamment les décryptages, sont issues du site http://id-box.biz. Vous pouvez également consulter le site
http://www.illusions-optique.fr.

12

13

Partie I :

Comprendre
les éléments clés
du groupe

14

—1—
La carte d’orientation de la communauté
C’est quoi un groupe collaboratif ?
Un groupe collaboratif est un ensemble de personnes, au minimum trois — avec deux,
il s’agit d’une relation interpersonnelle —, qui échangent et travaillent ensemble. Cette
définition est vaste et englobe aussi bien des groupes de travail qui développent des
projets — dans ce cas, il est préférable de ne pas être trop nombreux pour garantir des
meilleurs résultats — que des communautés où l’on cherche, au contraire, à toucher le
plus grand nombre de personnes. Wikipédia est à la fois une immense communauté, mais
également un grand nombre de petits sous-groupes qui s’intéressent à un certain article
de l’encyclopédie collaborative.

Ça sert à quoi ?
Un groupe sert à faire différentes choses :
1— Il permet à un ensemble de personnes de s’approprier des informations — c’est le
rôle principal des community managers, souvent au service d’une organisation à
promouvoir.
2— Si les participants échangent plus fortement entre eux, alors la communauté
permet aussi de développer l’entraide et la montée en compétence collective.
3— En allant un cran plus loin, il est également possible de développer des projets
collectifs.
4— Enfin, lorsque le groupe est capable de trouver des idées ou de faire des choix, pas
seulement en additionnant les contributions de chacun, mais en développant des
interactions pour enrichir chaque contribution par celles des autres, on parle alors
d’intelligence collective.

Des personnes, des projets, des actions

15

Finalement, la plupart des choses que fait le groupe, grand ou petit, peuvent être vues
comme un projet ouvert10 : se réunir, organiser un événement, produire un document ou
fabriquer quelque chose ensemble. Mais il semble y avoir une contradiction entre
développer des projets — qui nécessitent souvent un groupe restreint et impliqué sur une
durée limitée — et développer une communauté — qui cherche à rassembler le plus grand
nombre de personnes, qui ne sont pas toutes très impliquées, en leur donnant une vision
à long terme ensemble. La solution consiste à prendre en compte les deux : les projets
collectifs et la communauté, chacun avec ses particularités.

Des moyens d’animation
Comment faciliter l’entraide, les échanges, les projets collectifs, etc. ? Cela nécessite
quatre types d’activités. Souvent, les groupes en négligent l’une ou l’autre qui devient
alors leur maillon faible. Voici les quatre activités :
— Informations. Ces flux d’actualités permettent au plus grand nombre, dans et en
dehors de la communauté, de suivre régulièrement ce qui se passe, de « s’accrocher au
wagon ».
— Rencontres. Qu’ils soient en présentiel ou à distance, ces moments synchrones
accélèrent les projets et facilitent l’implication des plus actifs.
— Discussions entre les rencontres. Ces échanges asynchrones (tout le monde ne suit
pas au même moment) sont très importants, en particulier pour ceux qui sont en posture
d’observateurs, qui ne participent pas aux rencontres (ou pas à toutes) , mais qui pourront
par la suite s’impliquer dans un projet tout en ayant suivi que partiellement son
déroulement.
— Espace de partage. Contrairement aux « informations-actualités », dont le temps
efface souvent la trace, il s’agit de classer les informations afin de les retrouver, quel que
soit le moment où elles ont été diffusées. Un nouvel arrivant dans le groupe ou une
personne jusque-là peu impliquée doit pouvoir trouver facilement une information, même
ancienne, si l’on veut faciliter son implication.

La carte de la communauté pour ne manquer aucun des aspects

10. Comme nous le verrons dans la partie suivante, un projet est la plupart du temps réalisé par un petit nombre de personnes, mais il peut
être « ouvert » pour permettre à l’ensemble des membres de la communauté d’y contribuer.

16

Si l’on additionne les deux approches complémentaires des groupes (projets ouverts et
communauté), les quatre activités pour faciliter l’animation du groupe et les liens avec
d’autres groupes (l’écosystème) pour bénéficier de l’expérience et des productions des
autres, cela fait sept concepts à prendre en compte, représentés ci-dessous dans la
première « carte de la communauté ». Conservez-la précieusement ! Les difficultés que
peut rencontrer votre groupe proviennent très probablement du fait que l’un de ces
points aurait été sous-estimé.

Exercice individuel

Mémoriser les sept aspects à prendre en compte
Cet encadré reprend les sept éléments de la carte à ne pas oublier pour animer un
groupe. En premier lieu, nous pouvons distinguer trois niveaux de groupes, un peu comme
dans une cible :
— un petit cercle, situé au milieu, pour les projets ouverts qui rassemblent les petites
équipes que l’on souhaite très impliquées ;
— puis, un cercle plus grand pour la communauté moins impliquée, mais pour laquelle
on bénéficie d’un effet de levier, afin que les projets ne soient pas isolés ;
— enfin, beaucoup d’autres cercles, figurés par une galaxie d’étoiles, qui forment
l’écosystème des groupes pour que la communauté ne soit pas isolée.
Pour faire le lien entre les projets ouverts et la communauté (et parfois l’écosystème),
nous avons besoin de quatre types d’animation. Imaginez que vous soyez au centre, que
vous participiez à un projet :
— En face de vous, grâce à vos yeux, vous voyez les informations transmises.
— Vos deux oreilles, de chaque côté, vous permettent d’écouter les deux types
d’échanges entre les membres :
— à votre gauche, les rencontres à travers lesquelles on se retrouve au même
endroit au même moment (synchrones) ;
— à votre droite, les discussions entre les rencontres au cours desquelles on se
laisse des messages (asynchrones).
— On oublie souvent de regarder derrière soi. Quel dommage, car on risque d’oublier
tout ce qui n’est pas immédiatement sous nos yeux ou à proximité de nos oreilles.
Heureusement, l’espace de partage nous permettra de tout retrouver.
17

Maintenant, fermez les yeux et essayez de retrouver les sept éléments autour de vous.
Vous y arrivez ? Pouvez-vous également les reformuler à l’envers ou dans le désordre sans
en oublier un seul ?

18

Par où commencer ? Une question de culture
Il n’y a pas de hiérarchie entre ces sept aspects, aucun d’eux ne doit être négligé.
Cependant, selon la culture des groupes, certains sont naturellement mieux pris en
compte que d’autres. Il existe deux grandes cultures qui ont un impact sur les priorités.
Chacun d’entre nous peut avoir tendance à s’associer avec des personnes de culture
similaire, ce qui donne alors une orientation à la culture du groupe. Par exemple :
— Ceux qui sont plutôt réticents aux technologies privilégient les rencontres physiques,
mais négligent souvent les échanges entre les rencontres, car cela suppose des outils de
discussion à distance.
— Les passionnés de technologies vont d’abord penser aux outils, mais peuvent se
cacher derrière les aspects techniques en espérant qu’ils traitent, à eux seuls, les aspects
humains aussi.
Dans les deux cas de figure, on s’intéresse généralement aux plus actifs, ceux que l’on
voit le plus, en oubliant les moins actifs. Pourtant, dans un groupe, le niveau d’implication
de chacun évolue en fonction de nombreux paramètres. Parmi les plus actifs, certains
pourraient, à un moment donné, choisir de s’éloigner du groupe. Si vous négligez les
moins actifs, qui pourra alors remplacer les actifs qui se sont retirés ?
Maintenant que nous avons notre carte d’orientation pour analyser un groupe, nous
allons passer en revue chacun des sept aspects dans les chapitres qui suivent.

19

—2—
Des projets ouverts pour « faire ensemble »

Des projets partout
Dans un groupe, beaucoup d’activités peuvent être
considérées comme des projets : produire un texte
ensemble, organiser un événement, mettre en place un
lieu ou un service, etc.
Un projet est « un ensemble finalisé d’activités et
d’actions entreprises par une “équipe projet” sous la
responsabilité d’un chef de projet dans le but de répondre à un besoin défini, dans des
délais fixés et dans la limite d’une enveloppe budgétaire allouée11 ». Même s’il n’y a pas
toujours de « chef » à proprement parler, il est souvent nécessaire d’avoir quelqu’un ou
un petit groupe pour coordonner.

Un projet ouvert, c’est quoi ?
Dans un projet ouvert, l’avancement du projet est partagé avec une communauté plus
large, qui peut y contribuer sans être aussi impliquée que « l’équipe projet ». Nous avons
donc deux types de participants :
— les membres de l’équipe projet, pour lesquels cela pose un problème s’ils ne
respectent pas leur engagement ;
— les autres membres de la communauté, qui enrichissent le projet à chaque fois qu’ils
apportent leur contribution.
Les uns gèrent les contraintes du projet, les autres y apportent de nouvelles
opportunités — les membres de l’équipe projet peuvent évidemment apporter aussi des
opportunités.

11. Définition dans le cours de gestion de projet de Rémi Bachelet, École centrale de Lille, sur http://rb.ec-lille.fr/gestion_projet.htm,
reprise sur Wikipédia.

20

Un projet collectif ouvert peut être initié par quelques membres au sein de la
communauté : il peut s’agir d’individus ou d’organisations membres de la communauté
qui décident d’ouvrir leur projet à la communauté.

Combien sommes-nous ?
C’est toujours les mêmes qui bossent… Cet argument est le résultat d’une confusion
entre les membres de l’équipe projet et les autres membres (le reste de la communauté)
et peut créer beaucoup de frustrations. Pourtant, comme nous venons de le voir, les rôles
ne sont pas les mêmes pour tous (gestion de contraintes, apport d’opportunités) et, pour
être efficace, une équipe projet doit avoir une taille limite.
Chez l’être humain, la taille maximale d’une alliance est de douze12. Les exceptions à
cette règle sont peu nombreuses13. Au-delà de douze participants, nous dépassons nos
capacités cognitives et il devient possible de ne rien faire sans que cela se voie. Comme
chacun est déjà impliqué plusieurs fois dans d’autres activités, personne (ou presque) ne
fait rien !

Exercices individuels

Beethoven, l’Europe et les limites des groupes
Je propose de visionner la vidéo suivante : https://youtu.be/GBaHPND2QJg
Il s’agit d’un concert, sous la forme d’une mobilisation éclair (flash mob), qui s’est
déroulé place Sant Roc, à Sabadell, ville située au nord-est de l’Espagne, dans la province
de Barcelone, en Catalogne. Les musiciens interprètent la 9e Symphonie de Beethoven et la
chorale l’Ode à la joie (l’hymne de l’Union européenne). Chaque interprète arrive sur la
place, l’un après l’autre, ajoutant ainsi, à chaque fois, un nouvel instrument à l’orchestre.
Pouvez-vous déterminer à partir de combien de musiciens le chef d’orchestre arrive ?
Je voudrais dire ici mon admiration pour ces initiatives qui surprennent, mettent en joie
(sans jeu de mots) et montrent le collectif sous un jour sympathique. Il existe d’autres

12. Voir Jean-Michel Cornu, Tirer bénéfice du don, FYP Éditions, 2013, également disponible sur http://www.cornu.eu.org/news/donnerune-capacite-naturelle-mais-limitee.
13. Il est possible de faire travailler ensemble jusqu’à environ cent cinquante êtres humains (un peu moins chez les chimpanzés), à
condition d’avoir un mâle dominant. Il existe des méthodes que l’on commence tout juste à comprendre, par exemple, la stigmergie (coopgroup.org/anim-fr) ou encore l’intelligence collective (« Comment produire un document à plusieurs centaines de personnes », in « Faire
ensemble ! Manuel à l’usage des animateurs de réseaux collaboratifs », COOP-TIC.eu, tinyurl.com/produire100).

21

événements de ce type sur internet, voici un petit florilège de quelques vidéos que j’ai
sélectionnées pour vous14.

Pour dépasser les douze participants dans un groupe, on crée en général des sousgroupes, on délègue les choix à des représentants (un chef d’orchestre) ou, encore, on
met en place un travail à la chaîne où chacun ne prend en compte que la personne
précédente et la suivante. Nous verrons, cependant, qu’il est possible de dépasser ce seuil
de douze grâce au fonctionnement d’une communauté. Mais dans ce cas, on perd
l’efficacité de l’équipe projet. Notre objectif, pour animer tout en préservant le temps des
participants et des animateurs, va consister à articuler une communauté et plusieurs
équipes projet.

Les projets collectifs ouverts ne sont pas forcément
indispensables
Une communauté peut très bien remplir son rôle sans projets collectifs entre ses
membres. Les rares obligations inhérentes à la vie de la communauté sont, par exemple :
penser à réunir régulièrement la communauté ou encore la tenir informée. Ces tâches
nécessaires à la vie de la communauté peuvent — au moins au début — être gérées par
une seule personne, que l’on nomme « animateur ». Lorsque le groupe est suffisamment
mature, il peut être utile de répartir les rôles selon les quatre types d’animation que nous
avons distingués précédemment15 : information, rencontres, discussions entre les
rencontres et gestion d’un espace de partage. Certains projets de gestion de la
communauté peuvent même être ouverts, au-delà des animateurs, aux membres de la
communauté qui en bénéficient.
À l’exception des projets relatifs à la vie de la communauté, les projets ouverts ne sont
pas indispensables. Une communauté peut très bien aider à s’approprier des informations
et surtout à faciliter l’entraide et la montée en compétence collective, entre des membres
qui ont chacun leur projet personnel.

14. Voir https://frama.link/anim1h-concert2 : dans cette vidéo, le chef d’orchestre arrive plus tard, mais le premier violon commence à
diriger l’orchestre ; https://frama.link/anim1h-concert3 : ici, il n’y a pas de chef pour diriger l’orchestre ; https://frama.link/anim1h-concert4
: là, le chef dirige dès le premier musicien ; https://frama.link/anim1h-concert5 : dans celle-ci, le public passe à l’intérieur du groupe de
musiciens, la limite entre l’intérieur et l’extérieur du groupe est plus floue.
15. Voir chap. 1, « La carte d’orientation de la communauté »

22

Les projets collectifs ouverts sont très utiles pour la
communauté
S’ils ne sont pas indispensables, les projets collectifs ouverts apportent beaucoup à la
communauté. Nous cherchons à animer un ensemble de personnes qui n’ont pas le temps
avec d’autres personnes qui n’ont pas le temps elles non plus. Les équipes projet sont
souvent très motivées pour faire avancer leur projet. Elles vont être très actives, au moins
pour une part d’entre elles. Le fait de partager régulièrement ce qu’elles font avec tous les
membres apporte de la vie à la communauté. L’activité attire l’activité. Le fait d’avoir
quelques projets ouverts actifs au sein de la communauté motive les autres projets et
permet également d’engager d’autres discussions d’entraide entre les membres,
d’effectuer de la veille et de partager des savoir-faire.
Le secret consiste à laisser les porteurs de projets faire ce qu’ils font le mieux, sans leur
imposer d’être plus proactifs envers la communauté, et dans les meilleures conditions,
c’est-à-dire en travaillant en petit groupe pour faire avancer leur projet. Ainsi, il est assez
simple d’avoir plusieurs projets dans un groupe avec des porteurs motivés, à condition de
leur rappeler de temps en temps de communiquer avec le reste de la communauté. Il peut
être pratique d’avoir dans chaque petit groupe projet un « référent » que l’on pourra
contacter régulièrement pour savoir où en est le groupe et s’il y a besoin d’aide, sans
attendre de lui qu’il en prenne l’initiative.
Nous verrons par la suite comment éviter d’avoir trop d’activité, en particulier lors des
discussions entre les rencontres. Mais pour l’instant, nous devons chercher à avoir
suffisamment d’activité dans la communauté pour provoquer un effet vertueux
d’entraînement.

La communauté est très utile pour développer des projets
Une communauté plus large que celle de l’équipe projet va également bénéficier de
l’ouverture de projets. Ces projets vont gagner en visibilité grâce à un premier public, puis
en profitant de l’audience dont bénéficie la communauté. En outre, ils vont tirer parti de la
légitimité de la communauté. Mais on aurait tort de percevoir les membres de la
communauté uniquement comme un premier public pour le projet. Ils peuvent être bien
plus que cela. Le projet, dont les résultats et chaque avancement sont partagés avec
d’autres, permet également à des volontaires d’y prendre part et d’en disposer au
23

moment où le projet a besoin de plus de monde (par exemple, lors de l’organisation d’un
événement). Peut-être, plus important encore, la communauté est un réservoir d’individus
qui peuvent potentiellement rejoindre le projet lorsque, pour diverses raisons (souvent
par manque de temps), certains membres de l’équipe projet s’en éloignent.

Le facilitateur de communauté : la compétence clé pour que ça
marche
Les porteurs de projets peuvent oublier de déterminer la prochaine étape
d’avancement ou de fixer la prochaine date à laquelle l’équipe projet pourra se réunir
pour travailler et faire le point. Si ces éléments indispensables pour permettre d’avancer
viennent à manquer, cela peut être fatal pour le projet. Pour la communauté, cela peut
être seulement dommageable à condition qu’il reste suffisamment d’autres projets en
route et que les projets déficients ne soient pas ceux qui concernent la vie de la
communauté, comme le fait de prévoir les rencontres, etc.
Bien plus fréquent encore, l’équipe projet, parce qu’elle est occupée à plein d’autres
choses, peut oublier de tenir régulièrement informée la communauté. Cela provoque une
déconnexion entre l’équipe projet et le reste de la communauté, réduisant ainsi le
bénéfice mutuel que s’apportent le projet et la communauté. La plupart du temps, on
considère que chacun doit être « responsable » et « faire son travail ». Cela n’est vrai que
dans un monde idéal où le temps et l’attention sont totalement élastiques.
Cela justifie l’intérêt d’un rôle particulier au sein de la communauté : le facilitateur de
communautés. Contrairement aux porteurs de projets qui sont focalisés sur leur propre
projet, le facilitateur va s’intéresser au lien entre la communauté et ses différents projets.
Il est là pour aider les acteurs à sortir du syndrome « C’est son problème, pas le mien16 ».
Cette fonction déterminante compense la surcharge cognitive et le manque d’information
dans le groupe.

16. « Ce n’est pas mon problème » est l’un des deux grands syndromes du groupe. Voir la fiche « L’implication » dans « Faire ensemble :
Manuel
à
l’usage
des
animateurs
de
réseaux
collaboratifs »,
disponible
sur
http://ebook.cooptic.eu/francais/wakka.php?wiki=L039implicatioN.

24

Pour en savoir plus

Le profil du facilitateur
Le facilitateur n’a pas besoin d’être le plus grand expert dans l’organisation des
groupes, ni d’être le plus légitime — à condition que le ou les leaders lui apportent la
légitimité nécessaire —, ni même d’être le plus actif (une heure par semaine suffit). En
revanche, il doit posséder une capacité rare : être proactif !
Avec suffisamment de participants, on a toujours un nombre adéquat d’actifs. Mais
même dans ce cas de figure, les proactifs (qui sont des actifs qui prennent des initiatives)
restent rares, et ne représentent que quelques pour cent17. Il suffit alors d’une petite
fluctuation dans le groupe pour que personne ne prenne d’initiative sur le suivi des actions
existantes18. Le facilitateur a donc un rôle critique : suivre proactivement l’état actuel du
groupe (actions, projets, prochaine réunion...).

Les trois questions qui changent tout
De façon régulière, le facilitateur de projet va prendre l’initiative de contacter les
référents de chaque projet au moins une fois par mois, de préférence par téléphone ou en
allant les voir s’il le peut. Contacter les autres participants — qui ont aussi un rôle
d’animation collective — à travers l’outil d’échange du groupe est peu efficace, car seuls
10 à 20 % des animateurs y répondent. Le facilitateur doit connaître le canal de
communication privilégié de chaque personne à contacter : téléphone, messagerie
électronique (e-mail, messagerie privée sur Facebook, Skype), rencontre en présentiel
lorsque cela est possible.
J’insiste sur le fait que le facilitateur va « prendre l’initiative ». Le rôle de facilitateur
n’exige pas énormément de temps : une heure par semaine suffit en général. Même si le
groupe est très actif, avec une dizaine de projets par exemple, cela ne représente que
deux ou trois coups de fil par semaine. Si le nombre de projets augmente, on peut prévoir
d’autres facilitateurs. Le facilitateur n’a pas besoin non plus d’une grande légitimité. Celleci peut lui être apportée par le leader qui le reconnaît publiquement dans ce rôle. Mais le
17. Voir partie I, chap. 3 « Communauté : la puissance du nombre ».
18. Il peut y avoir des participants qui prennent l’initiative de lancer de nouveaux projets qui remplaceront d’autres projets qui s’arrêtent.
Mais c’est surtout le rôle de suivre proactivement les actions existantes, le fait qu’il y ait des réunions de prévues, etc., qui est critique. C’est
ainsi que certains groupes continuent de lancer de nouvelles initiatives, mais ne vont jamais au bout de leur projet.

25

facilitateur est le seul qui doit impérativement être proactif, c’est-à-dire qu’il ne doit pas
simplement réagir à ce qui se passe, mais prendre l’initiative d’aller chercher l’information.
En quelque sorte, c’est moins le temps passé qui est important que son « temps de
cerveau disponible ». C’est pour cette raison que les rôles de facilitateur et de leader sont
difficilement compatibles — le leader étant, par définition, bien plus sollicité dans, et
souvent en dehors, de la communauté.
Lorsque le facilitateur contacte le référent du projet, il lui pose trois questions :
— Quelle est la prochaine étape du projet ? Contrairement à l’objectif du projet, la
prochaine étape est réalisable dans un temps court et permet de faire avancer le projet.
— Quelle est la prochaine date de rencontre de l’équipe projet ? La rencontre peut se
tenir à distance si nécessaire.
— A-t-il partagé ces informations avec le reste de la communauté ? Si, au bout d’un
certain laps de temps, le référent n’arrive pas à partager les informations, le facilitateur
peut le faire à sa place, mais il est bien plus intéressant pour la vie de la communauté
d’avoir plusieurs porteurs de projets qui informent la communauté.
Le facilitateur de projets peut suivre chaque projet à l’aide d’un document type de
suivi19. Lorsqu’un projet s’essouffle, il peut avertir et mobiliser les animateurs ou
l’ensemble de la communauté pour permettre au projet d’avancer. Le facilitateur est celui
qui doit voir ce que le reste de la communauté ne voit pas : les informations manquantes.
Ainsi, on doit prendre en compte que tous ne coopèrent pas sur tout et que l’on n’a pas
beaucoup de temps à y consacrer. Le facilitateur, en aidant la communauté, va gagner en
légitimité et en reconnaissance, en consacrant à la tâche un temps raisonnable. Il va être
l’artisan de la symbiose entre la communauté et un ensemble de projets ouverts.

19. Téléchargez le document type de suivi de projets, que vous pouvez recopier ou adapter, sur https://frama.link/anim1h-suivi.

26

Le courrier des animateurs

Comment trouver le temps ?
Question : Bonjour. J’ai accepté le rôle de facilitateur, mais je n’arrive pas à passer
l’heure nécessaire, à chaque fois je suis happé par autre chose. Comment faire ?
Réponse : Tout d’abord, définissez le moment par défaut où vous allez réaliser cette
tâche, de préférence en début de semaine. Commencez tout de suite ! Pour la plage
horaire, vous choisirez le soir, si le groupe se situe en dehors de votre travail qui vous
occupe en journée. Dans le cas contraire, ce sera le matin ou l’après-midi. Si vous avez
bloqué une demi-journée et que vous avez accompli cette tâche en deux heures ou même
en une heure, vous aurez le temps de faire d’autres choses.
Si vous êtes pris une semaine pendant le temps prévu pour une raison quelconque,
décalez votre « rendez-vous de facilitation » à un autre moment dans la semaine.
Si vraiment vous manquez ces moments, non pas de façon ponctuelle, mais de façon
trop régulière, alors votre dernière action proactive doit consister à trouver un nouveau
facilitateur dans le groupe pour vous remplacer.

27

—3—
Communauté :
la puissance du nombre

Une communauté, c’est quoi ?
L’encyclopédie en ligne Wikipédia nous propose la
définition suivante : « Une communauté [...] est un
ensemble de personnes vivant ensemble pour le bien
commun et le bien de chacun. » Une communauté
n’implique pas forcément de vivre tout le temps
ensemble. Dans le cas des communautés d’intérêt, elles
« seront non pas sur un lieu commun, mais avec un
intérêt commun. Dans chaque domaine, l’ensemble de
la communauté d’intérêt sera assez large pour soutenir des programmes et des données
axés sur le terrain.20 »
On parle donc de communauté21 quand le groupe est suffisamment large pour bien
fonctionner. À l’inverse, une « équipe projet » doit réaliser un ensemble d’activités et
d’actions et ne doit pas être trop grande pour gérer efficacement les tâches nécessaires.
Une communauté et une équipe projet ont des objectifs bien distincts : ceux de la
communauté sont centrés sur la vie de la communauté, alors que ceux de l’équipe projet
sont axés sur le développement d’un projet. L’équipe projet gère des contraintes, alors
qu’une vaste communauté ouvre des opportunités. Pour résoudre ce dilemme, nous allons
devoir articuler les deux : une communauté intégrant des équipes projet.

20. La notion de communauté d’intérêt a été introduite par Joseph Carl Robnett Licklider et Robert W. Taylor, in « The Computer as a
Communication Device », Science and Technology, 1968, disponible sur memex.org/licklider.pdf.
21. Le terme français « communauté » est moins large que l’anglais « community » qui couvre pratiquement tous les groupes (par
exemple, les parents d’une même école). Ce glissement sémantique étant passé dans le langage courant, nous parlerons ici de communauté au
sens anglais de « communauté d’intérêt » (« community of interest »).

28

Combien sommes-nous ? Le plus possible !
La loi de Metcalfe22 stipule que « l’utilité d’un réseau est proportionnelle au carré du
nombre de ses utilisateurs ». (Nous considérerons pour l’instant que la notion de réseau
est équivalente à celle de communauté.) Imaginez que vous soyez le seul à avoir un
téléphone sur la planète ; il vous sera alors de peu d’utilité. Si nous sommes deux, nous
pouvons commencer à l’utiliser. Une troisième personne ouvrira la porte à trois
possibilités d’échanges, et ainsi de suite... Le nombre de personnes pouvant échanger
entre elles croît chaque fois que la communauté s’agrandit.
Mais, comme nous l’avons vu, nous sommes limités à des alliances d’une douzaine de
personnes. Pour dépasser cette limitation nous allons devoir utiliser une deuxième règle
dite « règle du 1 % » (également appelée principe 90-9-1). Celle-ci explique, de façon assez
contre-intuitive, que dans des groupes de plus de douze de personnes le pourcentage de
personnes actives est assez constant :
— Les proactifs, ceux qui prennent des initiatives représentent quelques pour-cent
(entre 1 et 5 %).
— Les réactifs, ceux qui réagissent lorsqu’on les sollicite, sont quelques dizaines de
pour-cent (entre 10 et 20 %)23.
— Les autres sont soit observateurs (ils suivent ce qui se passe sans contribuer), soit
inactifs (ils ne suivent pas ce qui se passe et ont même peut-être oublié qu’ils font partie
du groupe)24.
Pour comprendre cette loi, il faut savoir qu’une personne (vous ou moi) peut prendre
un niveau d’activité différent, en fonction du groupe et selon le moment, au sein d’un
même groupe. Chacun réagit en percevant de façon inconsciente si le nombre d’actifs est
faible — ce qui laisse de la place pour s’impliquer — ou si, au contraire, il est trop
important — noyé dans la multitude d’acteurs, chacun étant moins visible, cela peut
inciter à se « désimpliquer ».
Partant de cette règle, on s’aperçoit que pour avoir un groupe aussi actif qu’un groupe
de douze personnes — où chacun est actif à quelques exceptions près —, il faut un groupe
Cette loi a été proposée à l’origine par Carl Shapiro et Hal R. Varian, Information Rules, Harvard Business School Press, Boston, 1999.
23. La règle est de 1 % et 9 % respectivement pour les proactifs et les réactifs, mais avec des méthodes et une animation adéquate, nous
pouvons atteindre jusqu’à 5 % de proactifs et 20 % de réactifs, voire jusqu’à 50 % lorsque la question est très simple, par exemple lorsqu’on
demande de se présenter.
24. Les observateurs et les inactifs n’étant pas visibles dans le groupe, il est difficile de distinguer ces deux populations et de savoir si leur
taux respectif est stable.
22

29

d’une centaine de personnes dans lequel on compte 10 à 20 % de réactifs. Le gros
avantage est que, contrairement à un groupe de douze, une communauté de cent
personnes peut continuer de grossir et créer ainsi plus de valeur25.
Il existe quelques exceptions auxquelles cette règle n’est pas toujours applicable : une
communauté sur une courte durée (lors de rencontres, par exemple), une communauté
avec des membres très militants, mais qui parfois limitent l’accès à ceux qui le sont moins.

Le courrier des animateurs

Comment être plus nombreux ?
Question : Mon groupe est constitué d’une cinquantaine de bibliothécaires sur le
territoire. Je n’ai donc pas atteint les cent personnes dans mon groupe. J’ai du mal à avoir
suffisamment de personnes impliquées. Comment faire ?
Réponse : Ma réponse va vous surprendre : ajoutez au moins cinquante personnes qui
n’ont pas nécessairement un intérêt direct avec votre groupe, mais qui acceptent de
participer. Alors le nombre d’actifs va doubler ! Et pourquoi ne pas ouvrir votre groupe aux
utilisateurs des bibliothèques ou encore à des bibliothécaires en dehors du territoire ? Ce
ne seront probablement pas les plus actifs, mais certains suivront ce qui s’y passe. Après
quoi, certains membres du groupe et probablement les bibliothécaires qui étaient dans le
groupe à l’origine deviendront plus réactifs… C’est toute la magie de la règle du 1 %.

Une communauté, ça sert à quoi ?
Une communauté d’intérêt peut servir à plusieurs choses, qui ne se retrouvent pas
toutes dans l’ensemble des communautés, mais dont certaines peuvent vous faire gagner
du temps.
• Une communauté sert à diffuser de l’information. Elle peut être particulièrement utile
pour aider à s’approprier cette information. C’est le rôle principal du community manager
que de diffuser des messages, aider les membres à se les approprier, et les faire réagir.
Mais si la communauté se limite à ce rôle, les interactions entre les membres seront
limitées. La majorité des échanges se font depuis ou vers un centre : le community
manager.

25. Il y a cependant une limite (quelques milliers de membres) au-delà de laquelle les interactions entre les membres de la communauté
sont moins efficaces. Nous verrons plus loin comment dépasser cette limite.

30

• Une communauté sert à s’entraider et à monter en compétence collectivement. Si
l’échange entre les membres devient la règle et non l’exception, comme dans le premier
cas, alors la communauté prend toute sa puissance. Le sentiment d’appartenance qui se
dégage favorise naturellement l’entraide entre les membres. De plus, chacun peut
partager sa veille ou les informations qui lui ont été utiles, permettant ainsi une montée
en compétence collective. Pour que cela fonctionne sans trop d’efforts, il est nécessaire
d’avoir suffisamment de personnes actives. À partir d’une centaine de membres, on aura
généralement assez de personnes pour réagir lorsqu’on pose une question. Mais le
nombre de proactifs (ceux qui prennent des initiatives) est souvent trop faible. La
communauté fonctionnera, surtout au début, à condition qu’un animateur pense à lancer
des questions lorsque les échanges se tarissent.
• Une communauté sert (si possible) à faciliter des projets collectifs. Comme nous
l’avons vu, les projets collectifs ne sont pas indispensables à la communauté, mais ils
apportent beaucoup de vie ; la communauté est un excellent « cocon » pour développer
des projets à condition qu’ils s’ouvrent à l’ensemble de la communauté. Cela nécessite,
cependant, de savoir distinguer ceux qui forment l’équipe projet — et qui assurent
l’avancement du projet — du reste de la communauté qui, elle, est informée de
l’avancement et y contribue ponctuellement. Si les porteurs de projets apportent
beaucoup de temps et d’énergie, ils se focalisent avant tout sur leur projet. Le facilitateur
a un rôle simple, qui ne prend en général qu’une heure par semaine, mais qui est
extrêmement important pour intégrer les projets au sein de la communauté.
• Une communauté sert (parfois) à développer de l’intelligence collective.
« L’intelligence collective désigne les capacités cognitives d’une communauté résultant
des interactions multiples entre ses membres. » Ici, la dynamique n’est pas axée sur une
petite équipe, comme dans les projets classiques, mais c’est avec l’ensemble de la
communauté que va se dérouler l’intégralité de l’action. Il s’agit d’une activité plus
complexe qui ouvre de grandes possibilités : des idées collectives, des prévisions
collectives, etc. Elle n’est pas indispensable pour faire fonctionner la communauté,
notamment grâce aux trois autres modes d’animation précédents. Nous verrons plus tard
comment, avec un peu de méthode, « le tout peut être plus que la somme des parties26 ».

26 Voir Jean-Michel Cornu, “Comment produire un document à plusieurs centaines de personnes”, in “Faire ensemble ! Manuel à l’usage des
animateurs de réseaux collaboratifs”, Coop-tic.eu - http://tinyurl.com/produire100

31

Exemples

La communauté Fablab-fr et les fablabs français
• La communauté Fablab-fr rassemble des lieux de fabrication numérique dans le
monde27. La fabrication numérique consiste à utiliser des machines connectées à un
ordinateur (fraiseuse, découpeuse laser ou vinyle, imprimante 3D, système de contrôle
électronique de capteurs et d’actionneurs, etc.). Cela permet d’abaisser fortement les
coûts pour fabriquer ou réparer à peu près n’importe quoi28, d’échanger des plans et des
fichiers de contrôle de machines sur internet et ainsi de partager très facilement les idées
et les réalisations29. On trouve dans cette communauté des fablabs qui ont accepté la
charte de la Fab Foundation pour former un réseau de lieux de fabrication numérique30,
mais aussi d’autres types de lieux tels que les hackerspaces, les makerspaces ou encore les
« bidouilleurs » isolés. Le point commun entre ces acteurs, outre leur intérêt pour la
fabrication numérique ouverte, est d’échanger en français. Ce groupe rassemble donc des
lieux situés en Afrique, au Québec, en France, en Belgique, en Suisse ou encore au
Viêt Nam. Il permet surtout l’entraide et la montée en compétence collective de tous les
membres à travers l’échange d’information et de savoir-faire.
• Les fablabs français, également présents au sein de la communauté Fablab-fr (décrite
supra), ont eu besoin de se structurer pour développer des réponses communes aux
appels à projet lancés par la France.
Une liste de discussion spécifique a été d’abord mise en place pour déterminer la forme
de la structure, puis, progressivement, les outils nécessaires à son fonctionnement et,
enfin, pour définir l’association elle-même. Il ne s’agit pas dans ce cas d’une communauté
informelle telle que nous l’avons vu, mais d’une organisation structurée (ici une
association) qui offre à ses membres une représentativité et une stratégie communes31.
Quand il s’agit de s’entraider, d’échanger des savoir-faire, quel que soit le pays ou le type
d’acteur, les échanges se font sur la communauté Fablab-fr. Mais lorsqu’il s’agit de
s’organiser entre fablabs français, par exemple pour rechercher un financement commun,
cela se passe au sein de l’association Réseau français des fablabs.

Pour en savoir plus
Fablab-fr : http://coop-group.org/fablab-fr/ environ 400 membres
Voir le cours “how to make (almost) anything” de Neil Garshenfeld, directeur du center for bits and atoms du MIT et initiateur du
réseau des Fablabs : http://ng.cba.mit.edu/
29 Charte des Fab Labs : http://coop-group.org/fablab-fr/wakka.php?wiki=CharteFablabs
30 Charte des Fab Labs : http://coop-group.org/fablab-fr/wakka.php?wiki=CharteFablabs
31 Association Française des Fablabs : http://www.fablab.fr/
27
28

32

Communauté ou association ?
Lorsque l’on souhaite créer un collectif pour y développer un ou plusieurs projets, la
première idée qui vient à l’esprit pour structurer notre organisation est de constituer une
association. Par rapport à une communauté informelle, développer une structure
comporte des avantages, mais aussi des inconvénients.
Mettre en place une communauté permet de rassembler tous ceux qui le souhaitent
sans nécessiter d’adhésion. La communauté grandit plus vite qu’une association ; elle
atteint plus facilement la centaine de membres. Elle rassemble des particuliers, mais aussi
d’autres organisations qui pourraient être réfractaires à l’idée qu’une autre structure
concurrente les chapeaute, alors qu’une communauté informelle peut répondre
positivement aux mêmes besoins (mettre en réseau des acteurs sur un territoire ou autour
d’un thème).
Par ailleurs, la légitimité au sein d’une communauté est acquise par ceux qui sont les
plus actifs et qui agissent pour le bien de tous, alors qu’une structure s’appuie sur des
représentants. Il est donc plus facile de développer l’activité et l’implication au sein d’une
communauté ; les enjeux de pouvoir y sont plus faibles.
Il est parfois utile de s’appuyer sur une structure existante pour gérer un budget, des
salariés ou lorsqu’on a besoin d’un représentant « officiel » pour discuter avec les
autorités. Dans ce cas, plutôt que de transformer la communauté en structure, il existe
plusieurs possibilités :
• L’implantation d’un projet collectif particulier peut exiger la mise en place d’une
structure, tandis que la communauté qui y contribue peut demeurer informelle. Par
exemple, au sein de la communauté Tiers-lieux Libres et Open Source (TiLiOS) qui
rassemble des tiers-lieux (environnements sociaux qui se distinguent de la maison et du
travail), chaque projet (chaque tiers-lieu) a besoin d’une structure légale, mais la
communauté qui facilite l’échange et l’entraide n’est qu’une simple mise en réseau
informelle.
• La communauté peut s’appuyer, au cas par cas, sur l’une des organisations qui en est
membre. Cela permet d’avoir à chaque fois la structure qui est la mieux adaptée. La
communauté IP Burkina rassemblant des innovateurs sociaux au Burkina Faso s’appuie,
lorsque cela est nécessaire, sur certaines associations membres comme OugaLab, NTBF ou
Yam Pukri, ou encore, au niveau international, sur l’association Imagination for People.
33

• La communauté peut aussi décider de créer une petite association distincte qui en
assure le secrétariat. L’Internet Engineering Task Force (IETF) qui développe les standards
de l’internet n’a pas de structure formelle. Pourtant, lorsque cela est nécessaire, elle
s’appuie sur L’Internet Architecture Board (IAB) qui est un groupe de travail de
l’association Internet Society. Avec 21 membres en 1986, L’IETF rassemble aujourd’hui des
milliers de participants au sein de centaines de groupes de travail, avec les enjeux que l’on
imagine. Il en va de même avec la communauté de l’encyclopédie en ligne Wikipédia qui
s’appuie sur la « petite » Wikimedia Foundation ou, encore, l’écosystème collaboratif
Coop-group qui, à ses débuts, s’est appuyé à l’association Imagination for People avant de
devenir autonome.

Le leader : grandeur et décadence
Nous avons déjà vu différents rôles d’animation : le référent de projet, qui permet de
faire vivre un projet, et le facilitateur qui fait le lien entre les projets et la communauté.
Les leaders, quant à eux, favorisent le développement de la communauté. Idéalement, ils
doivent être amplement connus pour susciter de nouvelles recrues au sein de la
communauté et suffisamment légitimes pour servir d’arbitre en cas de problème.
En règle générale (mais pas toujours), les leaders sont les fondateurs de la
communauté. Un leader un peu trop présent peut devenir un obstacle pour la
communauté. En effet, s’il s’investit totalement dans l’unique projet de la communauté, il
est peu probable que d’autres projets puissent voir le jour. S’il est lui-même au cœur d’un
conflit, il ne pourra plus arbitrer de façon légitime. Le leader doit savoir avant tout laisser
de l’espace et éviter toute zone d’influence exclusive, tout en aidant la communauté à
trouver sa voie. Tout un art ! Quand le leader fondateur ne parvient pas à susciter des
initiatives (ou ne le souhaite pas), il arrive parfois qu’il cède au découragement et préfère
se désengager. Il peut ensuite éprouver un sentiment d’échec, si la communauté continue
de progresser sans lui, et choisira alors de détruire ce qu’il a créé. On parle de « créateur
fossoyeur ».
Un leader n’a pas besoin d’être très présent ni de consacrer beaucoup de temps à la
communauté. Il risque, au fur et à mesure du gain de notoriété de la communauté (et de
la sienne), d’être de plus en plus sollicité en dehors de la communauté. S’il a su prendre
soin de s’entourer d’un facilitateur efficace — qui le prévient en cas de conflits ou sur la
nécessité de motiver la communauté — et de plusieurs équipes projet actives, il pourra,
34

au bout d’un certain temps, s’appuyer sur lui et s’en tenir à ses préconisations. Ainsi, il
apportera sa légitimité à la communauté tout en laissant de la place aux plus actifs.

Le courrier des animateurs

Question : Bonjour. J’ai procédé comme vous l’avez conseillé, mais je n’arrive toujours
pas à avoir des volontaires ?
Réponse : Êtes-vous sûr d’être vraiment prêt à laisser de la place dans le groupe ? Avezvous peut-être le sentiment de vouloir intégrer de nouvelles personnes pour ne pas être
seul, mais vous n’êtes pas sincèrement prêt à leur laisser de la place ? Dans ce cas, il est
possible que la séparation de l’animation en plusieurs rôles vous aide à laisser votre « pré
carré ». Mais seriez-vous prêt à laisser de la place à d’autres acteurs ?
Vous pouvez aussi être victime de la « résistance au changement » que l’on trouve dans
tous les groupes. Une solution consiste à réinventer collectivement les fondements du
groupe32.
Si vous êtes leader d’un groupe (non pas de « votre » groupe) et que vous libérez de la
place pour accueillir d’autres personnes, cette place peut toujours être perçue comme
symboliquement occupée (surtout si vous avez du charisme). Vous allez devoir répéter
qu’il y a de la place pour de nouveaux animateurs, en discuter directement avec certains
membres, et s’ils sont prêts à aider le groupe (et non pas à vous aider), vous devrez encore
les accompagner et leur fournir la légitimité requise face au reste du groupe.

On peut comprendre que certains leaders, qui se sont exténués à maintenir l’ardeur du
groupe, souhaitent passer le relais rapidement. Dans ce cas, il s’agira de les remplacer.
Mais profiter de l’arrivée de nouveaux animateurs pour vouloir se désengager le plus
rapidement possible n’est pas indiqué. Car pour permettre au groupe de continuer à se
développer, il faut être, au contraire, extrêmement proactif pendant la période de
transition. Dans tous les cas de figure, il faut accompagner la montée en puissance des
nouveaux membres de l’équipe d’animation.

32. Cf. partie III, chap. 3 « Le fonctionnement de la communauté : parlons-en ensemble ».

35

—4—
L’information,
premier moyen d’animation

L’outil... pour le meilleur ou pour le pire
Ésope, le célèbre fabuliste grec, raconte qu’un jour
son maître, Xanthos, lui demanda d’aller acheter au
marché ce qu’il y a de meilleur. Celui-ci revint avec
uniquement des langues. Le lendemain, son maître lui
demanda de prendre, cette fois, ce qu’il y a de pire. De
nouveau, Ésope ne revint qu’avec des langues. Ainsi la
langue est la meilleure et la pire des choses. Elle nous
permet de coopérer, mais aussi de nous disputer, de
médire…
Il en va de même avec les outils qui vont nous aider à animer le groupe. Ils sont ce qu’il
y a de meilleur pour nous permettre d’aller plus loin dans notre animation ou ce qu’il y a
de pire, lorsque nous leur déléguons tout — y compris nos responsabilités.
Nous allons aborder maintenant un ensemble de méthodes complémentaires
d’animation qui s’appuient parfois sur des outils que nous utiliserons plutôt comme des
béquilles pour nous aider à aller plus loin, quitte à pouvoir s’en passer par la suite, que
comme des jambes de bois pour nous remplacer.

Qui faut-il informer ?
Nous pouvons vouloir informer les membres de la communauté, mais nous pouvons
également informer au-delà et toucher des membres en dehors de la communauté.
Quand certaines informations ne doivent pas sortir du groupe, la frontière entre membres
et non-membres doit être bien définie. Mais si l’on souhaite que les informations touchent
le plus grand nombre, cette frontière peut être un frein, notamment pour les
36

communautés informelles, pour la plupart des associations et parfois pour les entreprises
lorsqu’elles appliquent l’innovation ouverte — qui rassemble les employés chargés de
l’innovation, les autres salariés de l’entreprise, les clients, les fournisseurs et même,
parfois, les concurrents ! Les informés « de l’extérieur » seront peut-être demain les actifs
« de l’intérieur ». Les échanges entre les membres de la communauté peuvent être parfois
difficiles à suivre pour ceux qui se trouvent à l’extérieur. En revanche, les informations
diffusées doivent demeurer accessibles à tous, membres, non-membres y compris ceux
qui suivent de loin par manque de temps.

Personne ne m’écoute !
Dans une communauté, la principale clé de l’information n’est pas d’identifier ceux
qu’elle ne doit pas toucher, mais plutôt de prendre en compte qu’elle doit s’adresser à
ceux qui n’ont pas le temps.

Exercice individuel

Titres pleins, titres creux — je lis ou je ne lis pas...
La qualité du titre de l’information que vous souhaitez diffuser influera sur le nombre
de personnes qui liront votre texte. Imaginez deux titres pour une même information :
1— Match de football entre Longeverne et Velrans.
2— Football : Longeverne écrase Velrans, hier, par un score historique, 4-0 !
Les journalistes parlent de « titres pleins » ou de « titres creux ». Ils utilisent souvent
deux types d’information dans leurs titres :
— une question qui donne envie d’en savoir plus, par exemple : « L’outil est-il la
meilleure ou la pire des choses ? » ;
— un nombre : « trois conseils pour faire échouer votre groupe », auquel j’ai ajouté ici
une once de provocation.
Prenez une information que vous souhaitez diffuser autour de vous (votre
communauté, vos amis, votre famille, etc.) et imaginez trois « titres pleins », les plus
courts possible. Vous pouvez également vous amuser à trouver un meilleur titre pour la
partie de football citée plus haut.

37

Qui diffuse l’information ?
Selon la maturité de la communauté et ses caractéristiques propres, l’information peut
être diffusée par une personne, par un petit groupe ou par tous ceux qui le souhaitent.
Cela peut varier en fonction du type d’information et de la cohérence que l’on souhaite
donner à l’extérieur du groupe. L’essentiel est de ne pas oublier d’informer !
Notre facilitateur entre alors en scène ! Pas forcément pour diffuser les informations,
mais pour le rappeler à celui ou ceux en charge de le faire. Diffuser l’information peut être
défini comme un projet à part entière, une activité suivie au sein de la communauté.
On rencontre deux difficultés majeures lors de la gestion de l’information :
• Trop nombreux sont ceux qui diffusent l’information. Dans ce cas, il faut centraliser
l’information.
• Peu nombreux sont ceux qui diffusent l’information. Dans ce cas, il serait judicieux
d’attribuer ce « projet » à un petit groupe ou à une personne du groupe, telle que le
leader, le facilitateur ou une personne dédiée à qui l’on attribue le rôle de « griot33 »
(blogueur, community manager, journaliste, etc.).

Quels sont les outils pour informer ?
Si nous souhaitons toucher le plus grand nombre, y compris en dehors de la
communauté, nous pouvons nous aider d’outils — à condition de ne pas faire ce qu’il y a
de pire avec ces outils ! Avant l’internet, les associations utilisaient la ronéotype pour
diffuser un communiqué, mais aussi les médias traditionnels (presse, radio, télé) — mais
tout le monde n’avait pas un accès régulier à ces médias. L’arrivée de l’internet a offert de
nouvelles possibilités et des outils très performants :
• Le blog, qui nécessite d’abord un petit apprentissage, permet de diffuser facilement
des informations de façon propre sur le web.
• La newsletter permet de diffuser directement dans la boîte aux lettres de ceux qui se
sont inscrits, mais sa diffusion doit être accompagnée d’un outil particulier tel que l’autorépondeur qui permet d’envoyer un grand nombre d’e-mails sans qu’ils se retrouvent dans
les spams.

33

Le griot est une personne qui officie comme communicateur traditionnel en Afrique occidentale : https://fr.wikipedia.org/wiki/Griot

38

• La page Facebook diffuse très facilement, de façon virale (les amis des amis). Il est
même possible, pour les pages publiques, d’y accéder sans disposer d’un compte
Facebook. Elle doit être mise à jour par une ou par quelques personnes bien identifiées.
• Le groupe Facebook permet à tous ceux qui s’y inscrivent de contribuer34, mais ne
peut pas être facilement intégré dans un site web en dehors de Facebook lui-même.
• D’autres réseaux sociaux, comme LinkedIn ou Google+, permettent de toucher des
cibles particulières, mais limitent l’information à ceux qui y sont inscrits.
• Twitter est très efficace pour la diffusion virale (amis des amis, mots clés sous forme
de hashtags), mais se limite à des informations brèves (cent quarante caractères) ou
pointe vers une information plus complète vers laquelle il faut prendre l’initiative d’aller.
Dans tous les cas, il est utile de définir une ligne éditoriale et une périodicité pour
garder une certaine cohérence. Rien n’empêche, en revanche, de publier les informations
sur plusieurs canaux pour toucher plus facilement chaque personne selon ses préférences.
Il existe de nombreux outils plus adaptés à d’autres usages, que nous détaillerons plus
loin, tels que les sites web ou wiki (pour les espaces de partage), les listes mails (pour les
discussions), les comptes Facebook (réservés à une personne unique), etc.

Multiplier les canaux de diffusion
Si l’on souhaite toucher le plus grand nombre, la meilleure solution consiste à utiliser
différents canaux de diffusion. Pour gagner du temps, j’utilise, à titre personnel, l’outil
Twitterfeed. Il me suffit de publier les informations sur mon blog et celles-ci sont
automatiquement republiées sur mes comptes Facebook, Twitter et LinkedIn. Pour suivre
les réactions sur plusieurs canaux de diffusion à la fois, il existe des outils comme
Hootsuite. N’oubliez surtout pas les autres canaux de diffusion : médias traditionnels,
bouche-à-oreille, etc.

Le community manager et les limites des commentaires
Pour faciliter l’appropriation des informations diffusées, le community manager
encouragera son public à laisser des commentaires et favorisera l’échange entre ceux qui
les publient. Les échanges se produisent principalement entre le community manager et

34

Un groupe Facebook peut être public, fermé ou secret.

39

les membres, et lorsque les membres de la communauté échangent entre eux, ils le font
toujours à partir d’un message initié par le community manager.
On peut avoir plusieurs personnes en charge de l’information qui organisent leur
activité selon une répartition des médias ou en travaillant ensemble. Cela peut être très
efficace à condition de ne pas être trop nombreux : comme toute équipe projet, trois à
quatre personnes suffisent et il ne faut pas dépasser la douzaine (à moins de structurer
l’équipe avec des sous-équipes, mais cela n’est vraiment nécessaire que pour un très
grand projet).
Si nous voulons aller plus loin dans les interactions entre les membres de la
communauté, nous allons devoir ajouter d’autres méthodes d’animation à la diffusion
d’information.

40

—5—
Des rencontres pour
« booster » les plus actifs

Combien sommes-nous ? À quoi ça sert ?
Tout le monde ne participe pas à toutes les
rencontres qu’organise la communauté. Certains ont
des empêchements ou sont éloignés et ont plus de
mal à participer. Selon le niveau d’implication de
chacun, la priorité qui est donnée à la communauté
n’est pas la même. On retrouve généralement le
même pourcentage de participation que de réactifs
(soit 10 à 20 % des inscrits). Cette participation peut
être plus faible pour des réunions de travail — on peut se retrouver alors dans la
configuration d’une équipe projet — ou plus forte pour les rencontres exceptionnelles.
Les rencontres ne touchant pas toute la communauté, elles réunissent cependant une
bonne part des plus actifs. Se retrouver ensemble permet de constater que l’on n’est pas
le seul actif. Ces rencontres sont un véritable moteur pour motiver les actifs. Grâce à leur
temps limité et aux interactions nombreuses, elles permettent également d’accélérer
l’avancement des projets.

Présentiel et à distance
Nous pouvons définir une rencontre comme un moment où une partie de la
communauté (ou une équipe projet) se retrouve de façon synchrone, à telle date et à telle
heure, pour une durée limitée.
Nous cherchons à créer la communauté la plus vaste possible. Celle-ci peut être centrée
sur un territoire, dans ce cas il est plus facile de se retrouver, ou sur une thématique, alors
la communauté peut ne pas avoir de limite géographique35. Il n’est pas toujours possible

35. La seule limite d’une communauté thématique est souvent la langue qu’il faut maîtriser pour pouvoir participer.

41

de se réunir dans un lieu, car cela est très coûteux. Heureusement, la technologie permet
aujourd’hui de le faire à distance. Nous verrons dans la deuxième partie différents outils
pour se rencontrer en ligne.

Le courrier des animateurs

Proche et loin, en même temps
Question : Mon groupe comprend des personnes proches qui peuvent se réunir
facilement et d’autres, plus éloignées, qui ne viennent que rarement. Que dois-je faire ?
Réponse : Ne vous privez pas des réunions physiques avec ceux qui le peuvent, mais
n’oubliez pas non plus ceux (réactifs ou observateurs) qui ne participent pas aux
rencontres en présentiel. Tenez-les au courant grâce aux échanges en ligne et mettez à
jour l’espace de partage avec ce qui a été dit. Vous pourrez trouver un bon équilibre entre
les rencontres en présentiel et celles à distance. Dans tous les cas, n’oubliez jamais que
seule une partie du groupe participe aux rencontres et que tous les autres (observateurs
ou réactifs non disponibles) sont importants pour le groupe.

Généralement, on s’implique davantage lors des réunions en présentiel. La
communauté devra alors trouver le bon équilibre avec les réunions à distances. Une
communauté « territoriale » se réunira principalement en présentiel, mais pourra aussi
organiser de temps en temps une réunion à distance pour permettre à ceux qui sont
éloignés de participer. Une communauté « thématique » utilisera probablement plus
facilement des rencontres à distance, mais pourra organiser une réunion en présentiel, par
exemple une fois par an, pour permettre au moins à quelques membres très impliqués,
mais éloignés de se rencontrer physiquement.

Se rencontrer régulièrement
Que l’on se rencontre en présentiel ou à distance, ces moments synchrones sont
importants pour la vie de la communauté, même si tout le monde n’y participe pas. Il est
bon de prévoir ces rencontres régulièrement et de les planifier pour faciliter la
participation. Certaines communautés se réunissent mensuellement. Choisissez le bon
rythme en présentiel et à distance, idéalement en sollicitant l’avis de la communauté.

42

Les participants aux « projets ouverts de la communauté » peuvent également — en
plus des rencontres qui concernent l’ensemble de la communauté — se réunir de leur
côté, d’ordinaire en présentiel. Il ne faut pas oublier de communiquer les dates de ces
réunions au reste de la communauté afin de permettre à d’autres personnes de venir et
de s’impliquer dans les projets.

Pour en savoir plus

Trouver une date et une heure qui conviennent au plus grand nombre
Se réunir, c’est aussi trouver une date et une heure communes. Cette tâche
chronophage s’est énormément simplifiée grâce à des outils très simples qui permettent
de créer des sondages en ligne. Par exemple, il existe le service libre en ligne Framadate
(https://framadate.org/, développé par le réseau d’éducation populaire Framasoft), qui ne
gère pas encore les décalages horaires, ou encore l’outil propriétaire Doodle
(http://doodle.com/).

Le casse-tête des décalages horaires
Si la réunion se déroule à distance, avec plusieurs pays, soyez attentifs aux fuseaux
horaires. Des sites comme http://www.horlogeparlante.com/horloge-mondiale.html pourront
vous aider. Notez que ces sites indiquent généralement l’heure actuelle. Le décalage
horaire entre les pays varie en fonction des dates différentes utilisées pour l’heure d’été36.
— Entre le deuxième et le dernier dimanche de mars, les États-Unis et le Canada sont
déjà passés à l’heure d’été, tandis que l’Europe est encore à l’heure d’hiver — excepté
l’Australie, qui change d’heure le troisième dimanche d’avril, l’Autorité palestinienne, le
troisième vendredi d’avril, ou le Brésil qui passe en heure d’hiver le troisième dimanche de
février (sauf si cette date coïncide avec celle du carnaval !).
— Entre le dernier dimanche d’octobre et le premier dimanche de novembre : les ÉtatsUnis et le Canada sont passés à l’heure d’été, alors que l’Europe est à l’heure d’hiver —
excepté l’Australie, qui change le premier dimanche d’octobre, ou la Jordanie qui passe en
heure d’hiver le dernier jeudi de septembre.
Pour ma part, j’évite d’organiser une réunion à distance internationale entre le
deuxième et le dernier dimanche de mars et entre le dernier dimanche d’octobre et le
36

Voir l’article heure d’été sur Wikipédia : https://fr.wikipedia.org/wiki/Heure_d%27%C3%A9t%C3%A9

43

premier de novembre. Cela permet de parer à toute éventualité, mais n’exclut pas
d’autres particularités : le Maroc fixe des dates différentes tous les ans et certains
territoires des États-Unis ou du Canada n’utilisent pas l’heure d’été, etc.
Pour vous consoler, sachez que beaucoup de pays d’Afrique, d’Amérique du Sud et
d’Asie ne changent
pas

d’heure

au

cours de l’année
(cf.

la

carte

ci-

contre37 : en rouge
pour

ceux

qui

n’ont

jamais

eu

d’heure d’été et
en orange pour ceux qui ont laissé tombé).

Prendre des notes : barbant ou amusant…
Lors d’une réunion, il se dit des choses très intéressantes grâce aux contributions des
uns et des autres. On prend des décisions et l’on fixe des actions à mener.
Prendre des notes peut s’avérer être un exercice barbant : il faut être très motivé et
attentif pendant les réunions. Mais cela peut être très plaisant lorsqu’on le fait
collectivement. Il existe des outils en ligne très simples qui permettent d’écrire sur le
même document. Les pads offrent la possibilité de rédiger un compte rendu à plusieurs
mains. Chaque participant a une couleur d’écriture différente et peut compléter ce qui a
été noté par d’autres. Le résultat est efficace et l’exercice assez amusant. Les pads
peuvent être utilisés pour les réunions à distances, mais aussi en présentiel, à condition
d’avoir une connexion internet ou un serveur local. Essayez et vous ne pourrez plus vous
en passer !
Vous avez obtenu des notes complètes, à présent il faut rédiger un compte rendu
accessible, en particulier, à ceux qui n’ont pas participé à la réunion. Vous allez synthétiser
les notes et en dégager les actions à mener. Vous pouvez utiliser la technique du « rapport
d’étonnement » qui nous vient du Japon : au lieu de chercher à rédiger un compte rendu

37 Source : Paul Eggert — cc by-SA 3.0 https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/2/29/DaylightSaving-WorldSubdivisions.png/450px-DaylightSaving-World-Subdivisions.png

44

exhaustif, vous listerez simplement les éléments qui vous ont le plus étonné dans ce qui a
été abordé lors de la réunion (ce qui vous a intrigué, stimulé, irrité ou amusé). Il est
probable que ce qui vous a étonné intéresse les autres aussi. En fin de réunion, vous
pouvez organiser un rapport d’étonnement collectif, avant vos notes sur le pad, suivi d’un
plan d’actions.

Exercice collectif

Un pad pour une petite expérience irréversible
Profitez d’une réunion pour utiliser le pad, de préférence en présentiel s’il s’agit de la
première fois.
1— Connectez-vous sur https://framapad.org:, choisissez un nom simple (ici :
mongroup1) et une durée de conservation (ici : quotidien). Si vous exportez vos notes
collectives à la fin de la réunion, une journée peut suffire. Vous arrivez ensuite sur une
page à l’adresse pad suivante : https://quotidien.framapad.org/p/mongroupe1.
2— Communiquez cette adresse aux participants. Vous pouvez ensuite effacer le texte
de bienvenue, ajouter un titre, celui de votre réunion, et une date.
3— Chacun peut prendre des notes, il suffit de savoir se servir d’un traitement de texte.
Vous pouvez indiquer que cette utilisation collective nécessite un esprit civique : si un
participant souhaite effacer le texte d’un autre, par exemple s’il s’agit d’un doublon, il est
préférable de le lui demander avant.
4— Quinze minutes avant la fin de la réunion, demandez aux participants ce qui les a le
plus étonnés ou intéressés dans les échanges et ajoutez-le en début de pad pour que la
majorité en prenne connaissance, y compris ceux qui ne liront pas tout le reste. Vous
pouvez aussi y ajouter un plan d’action (qui, quoi, quand).
5— Exporter le pad dans le format que vous souhaitez pour le conserver, le diffuser à
l’ensemble de la communauté et le mettre à disposition.
Vous pouvez renouveler cette expérience en proposant à chacun d’indiquer son
prénom (icône située en haut à droite) et même utiliser le chat (tout en bas, à droite).

L’organisateur des rencontres

45

N’oubliez pas de fixer la prochaine rencontre ! Il faut donc réaliser un sondage auprès
de la communauté afin de pouvoir communiquer rapidement le résultat avec le jour et
l’heure de la ou des prochaines rencontres.
Le vocabulaire anglais, très riche pour ce qui a trait aux réunions, permet de distinguer
celui qui a pour responsabilité de fixer la date et d’inviter les participants (convenor) de
celui qui anime (préside) la réunion (chairman).
Pour nous, il est important de savoir qui organise les rencontres : le leader, le
facilitateur, l’animateur de la réunion, quelqu’un d’autre ? Il n’est pas impossible d’avoir
plusieurs personnes pour cette tâche. Le facilitateur, qui suit déjà l’avancement des
différents projets, pourra s’assurer qu’une prochaine date est bien fixée même si ce n’est
pas lui qui lance le sondage et l’invitation. Il faudra peut-être nommer un organisateur de
rencontres (l’équivalent du convenor).

Les différents moments de la rencontre
Prévoyez deux temps particuliers en début et en fin de rencontre.
Au début de la rencontre, il peut être bon de prendre un quart d’heure — ou une demiheure s’il s’agit d’une rencontre à distance — pour lancer la dynamique. Un premier tour
de table permet à chacun de s’exprimer une première fois — et vérifier si son micro
fonctionne bien lors d’une rencontre à distance. Cela facilite la prise de parole par la suite :
on parle d’activités « brise-glace » (ice breaking activities). On peut se présenter (pour
ceux qui ne se connaissent pas) en donnant de préférence son prénom et trois mots clés
pour éviter les longs monologues, ou simplement exprimer comment on se sent (on parle
de « météo intérieure ») — ce qui permet de savoir dès le début si quelqu’un est tendu
pour une raison ou une autre, et de mieux l’accepter ensuite.
À la fin de la rencontre, le « rapport d’étonnement » offre la possibilité de synthétiser
de façon collégiale ce qu’il faut retenir. On peut y ajouter, lorsque c’est pertinent, un
récapitulatif des actions à mener, afin de s’assurer de l’adhésion de chacun. Prévoyez au
moins quinze minutes.
Entre la phase de démarrage et celle de conclusion, il existe de nombreuses méthodes
d’animation pour que la réunion (ou l’atelier) soit plus interactive. Le choix d’une méthode
dépend du temps disponible (moins d’une heure... à plusieurs jours) et de l’objectif à
atteindre (créativité, montée en compétence, décisions collectives, etc.). Vous trouverez
de nombreuses méthodes sur MultiBàO, la multiboîte à outils disponible en accès libre sur
46

http://multibao.org/. Je vous invite à naviguer dans les différents mots clés de ce site pour
découvrir des modes d’animation innovants.

Pour en savoir plus

Quelques exemples de méthodes d’animation
Parmi les nombreuses méthodes disponibles sur MultiBàO (http://www.multibao.org/),
en voici quelques-unes :


Accélérateur de projet : faire intervenir des pairs pour résoudre les problèmes d’un
projet.



Booksprint : pour écrire un livre de documentation en cinq jours.



Débat mouvant : débat dynamique favorisant l’émulation et la prise de position.



Donut : pour « s’ouvrir » à la vision des autres participants.



Facilitation graphique : pour « saisir au vol » les paroles, les mots, les idées.



Forum ouvert : pour explorer un sujet avec un nombre non limité de participants.



Lean Canvas : pour valider et documenter un modèle économique.



Marché des savoirs : des stands répartis dans une grande salle pour y présenter des
savoirs.



Organiser un événement participatif : pour que chacun participe à une rencontre.



Pomodoro synchrone : pour ne pas se gêner mutuellement quand on travaille
ensemble.



Sociocratie : pour la prise de décision et le mode de gouvernance auto-organisé.



Sprint d’écriture : méthode structurée pour la corédaction, en même temps et dans un
même lieu.



Table découverte : ensemble de tables où sont présentés des projets tous les quarts
d’heure.



Théâtre forum : débat participatif avec des scénarii mis en scènes par des comédiens.



Traducthon : pour une traduction collaborative et simultanée.



World café : pour générer des idées par petits groupes, les participants changeant de
table.

47

—6—
Des discussions entre les rencontres,
y compris pour les moins actifs

Combien sommes-nous ? À quoi ça sert ?
Tout le monde ne participe pas à toutes les réunions.
Ainsi, une personne peut être vite dépassée si la vie de
la communauté tourne autour des seules rencontres. De
plus, une fois la réunion passée, ceux qui y ont participé
sont parfois happés par d’autres activités. La vie reprend
son cours et on oublie la communauté jusqu’à la
prochaine rencontre.
Il est donc nécessaire de continuer les échanges entre
les rencontres. Cela permet de toucher les proactifs et
les réactifs qui n’ont pas pu participer à la dernière réunion, les observateurs et même les
inactifs qui peuvent redevenir observateurs et rentrer à nouveau dans le jeu. Les
observateurs et les inactifs sont aussi vos amis ! Ce sont eux qui créent un premier public
pour les actifs. Ceux qui ne sont pas actifs peuvent le devenir et ainsi, par le jeu des
arrivées et des départs, cela permet de conserver votre taux de proactifs (quelques pourcent) et des réactifs (quelques dizaines de pour-cent) constants. De plus, les personnes
extérieures au groupe sont aussi importantes que les inactifs, les observateurs, les réactifs
et les proactifs pour assurer la pérennité de votre communauté.

À retenir

Qui sont vos amis ?
Chaque type de participant (et même celui qui ne participe pas) est utile pour la
communauté :
• Les proactifs : ils ne sont pas très nombreux, mais ils représentent la force vive de
votre communauté.
48

• Les réactifs : ils sont dix fois plus nombreux que les proactifs et contribuent lorsque
vous les sollicitez.
• Les observateurs : ils sont encore plus nombreux ! Vous ne les voyez pas, mais ils
forment un public pour les plus actifs, peuvent relayer l’information en dehors de la
communauté et permettent de conserver un pourcentage d’actifs constant dans le
groupe. Certains deviennent plus actifs lorsque des actifs se désengagent.
• Les inactifs : vous ne les avez peut-être jamais vus, mais ils ont déjà entendu parler de
la communauté, et il est possible que certains en faisaient partie auparavant. C’est
l’occasion pour eux de redécouvrir ce que fait la communauté et ainsi devenir
observateurs.
• Ceux qui ne sont pas membres de la communauté : quelques-uns souhaiteraient
découvrir la communauté, pourraient relayer ce que vous faites et apporter plus de
visibilité à la communauté, voire la rejoindre. Ils pourront faire grossir la communauté ou,
au moins, remplacer ceux qui partent.

Au lieu de toucher une grande part des réactifs (c’est le cas des rencontres), les
discussions entre les rencontres permettent de toucher la très grande majorité des
membres de votre communauté.

Le courrier des animateurs

Pourquoi mon groupe s’essouffle ?
Question : J’ai cent cinquante personnes sur mon groupe Facebook et une vingtaine
participent aux réunions. Mais le groupe s’essouffle, le nombre de participants est en
baisse. Que se passe-t-il ?
Réponse : Vous avez un peu plus de 10 % d’inscrits qui participent aux réunions, ce qui
est tout à fait normal. Mais êtes-vous sûr de ne pas avoir coupé votre groupe en deux : les
réactifs qui suivent au jour le jour et les observateurs qui sont déconnectés de l’action ?
L’erreur classique consiste à informer le reste du groupe (dans votre cas via Facebook) que
lorsque tout est prêt. Mais les observateurs font aussi partie de votre groupe ! Si vous
souhaitez qu’ils aient une chance de s’impliquer un jour, vous devez les aider à avoir le
même niveau d’information que les actifs. Il existe souvent une rupture d’information
entre ceux qui participent aux réunions (les réactifs) et ceux qui n’y participent pas (les
observateurs). Faites en sorte que sur la discussion en continu qui intègre tout le monde
49

on puisse trouver tout ce qui se fait, mais également les doutes, les erreurs, les options
possibles, etc. Si vous ne « coconstruisez » que pendant les réunions et pas lors des
échanges entre les réunions, vous oubliez vos observateurs « invisibles ». Certains réactifs
passeront à autre chose (ce qui est normal), mais ils ne seront pas remplacés.

Exemple

Les réunions internationales et l’importance des échanges en ligne
Au tout début des années 1990, je me suis investi dans la normalisation internationale
des systèmes d’exploitations pour ordinateurs38. Nous nous réunissions deux fois par an
dans un coin du monde, pendant une semaine. Cette semaine était très active pour faire
avancer les documents et, à la fin de la semaine, nous avions un plan d’action bien rempli
à faire pour la fois suivante. Mais celui-ci était vite oublié, et lors de la réunion suivante
nous reprenions pratiquement là où nous en étions six mois plus tôt. Très peu de choses
s’accomplissaient entre les deux réunions mensuelles. C’est sans doute pour cette raison
qu’il fallait en moyenne sept ans pour établir une norme !
Quelques années plus tard, l’arrivée du web et des fournisseurs d’accès a favorisé les
échanges. Entre deux réunions, il est aujourd’hui possible de poser une question, de
demander de l’aide, de proposer une version non finalisée d’une action pour demander
l’avis des autres, etc. Avant l’internet, on travaillait pendant la réunion et on ne faisait
presque rien entre les réunions. Depuis l’internet, on travaille entre les réunions et un peu
moins pendant — ce qui permet de mieux nous connaître pour ensuite mieux échanger.
Dans un autre domaine de la standardisation, « Le Tao de l’IETF », rédigé et mis en ligne
par l’IETF, est un excellent exemple d’équilibre entre les réunions et les échanges en ligne
avec tout le groupe. Lorsque l’on découvre l’IETF, on remarque l’importance mineure
accordée aux réunions en présentiel des groupes de travail, ce qui n’est généralement pas
le cas dans la plupart des autres organisations. Toute décision prise lors d’une réunion doit
également être approuvée sur la liste de discussion du groupe de travail39.

Choisir un outil
38. Comité ISO/IEC JTC1/SC22/WG15 sur la normalisation des systèmes d’exploitation (basé sur le standard Posix de l’Institute of
Electrical and Electronics Engineers (IEEE) permettant la compatibilité à partir des systèmes Unix puis Linux).
39. Cf. Paul Hoffman (éd.), « Le Tao de l'IETF : Guide destiné aux nouveaux participants à l’Internet Engineering Task Force », disponible
http://www.ietf.org/tao-translated-fr.html.

50

À moins d’être télépathe, nous avons besoin d’outils pour communiquer entre deux
rencontres. On distingue plusieurs profils d’utilisateurs qui réagissent différemment face
aux outils technologiques :
— les technophiles ou les geeks qui se précipitent pour essayer chaque nouvel outil ;
— les réservés qui sont inquiets à l’idée de devoir adopter encore un « nouveau truc »
ou qui hésitent à le faire ;
— les luddites40 qui rejettent les outils.

Exercice individuel

Êtes-vous geek ou luddite ?
• Pouvez-vous citer un outil que vous aimez utiliser ? Cela peut être un outil très
simple, comme le téléphone, l’ordinateur, le stylo ; ou bien plus élaboré, tel qu’un réseau
social, un outil web pour votre veille ou pour échanger en visioconférence ; voire toute
autre chose.
• Pouvez-vous citer un outil que vous ne voudriez pas utiliser si je vous demandais de
l’installer ? Cela peut être un réseau social ou une application de partage (Facebook,
Twitter, Google+, LinkedIn, Viadeo, Instragram, Foursquare, Snapchat, Myspace), ou
même un réseau social dédié que j’ai développé pour vous, ou bien un autre outil web.
Vous avez répondu à ces deux questions et constatez que vous êtes un peu geek et un
peu luddite, même si vous avez tendance à être plus l’un ou plus l’autre.
• Qu’est-ce qui vous inciterait à utiliser un nouvel outil ?
Vos critères seront très certainement : simple d’utilisation, peu chronophage et
nécessaire pour participer à un projet ou à une communauté dans lesquels on a envie de
s’investir.
Si vous imposez un outil complexe : adieu les moins motivés (à savoir les peu réactifs et
surtout les observateurs). Vous allez probablement vous couper de 90 % de votre
communauté. Il faut donc adopter un outil très simple, accessible au plus grand nombre
pour continuer d’échanger entre les rencontres synchrones, et faire preuve de patience et

40. Du nom des membres du mouvement d’opposition au progrès industriel, au
machines ».

XIXe siècle,

qui s’est caractérisé par les « briseurs de

51

de pédagogie pour aider la communauté, y compris les moins motivés, à en maîtriser
l’usage.

Un outil, mais pas n’importe lequel
Il existe de nombreux services, en particulier sur internet, adaptés à ce que nous
souhaitons faire. Mais pour faciliter les échanges entre les rencontres synchrones, il vaut
mieux opter pour un outil qui doit être à la fois :
1— collectif. Il permet de discuter tous ensemble, y compris avec les observateurs qui
écoutent, mais ne parlent pas.
2— asynchrone. Il offre la possibilité d’organiser des interactions à distance avec des
personnes qui ne sont pas disponibles au même moment.
3— « push ». Il se définit comme un outil qui permet de « pousser » l’information
jusqu’à la boîte mails (ou la messagerie) de chaque participant, afin que tous, y compris
ceux qui sont peu impliqués, puissent suivre les échanges — contrairement aux outils pull
(où il s’agit de « tirer » l’information à soi) qui visent les plus réactifs.

Des outils mal adaptés pour l’échange entre les rencontres
• Le forum, un outil pull
Les groupes de discussions, tels que ceux issus du système Usenet créé en 1979,
existaient bien avant même l’arrivée du web. Aujourd’hui, il suffit d’aller sur une page
internet pour voir ce que les autres écrivent sur tel ou tel sujet. Nous sommes donc dans le
cas d’un outil « pull » où les utilisateurs doivent aller sur le forum, contrairement aux mails
qui arrivent directement dans notre boîte aux lettres électronique. Celui qui arrivera sur
votre forum (par le biais d’un moteur de recherche ou en cliquant sur un lien depuis un
autre site) oubliera très probablement d’y revenir régulièrement, sauf s’il s’y implique
fortement.
Les forums restent utiles pour les échanges en ligne, mais ils nécessitent un niveau
d’implication supérieur par rapport à un outil « push », tel que le mail. Pour avoir une
dynamique suffisante, le nombre de personnes doit être plus élevé. On considère qu’il faut
au moins trois cents inscrits sur un forum très ciblé (voire plus sur un forum plus

52

généraliste), alors qu’il suffit d’une centaine de personnes pour faire vivre une
communauté.
Il existe aussi les notifications mail : à chaque nouvelle contribution sur un forum qui
m’intéresse, je reçois un mail. Mais sachez que très peu de personnes cliquent sur un lien
dans un mail (il faut être motivé). Le mail doit contenir la contribution pour avoir plus de
chance qu’elle soit lue, et il faudrait pouvoir y répondre simplement par mail sans avoir à
passer par le forum (cette fonction est plutôt rare).
• La lettre d’information (newsletter)
La newsletter est composée d’informations généralement rédigées sous forme de
brèves. Elle permet de toucher l’ensemble de la communauté, chacun peut la lire quand il
le souhaite (asynchrone) en la recevant directement dans sa boîte aux lettres mail (push).
Mais elle ne permet pas les échanges directs entre les membres de la communauté
(collectif). Il est parfois possible de laisser des commentaires, mais les autres abonnés
doivent alors aller sur le site (pull) pour les lire. La lettre d’information est un très bon outil
pour diffuser l’information, mais pas pour les discussions entre les membres de la
communauté, entre deux rencontres.

Les outils qui répondent au cahier des charges
Il existe plusieurs outils collectifs, asynchrone (parfois synchrones) et push :
— La messagerie électronique (le mail, qui existe depuis les débuts de l’internet).
— La messagerie instantanée de Facebook. Mais comme tout le monde ne consulte pas
régulièrement les groupes et pages Facebook, elle ne peut donc pas être considérée
comme un outil « push » pour tous les utilisateurs.
— D’autres messageries instantanées, telles que Slack
— Twitter, du moins les messages qui nous sont adressés (@mon_nom) ou qui portent
sur un thème donné que nous suivons particulièrement grâce aux hashtags (#thème).
Attention, les messages twitter envoyés par ceux auxquels nous sommes abonnés sont
nombreux, et si nous ne regardons pas régulièrement notre compte twitter, ils
disparaissent des écrans radars sans que nous en ayons pris connaissance.
— Les outils orientés vers les smartphones. Ces outils limitent la taille du groupe (cinq
maximum pour WhatsApp, quinze pour Viber), d’autres sont plus orientés vers la photo et
la vidéo que la discussion (Snapchat).
53

— Les messageries d’entreprises ou réseaux sociaux internes. Ils sont utiles lorsque les
employés sont obligés de les consulter (ce qui n’est pas toujours le cas…).
Cela représente beaucoup d’outils ! Et le pire, c’est qu’ils ne sont pratiquement pas
compatibles entre eux (interopérables). L’internet est morcelé pour les outils push (ce qui
est regrettable), mais il ne l’est pas pour les outils pull car la très grande majorité des
services passent par la consultation d’une page web.

Les limites de Facebook
La messagerie instantanée de Facebook permet de créer des groupes de discussion et
de les nommer. Les outils Facebook permettant la diffusion d’information sont :
— Les pages Facebook, intégrables dans un site pour ceux qui n’ont pas Facebook, mais
limitées aux administrateurs qui sont les seuls à pouvoir y poster des messages.
— Les groupes Facebook, où tous les membres peuvent publier, mais qui ne sont pas
intégrables dans un site externe.
L’idéal serait de coupler la messagerie instantanée de Facebook avec un groupe
Facebook, mais la communauté se limite alors à ceux qui ont Facebook. Hélas, Facebook
permet de coupler sa messagerie instantanée et le groupe jusqu’à cinquante membres.
Comme nous cherchons à créer des communautés avec au minimum cent participants, la
seule solution consisterait à identifier régulièrement les nouveaux inscrits au groupe
Facebook et à les ajouter manuellement dans le groupe sur la messagerie instantanée de
Facebook, ce qui ne correspond pas à notre ambition de limiter le temps passé par les
animateurs !
En revanche, pour les petits groupes projet, souvent limités à quelques personnes, la
messagerie instantanée de Facebook est bien adaptée, à condition que les membres du
projet aient tous Facebook, et que le référent n’oublie pas d’informer régulièrement le
reste de la communauté de l’avancement du projet collectif.

Pour faire avancer les choses

Appel aux développeurs !

54

L’idéal serait que chacun puisse participer à la même discussion depuis l’outil de son
choix (et donc celui qu’il utilise le plus régulièrement). Facebook et Twitter disposent
d’interfaces de programmation (API) propriétaires et relativement fermées. On
souhaiterait que ces outils deviennent interopérables, car c’est le fondement même de
l’internet, un réseau de réseaux qui communiquent entre eux. Mais cela ne semble pas
susciter l’intérêt des propriétaires de ces outils… du moins tant qu’ils disposent d’un
nombre significatif d’utilisateurs « captifs » qu’ils peuvent monétiser pour se financer.
Je lance un défi aux développeurs : disposer d’un outil qui puisse avoir une adresse
mail, un compte Facebook et un compte Twitter, et qui permette que ce qui est envoyé
sur l’adresse mail (depuis une liste de discussion, par exemple) puisse alimenter la
messagerie instantanée associée à un groupe Facebook et génère automatiquement un
tweet avec un hashtag spécifique, pour former un échange collectif. Cela pourrait aussi se
faire depuis Facebook vers le mail et Twitter, et depuis Twitter vers le mail et Facebook. Il
s’agit du chaînon manquant pour permettre l’interopérabilité des discussions en ligne :
plus utile mais moins visible que le développement de services pull dans des pages web.

La liste de discussion
La discussion entre deux rencontres est une activité importante pour la communauté,
car elle implique les réactifs qui ne viennent pas aux réunions (ou qui en ont loupé
certaines) et les observateurs. Contrairement à la diffusion d’information, elle permet des
échanges directs entre les membres de la communauté. Pour ne pas perdre en route une
partie de la communauté (en tout cas, en perdre le moins possible), il faut envoyer ces
échanges (outils push) dans un environnement familier à chaque utilisateur. Pour ce faire
(tout au moins avec les groupes de quelques centaines de membres où le nombre de
proactifs est trop faible pour utiliser des outils pull), la solution « la moins mauvaise » est
le mail, car tout le monde dispose d’une adresse mail. Ce choix ne fait pas toujours
l’unanimité, car certains craignent d’être submergés de messages. Nous verrons dans la
partie suivante comment traiter ce point.
Le mail a d’abord été conçu pour envoyer un message à une, deux ou plusieurs
personnes. Pour un groupe, il faut que tout le monde puisse répondre naturellement à
l’ensemble des destinataires. La liste de discussion satisfait ce besoin ; elle permet aux
membres d’une même liste de discuter et d’échanger des informations par mail. Elle offre
55

à tous les membres la possibilité de s’inscrire ou d’être inscrits par l’administrateur de la
liste. Véritable discussion collective où chacun voit les messages des autres, la liste de
discussion possède une adresse mail propre. Écrire à cette liste, c’est écrire à toutes les
personnes qui y sont inscrites. La majorité des outils de liste de discussion permettent de
conserver des archives.

Exercice collectif

Testez une liste de discussion
Mettre en place une liste de discussion est très simple : vous pouvez utiliser des
services gratuits comme https://groups.google.com/, ou https://fr.groups.yahoo.com/. Il
faudra alors créer un compte Google ou Yahoo si vous n’en avez pas. Amusez-vous à
échanger entre amis pour tester l’outil. Si vous souhaitez créer une véritable communauté
avec sa liste, rendez-vous dans la partie II de ce guide qui vous aidera à le faire.

Pour participer à une liste de discussion, il faut d’abord être inscrit. C’est sans doute le
seul outil où l’inscription est indispensable41. Si l’on souhaite obliger l’utilisateur à
s’inscrire à d’autres services en plus de la liste de discussion, il faut absolument éviter de
lui demander de s’inscrire plusieurs fois. Dans ce cas, il n’y a que deux solutions : soit on
développe un site monolithique qui intègre tous les services souhaités — ce qui est
techniquement lourd et onéreux —, soit on assemble plusieurs services de façon
modulaire et on y ajoute un système d’inscription unique qui permet de s’inscrire à tous
les services en une seule fois — on parle d’identification unique Single Sign-On (SSO).

Pour en savoir plus

Liste de discussion ou liste de diffusion ?
Quelle est donc la différence fondamentale entre une liste de discussion et une liste de
diffusion ? La première permet aux membres d’une même liste de discuter et d’échanger
des informations par mail. Quant à la seconde, utilisée pour les lettres d’information, elle
permet simplement au propriétaire de la liste de diffuser des informations à tous ses
41. Contrairement à l’accès aux informations d’un site, aux réunions en ligne ou même à l’écriture de pages wiki qu’il est possible de
rendre accessible à ceux qui ne sont pas inscrits.

56

abonnés. L’échange se fait donc à sens unique, les abonnés de la liste se contentant de
jouer un rôle de récepteurs d’informations.
Source : http://les-infostrateges.com/.

Faire vivre une liste de discussion
Certains montrent des réticences à l’égard des listes de discussion. On constate deux
principaux freins. D’abord, le fait d’être contraint de lire les mails en plus de son compte
Facebook ou Twitter. Vous devez alors faire preuve de pédagogie pour que les plus
réfractaires acceptent d’utiliser le mail dans le cadre de cette communauté. Si vous utilisez
un autre outil, vous risquez d’exclure les observateurs et les moins actifs qui ne lisent pas
tous régulièrement Facebook ou Twitter ou ne vont pas penser à aller sur le forum ou sur
Slack. Ensuite, la crainte d’être submergé par les mails42. Le nombre de mails
« acceptable » que la communauté peut envoyer varie selon les membres : un par
semaine maximum pour les plus réticents ; un par jour en moyenne pour la plupart des
membres ; beaucoup de mails pour certains groupes très militants — mais nos
communautés intègrent aussi des non-militants qui sont souvent submergés par d’autres
activités.
Voici un ensemble de stratégies permettant de bien gérer votre liste de discussion :
1— Inciter les utilisateurs à faire des mails courts et uniquement lorsque cela est
nécessaire (éviter par exemple les mails du type « information bien reçue »).
2— Inciter les porteurs de projets collectifs à échanger directement entre eux en
dehors de la liste. Ils présenteront un état d’avancement synthétique de leur projet au
reste de la communauté une fois par mois, par exemple.
3— Si les échanges se concentrent sur deux personnes qui s’expriment beaucoup sur
un sujet (en s’invectivant publiquement, dans le pire des cas), il faut les inciter à le faire en
dehors de la liste ou, s’ils ne le font pas, les passer en mode « modéré » et l’annoncer sur
la liste pour être totalement transparent.
4— Mettre toute la liste en mode modéré pour accepter ou refuser les mails. Cela
nécessite un surcroît de travail, mais c’est souvent nécessaire lorsque la liste devient
grande, à partir de cinq cents membres par exemple, ou bien lorsqu’elle s’adresse à un
public très réfractaire à recevoir des mails.
42. Voir l’article « surcharge informationnelle » — que l’office québécois de la langue française nomme également « infobésité » — dans
Wikipédia : https://fr.wikipedia.org/wiki/Surcharge_informationnelle

57

5— Permettre aux utilisateurs qui le souhaitent de recevoir des « digest », c’est-à-dire
un mail qui regroupe tous les mails reçus durant une journée, une semaine, etc. Mais
lorsqu’une personne qui reçoit ces mails regroupés souhaite réagir, il faut qu’elle pense à
modifier à chaque fois l’objet du mail pour le rendre plus explicite.
6— Lorsqu’on se trouve dans une période d’activité intense, par exemple lors de la
préparation d’un événement, il est utile de préciser qu’il s’agit d’une période provisoire et
de s’arranger pour qu’elle ne dure pas plus qu’une semaine ou deux.
7— Dans tous les cas, placez le lien pour se désabonner de la liste en pied de page
(dans le bas du mail), et indiquez aux personnes qui pourraient s’inscrire qu’elles pourront
se désinscrire facilement. Cela rassure ceux qui craignent de se retrouver captifs. (À titre
personnel, je peux dire que vous n’obtiendrez pas mon adhésion à un groupe dans la
mesure où je ne peux pas m’y extraire facilement en me désinscrivant moi-même.)
Rappelez-vous que même ceux qui sont en dehors de la communauté sont vos amis ! Si
quelqu’un sort de la communauté, ce n’est pas un drame, mais s’ils sont nombreux à ne
pas oser y entrer par peur de ne pouvoir en sortir, ce serait problématique.

Le modérateur de discussion
Le rôle de modérateur de la liste de discussion consiste à rappeler les règles énoncées
ci-dessus et à les faire appliquer. Il a aussi pour fonction d’aider ceux qui ont des difficultés
à s’inscrire ou à se désinscrire, et d’accepter ou de refuser des mails. Ce rôle peut être
tenu par un des animateurs (leader, facilitateur) ou par un membre dédié à ce rôle.
Lorsque le groupe n’a pas de modérateur, les membres peuvent rappeler les règles
lorsque cela est nécessaire. Vous pouvez choisir d’avoir un ou plusieurs modérateurs, mais
pas au détriment du facilitateur, qui lui a une fonction indispensable pour le suivi des
projets.

58

On se dit quoi sur la liste ?
Nous avons vu qu’un groupe peut avoir une ou plusieurs fonctions :
1— Il permet à un ensemble de personnes de s’approprier des informations.
2— Il facilite l’entraide et la montée en compétence collective.
3— Il fait office de support pour développer des projets collectifs.
4— Enfin, pour certains groupes, il est possible d’organiser des débats avec toute la
communauté pour développer de l’intelligence collective.
Les discussions sur la liste vont refléter ces différentes fonctions. Pour faire en sorte
que les discussions se développent sans trop d’efforts (rappelez-vous que ni les
animateurs ni les membres ne disposent de beaucoup de temps), nous avons besoin de
deux choses :
• Une centaine d’inscrits au moins : il faut que le nombre de personnes réactives (au
minimum une dizaine) soit suffisant pour initier une dynamique naturelle avec ceux qui
répondent aux propositions faites sur la liste43.
• Un envoi régulier d’informations sur les projets collectifs de la communauté. C’est le
rôle du facilitateur de faire en sorte que chaque groupe projet poste des informations au
moins une fois par mois.
Au final, nous obtiendrons des messages sur la liste, de façon régulière, et des
personnes pour réagir de temps en temps. Avec ce rythme d’activité, d’autres membres
proposeront tout naturellement des compléments d’information (qu’ils sont allés chercher
ailleurs, notamment grâce à la veille) ou demanderont de l’aide. Ainsi, la liste fonctionnera
à loisir sans avoir besoin de prendre trop de temps pour la relancer.

43. Avec des outils pull, ce minimum serait porté à trois cent, voire mille inscrits.

59

—7—
L’espace de partage

À quoi ça sert ? J’y pense et puis j’oublie !
Nous avons vu que l’on pouvait organiser avec
très peu de temps supplémentaire une communauté
active. Parmi les quatre activités de la communauté,
nous en avons déjà abordé trois : la diffusion
d’information, les rencontres et la discussion entre
les rencontres. Dans les canaux d’informations, des
choses très intéressantes circulent, mais sont vite
oubliées une fois le flux passé ; lors des rencontres, il
se dit également des choses très intéressantes entre
les participants, mais elles partent vite en fumée ; dans les discussions, les informations
importantes aussi peuvent nous échapper. Dans ces conditions, comment retrouver ce qui
a été dit ou échangé, parfois depuis belle lurette ?

L’espace de partage : une machine à remonter le temps
Les trois premières activités de la communauté ont la particularité d’être structurées en
fonction du temps. Pourtant, ce qui a été dit lors d’une réunion il y a deux ans pourrait très
bien faire écho à ce qui s’est dit aujourd’hui dans la discussion, ou à une autre information
diffusée il y a une semaine.
L’espace de partage (site web interactif, tableau d’affichage, etc.) doit nous permettre
de retrouver les informations classées par thèmes et non plus en fonction du moment où
elles ont été données. Si la communauté s’est intéressée, par exemple, à la cartographie
de l’eau, nous pourrions regrouper au même endroit les choses les plus importantes dites
sur ce sujet, il y a un an, un mois ou un jour. Comme point de départ, nous pourrions
prendre une page qui permet de retrouver facilement tous ces endroits où est partagé ce
qui a trait à un thème (l’équivalent du sommaire ou de l’index dans un livre).

60

Regrouper les informations par thèmes permet à chaque participant d’avoir une vue
d’ensemble, y compris à ceux qui ont un niveau d’implication plus faible et regardent les
choses de loin. En voyant ce qui a été dit sur un sujet, quels que soient l’espace (l’activité
de la communauté concernée) et le temps (le moment où l’information a été partagée),
les contributions de chacun peuvent s’appuyer sur celles des autres pour construire, petit
à petit, une vision de plus en plus cohérente, ce qui est la base de l’intelligence
collective44.

Quel type d’informations peut-on partager ?
De nombreuses informations auraient avantage à être retrouvées facilement.
— Tout d’abord celles qui concernent les projets en cours (sans oublier les anciens
projets).
— Les informations sur la communauté elle-même, utiles aux nouveaux membres
(objectifs, charte ou règles de fonctionnement, foire aux questions, etc.), et à tous ceux
qui souhaitent en savoir plus.
— Les ressources complètes, produites « à l’extérieur », utiles à un projet particulier, à
la communauté, etc.
— Les éléments de veille rassemblés par la communauté sur un sujet particulier.
— Les débats au sein de la communauté sur un thème ou un sujet donnés, ou qui ont
trait à son fonctionnement.
On pourrait regrouper ces différentes informations en deux grands ensembles :
— Les actions en cours : projets, débats, etc.
— Les ressources : documents de base de la communauté, ressources produites par un
groupe projet, bilan d’un débat, documents de veilles, ressources externes et archives des
anciens projets.
Le premier ensemble permet de suivre ce qui se passe actuellement dans le groupe et
le second permet de trouver des informations utiles. L’intérêt de séparer les « actions en
cours » des « ressources » est de donner une indication de lecture aux personnes peu ou
pas impliquées.

44. Voir Jean-Michel Cornu, « Comment produire un document à plusieurs centaines de personnes », sur http://tinyurl.com/produire100 .

61

Qu’est-ce que l’on doit partager et avec qui ?
• Les ressources
Les ressources produites ou rassemblées par la communauté (y compris les documents
de base de la communauté) ont clairement vocation à être ouvertes au plus grand
nombre.
• Les actions en cours
Un réflexe classique consiste à les réserver aux membres du groupe. Il est vrai que ces
espaces sont moins structurés que ceux qui intègrent des ressources finalisées. Pour ceux
qui sont peu ou pas impliqués dans la communauté ou le projet, ces documents de travail
sont sans doute moins compréhensibles. Faut-il alors en limiter l’accès au groupe ?
Il est bien plus intéressant de permettre à ceux qui le souhaitent d’y accéder, en
indiquant qu’il s’agit d’un travail en cours, non finalisé. Fonctionner « à capot ouvert » est
une des meilleures façons de développer la confiance envers la communauté. Si votre
communauté est créée à l’intérieur d’une entreprise, il peut être utile de restreindre
l’accès aux informations aux seuls membres de l’entreprise. Faut-il alors restreindre l’accès
aux seuls membres du groupe ou bien peut-on l’étendre à tous les membres de
l’entreprise ?

Pour en savoir plus

Y a-t-il des informations qui ne doivent pas être ouvertes à tous ?
Au sein d’une communauté ouverte, limiter l’accès aux informations de la communauté
et de ses projets n’a pas de sens. Il y a cependant quelques rares cas où l’information doit
être restreinte.
Dans une communauté d’entrepreneurs, un projet peut amener à ce qu’un petit groupe
projet aide une entreprise. Dans ce cas, le petit groupe projet doit être bien identifié et ses
membres doivent s’engager à ne pas dévoiler des informations confidentielles données
par l’entreprise aidée. Les informations échangées, tout comme les résultats du projet, ne
doivent être partagés ni avec le reste de la communauté ni avec l’extérieur. Il s’agit d’un
« projet fermé » au sein d’une « communauté ouverte ». Parallèlement, l’ensemble des
membres de la communauté continuera à s’entraider de façon ouverte en échangeant des
informations non confidentielles.

62

Dans ce cas, le détail des échanges doit rester confidentiel, mais l’existence même du
projet ne relève pas d’une information confidentielle.
La bonne pratique serait de référencer tous les projets dans l’espace de partage : pour
chaque projet ouvert, un lien qui renvoie à son espace de travail ; et pour chaque projet
fermé, l’indication « accès réservé » avec un mot de passe pour accéder à la page. Ainsi, la
liste de tous les projets est visible et, si certains doivent rester confidentiels, alors seuls les
membres du groupe projet pourront accéder à la page concernée.

L’accès ouvert doit être la règle et l’accès réduit l’exception. Il est d’ailleurs tout à fait
possible de protéger la paternité d’un contenu tout en permettant au plus grand nombre
de le réutiliser45. Enfin, ceux qui sont en dehors de la communauté peuvent être des
candidats potentiels, à condition qu’ils aient suffisamment d’informations avant pour
savoir ce qui s’y passe.

Comment partager pour toucher le plus grand nombre ?
Nous pourrions partager les informations sur un grand tableau, dans un lieu physique
accessible à tous les membres de la communauté. Cela est valable pour une communauté
fortement liée à un lieu, par exemple un tiers-lieu tel qu’un espace de coworking ou un
fablab. Mais, pour que la solution de partage réponde à tous types de communautés,
l’espace se retrouvera donc tout naturellement sur le web.
Il existe plusieurs types d’espaces. Le blog, qui sert plutôt à faciliter la diffusion
d’information auprès d’un public le plus large possible, n’est pas adapté à cette tâche. Il
est possible d’utiliser un wiki, où chacun peut facilement contribuer, par exemple YesWiki,
un pad, tel que Etherpad ou Framapad, dans lequel chacun peut écrire, ou encore un
traitement de texte en ligne, comme Google Docs ou Zoho. Il est intéressant de mixer ces
outils selon le niveau de complexité souhaité pour chaque service, en y ajoutant une page
d’accueil pointant vers les différents espaces.

45.
Gatien
Bataille,
« Les
réseaux
qui
durent
sont
sous
licence
CC
by
SA » http://ebook.cooptic.eu/francais/wakka.php?wiki=LesReseauxQuiDurentSontSousLicenceCcBy ; Daniel Mathieu, SupAgro Florac, « Les œuvres libres »,
l’ensemble disponible sur http://ebook.coop-tic.eu/francais/wakka.php?wiki=LesOeuvresLibres.

63

La gare de triage des services du groupe
Ici, nous sommes au royaume des « outils pull », c’est-à-dire des espaces en ligne où
l’utilisateur doit venir chercher l’information. Contrairement aux mails et autres outils
push (où l’information est directement délivrée dans la boîte aux lettres de l’utilisateur), le
site web nécessite une démarche de la part de l’utilisateur pour aller chercher
l’information. Mais il complète parfaitement les autres activités de la communauté
(diffusion d’information, rencontres, discussions entre les rencontres) en permettant de
retrouver facilement n’importe quelle information, indépendamment du moment où elle a
été proposée.
Que doit-on trouver dans l’espace de partage de la communauté ? À peu près tout, y
compris les archives de ce qui a été échangé au cours des différentes activités :
• Les informations de base de la communauté : la présentation du groupe,
éventuellement la liste et la présentation des membres, si nécessaire les partenaires de la
communauté.
• La diffusion d’information : les informations du groupe diffusées via un blog, une page
Facebook, etc.
• Un calendrier des rencontres à venir et un lien vers les comptes rendus ou les
rapports d’étonnement des précédentes rencontres.
• Les discussions entre les rencontres : les archives des discussions et une page pour
s’inscrire et se désinscrire à la discussion (ou à l’ensemble des services si l’on a pu unifier
l’inscription).
• Le suivi des projets ouverts collectifs : une ou plusieurs pages de travail par projet
pour partager les informations en cours.
• Les ressources publiques proposées par la communauté : des guides et autres
documents produits par la communauté ou par un groupe projet, des éléments de veille
utiles et des ressources externes utiles.
Ces ressources externes peuvent être intégrées facilement au sein d’un même site, soit
en créant des liens depuis une page d’accueil unique qui nous offre ainsi une véritable
gare de triage, soit en intégrant directement certains outils dans des pages du site : on
utilisera alors des techniques dites « widgets » ou « iframes » (voir encadré ci-dessous).
64

Pour en savoir plus

Intégrer des services au sein d’un même site : l’exemple de Coop-group
Pour les espaces de partage des communautés de l’écosystème Coop-group, nous
avons choisi d’intégrer chaque page dans un wiki dédié au groupe, par exemple le groupe
Interlangues (http://coop-group.org/interlangues/), mais il est tout à fait possible d’utiliser
votre propre site en intégrant les différents services utiles à la communauté dans un
ensemble de pages. L’approche proposée ici tient compte des différentes remarques que
nous avons faites sur l’espace de partage et sur les autres activités de la communauté. Les
sites sont structurés autour de cinq pages. Elles sont toutes accessibles depuis un menu.
1. La page d’accueil
Elle permet d’accéder directement au maximum d’informations. Elle comprend deux
colonnes. La colonne principale présente :
— une description du groupe (un paragraphe) et ses partenaires ;
— le calendrier des rencontres (avec un bouton pour ajouter facilement une nouvelle
rencontre et un lien vers les rencontres précédentes) ;
— une partie dédiée aux « actions en cours » qui propose un lien vers une page de
travail pour chaque projet de la communauté (avec un bouton pour ajouter ou modifier un
projet) ;
— une rubrique proposant des « ressources » présentées de manière compacte (liste et
sous-listes avec, si besoin, plusieurs liens par ligne pour que l’ensemble tienne sur une
dizaine ou vingtaine de lignes), et facilement accessible. On y retrouve également un
bouton pour ajouter ou modifier des ressources.
Une deuxième colonne permet d’afficher le flux d’information — généralement une
page Facebook intégrée grâce à un code, au sein même de la page d’accueil.
2. La page « rencontres »
On y retrouve les prochaines dates de rencontres et un lien vers les anciennes
rencontres, comme dans la page d’accueil. Si nous avons choisi d’ajouter cette page, c’est
pour affecter aux membres un espace de rencontres. Cette page pointe vers un chat
(échanges synchrones sous forme de texte), mais elle prendra toute son ampleur avec la
65

mise en place d’un « salon permanent » qui permet d’échanger de façon synchrone toutes
sortes de supports (texte, audio et vidéo).
3. La page « discussions en ligne »
Cette page pointe vers les archives des discussions en ligne, généralement les archives
de la liste de discussion mail.
4. La page « inscription/désinscription »
Cette page permet de s’inscrire (et de se désinscrire) à différents services, tout au
moins à l’outil de discussion en ligne. Elle permet aussi de demander l’envoi d’un mot de
passe oublié. Idéalement, elle pourrait offrir la possibilité de remplir son profil et de
s’inscrire en une seule fois à plusieurs services en ligne utilisés par le groupe. Mais cela
nécessite de développer une authentification unique (Single Sign-On) pour accéder à des
services issus de fournisseurs différents. Nous avons fait le choix d’imposer l’inscription
uniquement sur l’outil de discussion en ligne et de configurer tous les autres services afin
qu’ils ne nécessitent aucune inscription46.
5. La page « administration »
Dans notre exemple (celui de la communauté Coop-group) la page administration est
accessible dans le menu déroulant, depuis l’icône « roue dentée » située en haut à droite
de la page d’accueil. Tout en restant accessible, cette page est moins visible que les autres.
Elle permet au facilitateur d’accéder notamment au tableau de suivi des projets et à la
page de description du groupe qui permet de constituer une base de données avec les
informations de chaque communauté.

Un espace de partage accessible et esthétique
Il est plus facile de développer un site esthétique et cohérent que d’avoir une
communauté active et productive. Aussi, on commet souvent l’erreur de donner la priorité
à la technique plutôt qu’à la dynamique humaine. Dans notre cas, nous souhaitons que les
porteurs de projets mettent à jour eux-mêmes leurs pages, que l’organisateur d’une
46. Mais cela peut générer des craintes : certains utilisateurs pourraient saccager le site. Cependant, la grande majorité des utilisateurs
sont constructifs et peuvent aider à la mise à jour du site à condition que cela soit très facile pour eux.

66

rencontre puisse l’ajouter lui-même dans le calendrier, etc. — les personnes actives dans
le groupe ne peuvent pas se souvenir de tous les outils spécifiques et de tous les mots de
passe !
Nous avons fait le choix d’articuler les espaces de partage de la communauté autour de
trois niveaux de pages :
1— Les pages qui n’ont pas à être modifiées. Elles intègrent automatiquement des
services ou des informations. Ces pages peuvent être complexes à développer, mais elles
seront définitives.
2— Les espaces listant les projets en cours, les ressources ou les dates des événements.
Ils seront mis à jour par le facilitateur ou les référents projet. Nous avons fait le choix
d’une page wiki simple à utiliser et facilement intégrable au sein de la page d’accueil.
L’utilisateur doit juste mettre à jour la page avec une syntaxe simple ou, dans le cas du
calendrier, remplir un formulaire.
3— Les pages de travail qui doivent être mises à jour régulièrement par tous, par
exemple, pour les projets. Nous avons choisi ici le traitement de texte en ligne47. La page a
un aspect qui est moins conforme avec le reste du site, mais la mise à jour est on ne peut
plus simple : il suffit d’ajouter du texte et de mettre en forme dans un traitement de texte
en ligne. Quiconque est peu familier avec l’informatique ou avec l’environnement web de
la communauté peut facilement mettre à jour une page de travail.

Comment tuer votre groupe à coup sûr…
Une façon absolument infaillible de tuer son groupe est de se focaliser sur le
développement d’un site monolithique dans l’espoir que les futurs membres se
précipiteront vers cet outil supplémentaire — en plus de tous ceux qu’ils doivent déjà
maîtriser. Mais il est tellement plus facile d’obtenir des financements pour un
développement web que pour l’animation de communauté. J’ai rencontré de nombreux
cas où le remplacement de l’animation par le développement d’un outil (généralement un

47

On pourrait penser qu’il serait préférable d’utiliser des pads plutôt qu’un traitement de texte en
ligne pour les pages de travail, mais malheureusement les pads conviennent mal à l’internet dans
certains pays, en particulier en Afrique : ils nécessitent de nombreuses connexions pour mettre à
jour la page en temps réel qui peuvent “planter” l’accès internet. Pourtant les pads sont souvent des
outils plus libres que les traitements de textes en ligne complets. Espérons que de nouveaux
développements autour des pads permettront de résoudre ce problème.

67

nouveau réseau social, alors que les utilisateurs de l’internet en sont déjà saturés) a
entraîné la mort de communautés actives.

L’attrapeur : le gardien des trésors communs
Les membres du groupe se réunissent (à la fois par petits groupes projet et tous
ensemble) et échangent en continu. Le rôle de l’attrapeur48 est de conserver tous les
trésors échangés ou produits lors de ses activités. Il prend toutes les informations utiles,
les classe et les met à disposition sur le lieu de partage accessible à tous. Il transforme les
flux d’information dans le temps en informations stockées par thématique, que les
informations soient issues des réunions ou des échanges en continu. Le fait de présenter
de façon synthétique des informations de ce qui se dit permet même de créer des débats
complexes en intelligence collective avec des grands groupes49. Beaucoup de groupes
fonctionnent sans attrapeurs, chacun mettant à jour le site. Mais pour ceux qui affectent
une ou plusieurs personnes à cette tâche, le nombre de trésors qui s’envolent est bien
plus réduit ! On peut aussi mutualiser la fonction d’attrapeur en affectant un groupe de
volontaires qui se répartissent le travail en alternance, chaque semaine. Le travail de suivi
du facilitateur assure qu’il y a toujours un attrapeur.
Capter les informations utiles qui circulent dans le groupe sans outils spécifiques peut
prendre jusqu’à cinq heures par semaine. L’application en ligne assembl.org permet de
réduire ce temps à une heure ou deux50.

48. Également appelé « greffier » ou, dans les pays anglo-saxons, « harvester » (moissonneur).
49 Voir “Comment produire à plusieurs centaines de personnes” in “Faire ensemble ! Manuel à l’usage des animateurs de réseaux
collaboratifs”, Coop-TIC 2013 : http://tinyurl.com/produire100
50. Voir le site http://citizen99.org : les débats qui y sont hébergés fonctionnent sur Assembl.

68

—8—
L’écosystème de groupes,
et plus si affinités…

À quoi ça sert ?
L’avantage des communautés est de ne pas être
seul, pour pouvoir mutualiser les efforts et
s’entraider. Elles permettent à des projets ouverts
de disposer d’un premier public, en bénéficiant des
membres de la communauté pour apporter des
idées, une aide ponctuelle. Certains membres
pourront même choisir de s’investir dans le projet,
permettant ainsi un remplacement naturel de ceux
qui le quittent.
De même, un leader de groupe qui serait seul à tout faire s’essoufflerait. Je propose de
mettre en place un noyau d’animation avec parfois plusieurs leaders (légitimes, mais
souvent très occupés), des porteurs de projets (très actifs sur leur propre projet) et
surtout un ou quelques facilitateurs disposant d’une heure par semaine pour assurer le
suivi et faciliter le lien entre les projets et la communauté. D’autres tâches, telles que la
diffusion de l’information, l’organisation des rencontres, la modération de la discussion
entre les rencontres et la contribution pour les classer dans l’espace de partage, peuvent
être prises en charge par les leaders, les porteurs de projets, les facilitateurs ou d’autres
membres de la communauté.
Grâce à cette organisation, les membres, les projets et les animateurs ne sont plus
seuls. Mais comment faire en sorte que la communauté elle-même ne soit pas isolée ?
C’est l’objectif de « l’écosystème de groupes » qui va permettre de faciliter les échanges et
l’entraide entre plusieurs communautés.

69

Le groupe noyau
Que les groupes à mettre en réseau existent déjà ou bien qu’il s’agisse de créer un
nouvel écosystème, il peut être utile de créer un groupe particulier — le groupe noyau —
qui regroupe notamment les facilitateurs, certains animateurs et d’autres membres. Cette
première initiative va permettre aux animateurs d’échanger et de s’entraider sur les
difficultés qu’ils peuvent rencontrer et de monter en compétence collectivement. Ce
groupe noyau peut devenir une « pépinière » pour les nouveaux groupes qui démarrent
en tant que simples projets.

Exemple

CYou1 : de la liste d’adresses à un écosytème
Dans les faits, les très grandes communautés (entre dix mille et cent mille membres)
sont généralement de simples carnets d’adresses composés de personnes qui se sont
inscrites et qui reçoivent principalement des lettres d’informations. À cette échelle, il y a
malheureusement peu d’échanges entre les membres. En effet, lorsque la communauté
est trop grande, la plupart des membres se sentent « noyés » et le pourcentage de
proactifs et réactifs chute fortement. Il est donc bien plus intéressant de structurer ce très
grand nombre de personnes (entre dix mille et cent mille) en un écosystème de groupes
collaboratifs (composés de cent à mille personnes) qui échangent entre eux.
Le centre de culture scientifique, technique et industrielle Cap Sciences, situé à
Bordeaux, a mis en place deux initiatives :
— Le 127°, un lieu qui permet aux visiteurs de se rencontrer et de développer des
projets : il comprend, entre autres, un fablab pour la fabrication numérique et un living lab
pour le développement de nouveaux services.
— La communauté CYou1, premier groupe de CYou qui devrait se transformer
progressivement en écosystèmes de groupes collaboratifs autour des sciences.
Obtenir une centaine de membres pour démarrer CYou1 fut assez simple : une annonce
dans la lettre d’information de CYou a permis de toucher beaucoup de monde. Quelques
pour-cent suffirent pour obtenir le nombre requis de personnes pour que la croissance
s’établisse naturellement. Deux ans plus tard, le groupe comprend aujourd’hui près de
quatre cents membres. Il a mis en place un canal d’information (une page Facebook), des
70

rencontres bimensuelles, des discussions entre les rencontres (une liste de discussion) et
un espace de partage en ligne (http://coop-group.org/cyou1), mais aussi le 127° pour un
espace de partage en présentiel. Les rencontres ont permis de faire émerger des projets
collectifs ouverts et un premier facilitateur se charge de les suivre. Début 2016, le groupe
comptabilise cinq projets en développement dont certains sont sur le point de devenir des
communautés à part entière.

Le groupe noyau semble être le lieu naturel pour la gouvernance de l’écosystème. Mais
l’écosystème est une simple mise en réseau de communautés existantes qui n’a pas
toujours besoin d’une gouvernance forte et unifiée. Pourtant, nous aimons organiser les
choses le plus souvent en commençant par le haut (approche ascendante ou « topdown »).
De quelle gouvernance avons-nous réellement besoin pour l’écosystème de groupe ?
Chaque groupe doit rester le plus autonome possible et le plus important est ce qui se
passe en bas (approche ascendante, « bottom-up ») : les projets, les initiatives des
individus. Les communautés et les écosystèmes sont le moyen de passer à l’échelle plutôt
qu’une fin en soi51. Aller trop loin dans la structuration de l’écosystème risque de faire
perdre aux groupes leur identité et « d’ostraciser » les actifs.
Certains groupes peuvent faire partie de plusieurs écosystèmes52. Dans le cadre de
l’écosystème Coop-group, qui rassemble des groupes territoriaux et thématiques, la
gouvernance tient en trois lignes. Elle décrit les conditions que doit respecter un groupe
pour être référencé dans l’écosystème :
1— Votre groupe doit être ouvert à tous ceux qui le souhaitent sans adhésion ni autre
restriction.
2— Votre groupe doit s’engager à développer le pouvoir d’agir de ses membres.
3— Votre groupe doit partager publiquement ses productions (par exemple, grâce à
des licences de type Creative Commons-by-sa53).
Si ces règles devaient un jour poser problème à un groupe, alors le groupe noyau serait
le bon endroit pour en débattre.

Edouard Glissant parle d’archipélisation. Dans le monde de l’internet on parle aussi de réseau de réseaux.
Par exemple les groupes Cyou1, Astronomie sensorielle et Imagine Life bénéficient de deux écosystèmes : Cyou et coop-group. Plusieurs
des membres du groupe de soutien et de la communauté des animateurs de groupes de l’écosystème coop-group, sont très actifs dans d’autres
écosystèmes et favorisent des ponts : Colibris, Réseaux de la transition...
53 https://creativecommons.org/licenses/by-sa/3.0/fr/
51
52

71

Exemple

Le syndrome des fédérations d’associations
J’ai travaillé dans les années 1990 avec plusieurs fédérations d’associations nationales.
Il s’agissait, pour l’une d’entre elles, de développer des groupes thématiques entre les
associations nationales membres de la fédération. Puis, une autre fois, il a fallu mettre en
réseau ces fédérations européennes. À chaque fois, le même problème s’est posé : les
personnes actives au niveau national avaient peu de temps pour faire vivre les échanges
au niveau de la fédération. À l’inverse, ceux qui étaient moins performants ou actifs dans
leur association avaient beaucoup de temps pour s’engager au niveau fédéral. Leur
association nationale existait toujours, mais plus rien ne s’y passait. Lorsqu’il a fallu mettre
en réseau des fédérations d’associations nationales, j’ai pu également découvrir que des
fédérations complètes n’étaient plus représentées que par une seule personne : les
associations nationales avaient souvent disparu depuis longtemps ou étaient totalement
inactives, mais un président était toujours inscrit en tant que représentant de l’ensemble
des associations nationales et il avait beaucoup de temps pour participer aux rencontres
« à haut niveau » entre fédérations.
Cet exemple montre qu’il faut envisager les niveaux dits « supérieurs » comme un
simple moyen de faire connaître et mettre en réseau les initiatives développées par les
porteurs de projets qui, eux, sont les véritables créateurs de valeur.

Faciliter les liens entre les groupes
On peut aussi développer naturellement des liens entre les groupes d’un écosystème.
Par exemple, dans le cas de Coop-group, 12 % des personnes sont inscrites au moins dans
deux communautés. Ces liens naturels ne requièrent pas de « rôles officiels »
supplémentaires (que l’on nomme aussi « officiers de liaison » dans les organismes
internationaux). Les échanges se font entre des personnes appartenant à plusieurs
groupes : si l’une d’entre elles remarque une initiative intéressante dans un groupe A,
lorsque la discussion du groupe B traite d’un sujet similaire, elle y contribuera en
présentant l’idée repérée dans le groupe A.
Le fait d’avoir dans un même écosystème des groupes thématiques (qui travaillent sur
un même thème depuis plusieurs endroits) et des groupes territoriaux (qui travaillent sur
72

plusieurs thèmes sur un même territoire) crée un matriçage qui aide encore plus aux
échanges entre les groupes. Les groupes territoriaux et les groupes thématiques, quel que
soit le pays, ont aussi beaucoup d’avantages à échanger entre eux.

Exemple

InnovAfrica, une rencontre pour favoriser les liens entre les groupes
Depuis 2009, les rencontres InnovAfrica54 permettent aux innovateurs d’Afrique et du
reste du monde d’échanger entre eux. Cela a permis de développer progressivement des
groupes territoriaux, dans plusieurs pays d’Afrique francophone (Bénin, Burkina Faso,
Burundi, Côte d’Ivoire, Gabon, Mali, Mauritanie, Niger, Sénégal, Togo).
De nombreuses thématiques ont été abordées lors des forums InnovAfrica (fablabs,
tiers-lieux, santé, énergie, cartographie, applications mobiles, etc.). Les échanges y sont
nombreux et les collaborations fructueuses. Prenons pour exemple le cas de Tidiane Ball,
un médecin malien qui avait développé un site pour trouver les lieux de santé les plus
proches (http://malisante.org/). Il a rencontré au forum InnovAfrica 2012, à Dakar, au
Sénégal, un ensemble de développeurs qui créent des passerelles entre le web et des
serveurs téléphoniques vocaux ou SMS (Emerginov). Quelque temps plus tard est née une
nouvelle application qui permet à toute personne qui dispose d’un simple téléphone de
trouver les lieux de santé les plus proches. Les exemples de ce type sont nombreux55,
grâce à ces rencontres en présentiel, mais aussi parce que plusieurs participants de
chaque communauté participent à d’autres.

Mettre en place un espace qui permet de découvrir tous les groupes qui font partie
d’un écosystème peut se faire facilement en rassemblant sur une même page la liste des
groupes avec un bref descriptif, un lien vers le site du groupe et un lien vers la page
d’inscription.
Dans le cas de Coop-group, grâce à l’outil YesWiki, initié par l’association OutilsRéseaux, qui rassemble à la fois des wikis et une base de données, on a pu créer très
simplement une base de données des groupes de l’écosystème.

54
55

http://innovafrica.org/
Voir par exemple : http://innovafrica.org/fr/forum/lome-2014/resultats/

73

Pour en savoir plus

Une base de données plutôt qu’une plateforme unique
Pour l’écosystème Coop-group, nous avons développé une base de données qui permet
de créer automatiquement une page (afin de mettre à disposition des informations sur
chaque groupe), et génère automatiquement l’espace de partage de la communauté sous
la forme d’un wiki pour ceux qui le souhaitent avec, par défaut, un certain nombre
d’éléments préconfigurés grâce à la base de données (tous étant modifiables). D’autres
groupes disposent de leur propre site pour l’espace de travail ou intègrent leurs propres
outils dans le wiki, mais tous indiquent dans la base où se trouvent chacun des services de
la communauté. Pour ce faire, nous avons recueilli, pour chaque groupe :
• Quatre informations indispensables :
— le nom de la communauté ;
— une description courte en une ligne ;
— le type de groupe : thématique, territorial, ou encore groupe support ;
— un nom court utilisé pour les adresses web et mail (sans espace).
• Des informations complémentaires sur le groupe :
— une description plus complète en un ou deux paragraphes ;
— des mots clés pour le groupe ;
— une liste de partenaires éventuels du groupe (avec un logo et un lien) ;
— un pays ou une région (pour les groupes territoriaux), ainsi que son positionnement
sur une carte ;
— le nombre de membres (qui n’est pas automatisé pour l’instant) ;
— un bandeau (image de 1920 x 160 pixels) ;
— le niveau d’activité du groupe (en préparation, actif ou archivé pour les groupes
arrêtés).
• Des liens vers les différents services du groupe :
— la page d’accueil du groupe, qui peut intégrer plusieurs des services ci-dessous ;
— la page d’information (sur Facebook, blog ou Twitter) ;
— la page des rencontres (avec un calendrier et un espace de rencontre en ligne) ;
— la page pour les discussions en ligne entre les rencontres (le plus souvent les archives
de la liste de discussion mail) ;

74

— la page des actions et projets en cours (qui mène à une page de travail pour chaque
projet) ;
— la page des ressources (pour les liens vers les contenus plus finalisés qui peuvent
aussi être utiles aux non-membres) ;
— une page pointant vers une liste de projets stimulants (nous disposons d’un
catalogue de projets en ligne) ;
— la page d’inscription et de désinscription (parfois, l’inscription n’est nécessaire que
pour la liste de discussion, d’autres fois elle peut servir pour plusieurs services) ;
— la liste des membres ;
— la page administration (elle pointe, par exemple, vers la fiche de description du
groupe et vers le document de suivi des projets) ;
— la page de suivi des projets et des actions en cours pour les facilitateurs.
Les mots clés associés au groupe permettent d’utiliser la même base de données pour
plusieurs écosystèmes de groupes. Il suffit, par exemple, d’ajouter le mot clé « cyou » dans
les groupes de cet écosystème pour pouvoir créer très facilement une page regroupant
tous les groupes de l’écosystème CYou. Cette page peut être intégrée dans un site dédié
grâce à la technique des « iframes » ou des « widgets ».

Un groupe pour soutenir les facilitateurs
Il existe une troisième piste utile pour avoir un écosystème de groupes qui échangent
et s’entraident : il faut quelques personnes pour aider les animateurs qui le souhaitent à
organiser et faire vivre leur groupe.
La plupart des personnes qui montent des communautés ne sont pas des
professionnels dans ce domaine. Elles sont intéressées avant tout par une thématique
(santé, énergie, éducation…) ou un territoire (généralement là où elles habitent). Bien sûr,
les animateurs peuvent utiliser ce livre — c’est même un des buts de celui-ci… — et avoir
de l’aide grâce au groupe Anim-fr, qui rassemble d’autres animateurs de groupe (il est
présenté dans la partie suivante), mais l’animation de communauté est un vaste nouveau
domaine de connaissances. Même après avoir été formé, il peut être utile de se sentir
accompagné dans des moments importants de la vie du groupe.

75

Un petit groupe de bénévoles s’est mis en place dans l’écosystème Coop-group appelé
les « helpers ». Ses membres connaissent les méthodologies présentées dans ce livre et,
pour la plupart, ont suivi une formation à la coopération, le plus souvent Animacoop56.
Le rôle de ce petit groupe de soutien est d’aider les animateurs à mettre en place ou à
réorganiser leur groupe afin de faciliter son fonctionnement tout en y passant le moins de
temps possible57), mais également, une fois cela fait, d’aider les facilitateurs dans leur
travail de suivi de la communauté.
Pour cela, une fois le groupe organisé, les membres du groupe de soutien aux
facilitateurs suivent ensuite régulièrement cinq indicateurs d’activité des communautés
qui le souhaitent :
1— mise à jour régulière du document de suivi des projets et actions du groupe par les
facilitateurs ;
2— organisation régulière de rencontres (en ligne ou en présentiel) ;
3— diffusion régulière d’informations ;
4— activité normale de la liste de discussion (ni trop ni trop peu) ;
5— mise à jour de l’espace de partage.
Le fait que ces cinq activités existent ne garantit pas que la communauté fonctionne
sans problèmes, mais si elles ont lieu et qu’un problème apparaît, le facilitateur et les
membres du groupe s’en rendront compte. Ils pourront alors résoudre cette difficulté par
eux-mêmes, en posant des questions sur la liste Anim-fr ou bien en demandant
directement de l’aide au groupe de soutien ou à d’autres personnes compétentes. Par
contre, si la communauté ne se réunit pas régulièrement ou si les porteurs de projets ne
sont pas relancés régulièrement pour savoir où ils en sont et pour les inciter à
communiquer avec le reste de la communauté, alors « la mayonnaise peut retomber » et
la communauté peut très bien ne plus être active sans que personne s’en rende compte à
temps.
Le groupe de soutien est donc là, à la fois, pour accompagner les groupes qui
souhaitent démarrer ou se réorganiser, mais aussi pour détecter les difficultés qui ne sont
pas immédiatement visibles et alerter le facilitateur ou le groupe. Dans l’introduction,
nous avons vu la notion « d’aveuglement paradigmatique » (la jeune femme et la vieille
femme, ou encore le gorille que l’on ne voit pas…). Ce qui est difficile à détecter (sans des
56 http://animacoop.net/
57. Voir la partie II : « Mettre en place ou réorganiser une communauté pas à pas ».

76

indicateurs et des vérifications régulières) ce sont les activités manquantes du groupe,
surtout lorsqu’on se focalise — ce qui est normal — sur les activités qui fonctionnent ! Le
groupe de soutien peut très bien avoir sa propre communauté ou bien être intégré au
groupe noyau avec les facilitateurs des différentes communautés.

Exemple

Comment meurt une activité
Dans une communauté en ligne thématique très internationale, un des membres a
proposé de se retrouver tous les mois pour une réunion en ligne qu’il organisait. Ces
rencontres marchaient très bien et permettaient de nombreux échanges de savoir-faire
entre les participants. L’organisateur, bien que très actif et très sollicité par ailleurs,
trouvait le temps, une fois par mois, de lancer un sondage pour trouver une date.
Un jour, la date prévue n’a pas été possible pour une raison probablement toute bête
que tout le monde a oubliée depuis. Pris par de nombreuses autres activités,
l’organisateur a oublié de relancer un nouveau sondage et ces rencontres à distance se
sont arrêtées, malgré tout leur intérêt…
L’action du facilitateur est, justement, au sein du groupe, de relancer le porteur d’une
action pour que celle-ci ne s’arrête que si l’on en a fait le choix volontaire. Mais que se
passe-t-il si le facilitateur lui-même, pour une raison quelconque, interrompt son suivi
régulier et, pris par d’autres choses, oublie de le reprendre ? L’action du groupe de soutien
au sein de l’écosystème est justement de relancer les facilitateurs pour qu’ils continuent
leur suivi tant qu’ils n’ont pas fait le choix de s’arrêter et de passer la main...

La mise en réseau des écosystèmes de groupes :
Anim-fr58 & Kaleidos-coop59
Les projets collectifs (quelques personnes) se rassemblent dans une communauté
(typiquement entre cent et mille membres) pour leur bénéfice mutuel. Des communautés
échangent entre elles et s’entraident au sein d’un écosystème (environ entre dix mille et
cent mille personnes touchées). Mais peut-on aller plus loin dans le passage à l’échelle
avec une mise en réseau d’écosystèmes de groupes ?

58. Anim-fr a été initié au sein de l’écosystème Coop-group (http://coop-group.org/anim-fr/).
59. Kaleidos-coop a été initié au sein de l’association Outils-Réseaux (http://kaleidos-coop.org/).

77

Tout comme pour les communautés et les écosystèmes, il ne s’agit pas d’imposer des
normes aux écosystèmes ni de prendre une partie de leur identité, mais simplement de les
aider à s’entraider et à échanger tout en faisant en sorte que les bonnes idées puissent
circuler et que des mutualisations puissent aider chacun (construire une approche
ascendante plutôt que descendante). Un réseau d’écosystèmes doit donc être encore
moins structuré qu’un écosystème de communautés qui le sera moins qu’une
communauté de projets collectifs…
Dans ce que nous avons pu tester jusqu’à présent, une mise en réseau de plusieurs
écosystèmes émerge alors même qu’il n’a pas de nom ! Elle s’appuie sur deux simples
communautés de support qui permettent des échanges et de l’entraide entre les
communautés des différents écosystèmes simplement parce que des membres de ces
écosystèmes en font partie. Ces deux communautés ont été pensées au départ au sein
d’un écosystème, mais de façon naturelle, parce que la mutualisation fonctionne d’autant
mieux que l’on est nombreux, d’autres groupes en dehors de l’écosystème et d’autres
écosystèmes les ont rejointes.
La première « communauté support » est Anim-fr. Elle rassemble les acteurs
francophones impliqués dans l’animation de projets et de communautés collaboratifs. Elle
permet non seulement à un animateur de poser des questions pour être aidé par les
autres, mais aussi d’échanger la veille et les savoir-faire afin de monter en compétence
collectivement. Ce groupe a aussi permis de tester de nouvelles approches, par exemple
des débats en intelligence collective60. Dans le cadre de l’écosystème Coop-group, les
facilitateurs sont tous inscrits sur Anim-fr. Quant aux autres animateurs de communauté
(leaders, porteurs de projets…), ils se sont vu proposer, pour ceux qui le souhaitent, d’y
participer également.
La deuxième « communauté support » est Kaleidos-coop. Elle rassemble tous ceux qui
développent des services en ligne en biens communs pour les communautés. Cette
communauté s’est ouverte plus récemment à tous les groupes et écosystèmes qui le
souhaitent et devrait permettre de mutualiser de nombreux services au bénéfice de
toutes les communautés.

60 Voir le projet européen Catalyst, des outils pour développer l’intelligence collective : http://coop-group.org/animfr/wakka.php?wiki=ProJetCataLyst

78

Que faut-il retenir de cette première partie ?
Pour vous aider à mémoriser les concepts qui sont présentés dans cette première
partie et qui vont être mis en œuvre dans les deux parties suivantes, je vous propose un
contenu supplémentaire que vous pouvez récupérer en ligne. Vous y trouverez une
synthèse de ce que nous avons vu et un questionnaire pour vous aider à identifier les
points que vous souhaiteriez revoir : https://frama.link/anim1h-synthese1. Vous pouvez
également remplir le questionnaire en ligne sur https://frama.link/anim1h-Q1.
Prenez le temps de remplir le questionnaire et également de faire votre rapport
d’étonnement. Ce sont 20 minutes qui vous permettront de tirer tout le bénéfice de ce
que vous avez déjà lu.
Nous avons déjà vu au chapitre 1 une première carte pour avoir une vue d’ensemble de
ce qu’il faut prendre en compte pour son groupe. Je vous en propose une autre qui
présente les choses un peu différemment pour vous aider à vous approprier tous les
concepts présentés ici.

79

Partie II

Mettre en place
ou réorganiser
une communauté
pas à pas

80

Avant de commencer

Vous savez désormais comment faciliter l’animation
d’un groupe avec peu de temps en associant deux types
de groupes (équipes projet et grandes communautés) et
en développant quatre types d’activités dans la
communauté

(diffusion

d’information,

rencontres,

discussions entre les rencontres et espace de partage). Il
est alors temps de mettre cela en pratique.
Si vous partez de zéro, ne vous inquiétez pas. Vous
serez guidé, étape par étape, pour constituer un premier noyau de personnes, mettre en
place les moyens d’animation et inviter ensuite de nouveaux participants pour développer
une communauté active avec peu de temps d’animation. Respecter l’identité et
l’autonomie du groupe doit rester la priorité.
C’est parti ! Comme dans les livres « dont vous êtes le(s) héros », allez directement
dans la partie qui vous concerne :
1— Si vous partez d’une communauté.
2— Si vous partez d’un projet.
3— Si vous partez de zéro.

Vous partez d’une communauté
• Si vous partez d’une communauté, c’est-à-dire au moins une douzaine de personnes
qui échangent, je vous propose de répondre à l’exercice suivant pour savoir ce qui
apparaît ou non dans la communauté. Vous pourrez refaire ensuite le même test
collectivement, avec les autres participants. Ce premier questionnaire vous permettra de
vous concentrer sur ce que vous pourriez ajouter pour que votre communauté fonctionne
avec peu de temps, en tenant compte de ce qui est déjà en place.

81

Questionnaire

Vous partez d’une communauté
Inscrire le nom de la communauté :
Questionnaire : répondre par oui ou par non

Étape 1 : le noyau de départ
Est-ce que plusieurs personnes participent à l’animation de la communauté ?
Est-ce que l’une d’entre elles au moins assure un suivi des actions en cours ?
Avez-vous un annuaire à jour avec les mails et téléphones des plus actifs ?
Prenez-vous des notes collectivement lorsque vous vous rencontrez ?
Avez-vous identifié quelques projets concrets au sein de la communauté ?
Étape 2 : les moyens d’animation
• Disposez-vous d’un flux d’information facilement accessible ?
• Quelqu’un approvisionne-t-il ce flux ou fait en sorte qu’il soit approvisionné ?
• Est-ce que vous vous réunissez régulièrement (en présentiel et/ou en ligne) ?
• Y a-t-il quelqu’un en charge d’organiser les prochaines rencontres (date, lieu, etc.) ?
L’animation peut être réalisée par d’autres
• Avez-vous un outil en ligne pour discuter entre les rencontres (outil push) ?
• Y a-t-il une personne qui modère la discussion et aide les membres à s’inscrire ou se
désinscrire ?
• Disposez-vous d’un espace de partage en ligne pour retrouver les informations
classées par thème, quelle que soit leur date (pour les projets, les actions, les ressources) ?
• Y a-t-il une personne (ou plusieurs) pour « attraper » ce qui se dit dans les rencontres,
les discussions et les informations, pour les classer dans l’espace de partage ?
• Disposez-vous d’un site pour accéder facilement aux différents services ?
• Disposez-vous d’un tableau de suivi des projets, des rencontres, etc. ?
Étape 3 : inviter et lancer le groupe
• Avez-vous au moins cent membres inscrits dans la communauté (même inactifs) ?
• Les porteurs de projets présentent-ils régulièrement à la communauté leur avancée ?

Vous partez d’un projet
82

• Si vous partez d’un projet (avec un objectif concret), la méthode proposée ici ne
concerne pas la gestion de votre projet lui-même, mais la manière dont il pourra
bénéficier de tous les avantages d’une communauté.
Généralement, la première intention est de vouloir créer une communauté pour son
unique projet. Le développement d’une communauté se mutualise très bien avec plusieurs
autres projets. Si les groupes projet avec lesquels vous souhaitez constituer une
communauté sont complémentaires, vous verrez votre communauté croître très vite. En
croisant vos réseaux, vous pourrez même développer les échanges et l’entraide entre les
projets.

Questionnaire :

Vous avez un projet, alors trouvez d’autres projets qui pourront s’associer avec vous
Inscrire le nom de votre projet :

• Trouvez au moins deux projets avec lesquels vous souhaiteriez constituer une
communauté. (Nous verrons ensuite, lors de la première étape, comment le proposer aux
acteurs des projets.) Choisissez :
— des projets ayant des thématiques différentes, sur le même territoire que le vôtre ;
— ou bien des projets ayant la même thématique, mais développés sur un autre
territoire.
Ne mélangez pas les deux, car une communauté a pour point commun un territoire ou
un thème.

Vous partez de zéro

83

• Si vous partez de zéro, la première question que vous devez vous poser est : quel est
le thème ou le territoire qui va rassembler les membres de la future communauté ?
Une communauté rassemble différentes thématiques sur un territoire donné (un
quartier, un village jusqu’à un pays parfois), dans ce cas elle est territoriale ; ou bien des
personnes issues de n’importe quel territoire, généralement partageant la même langue,
mais réunies autour d’une même thématique, dans ce cas elle est thématique.
Il est possible de limiter la communauté, à la fois, à un territoire et à une thématique,
mais il est nécessaire de veiller à ne pas trop limiter le nombre de participants potentiels,
car il va vous falloir au moins une centaine de membres. Même si vous commencez avec
seulement quelques personnes, rien n’empêche d’étendre progressivement votre
communauté.

Exemple

La naissance des Incroyables Comestibles
Les Incroyables Comestibles (lesincroyablescomestibles.fr) rassemblent des personnes
qui mettent à disposition, gratuitement, des fruits et légumes que les gens cultivent euxmêmes dans de petits potagers répartis dans les villes et les campagnes. Ce mouvement
(Incredible Edible, en anglais) a été lancé, en 2008, par deux habitantes de Todmorden,
petite ville du nord de l’Angleterre, située dans le comté du Yorkshire de l’Ouest. Elles ont
organisé une première rencontre dans un bar pour présenter leur idée. Elles pensaient ne
réunir que cinq personnes, mais elles ont été rapidement débordées lors de la première
rencontre qui a rassemblé finalement 60 personnes ! Petit à petit, la communauté s’est
étendue pour parvenir à plus de 700 groupes un peu partout dans le monde. Je
recommande cette courte interview des deux instigatrices (« Les Incroyables Comestibles
à Todmorden », disponible sur YouTube), issue de la bande-annonce de l’excellent film
documentaire français Demain, de Cyril Dion et Mélanie Laurent, sorti en 2015
(http://demain-lefilm.com/).

La bonne démarche est de choisir un thème ou un territoire, de commencer à petite
échelle, puis d’étendre progressivement à d’autres territoires sur le même thème, ou bien
d’étendre à d’autres thèmes sur le même territoire. Mais avant de chercher des membres
pour former la communauté, choisissez le thème ou le territoire grâce au questionnaire
suivant.
84

Questionnaire

De quoi avez-vous envie ?
• Quel territoire ou quelle thématique sert de support à votre communauté ?

• Existe-t-il des communautés sur les mêmes thèmes ou territoires ? Lesquelles ?

— Si oui, comment vous démarquer d’elles, pour être complémentaire ?

• Des associations ou des organisations travaillent déjà sur ce même thème ou
territoire. Lesquelles ?

• Pouvez-vous les contacter pour leur proposer de se joindre à la communauté que
vous êtes sur le point de créer ?

Notez qu’une communauté n’est pas concurrente avec les organisations ou
associations, elle permet de les mettre en réseau, rassemblant aussi bien des particuliers
que des organismes, et n’impose rien à ses membres.

Les chapitres présents dans la partie II de ce guide sont répartis en quatre étapes :
• Première étape : Le noyau de départ.
• Deuxième étape : La rencontre pour organiser ou réorganiser la communauté.
• Troisième étape : Les moyens d’animation.
• Quatrième étape : Inviter et lancer le groupe.

85

—1—
Première étape
Le noyau de départ

A retenir

Équipe projet, communauté ou groupe, de quoi parle-t-on ?
Lorsque ce qui est présenté concerne indifféremment l’équipe projet (un petit groupe
de moins de douze membres) ou la communauté (qui a vocation à devenir plus grande et
accueillir plusieurs projets), nous parlerons de « groupe ».

Identification du noyau
Pour

mettre

en

place

ou

réorganiser

une

communauté, il faut avant toute chose ne pas être seul !
Cela est important pour que tout ne tourne pas autour
de vous. La mise en place ou la réorganisation de la
communauté est en elle-même un projet, il vaut donc
mieux, à ce stade, éviter d’être plus d’une douzaine, sauf
si la communauté existe déjà et peut s’investir tout
entière sur cet objectif. Cherchez à rassembler entre une et deux demi-douzaines de
personnes.
• Les participants de ce noyau doivent-ils venir de l’intérieur du groupe ou de
l’extérieur ? Cherchez-les parmi votre entourage, si vous partez de zéro ; à l’intérieur de la
communauté, si elle existe déjà ; ou bien à l’intérieur et à l’extérieur de l’équipe, si vous
partez d’un projet.
Attention, si un groupe existe déjà, parlez de votre projet aux membres avant d’en
recruter d’autres, issus de l’extérieur, afin que les participants d’origine ne se sentent pas
exclus. Pour ce premier noyau, il vaut mieux se couper de profils intéressants extérieurs au

86

groupe, qui pourront rejoindre la communauté ultérieurement, plutôt que de perdre des
membres du groupe existant.
• Quels profils dans le noyau de départ ? Si certains souhaitent absolument en faire
partie, mais ne semblent pas avoir le profil idéal, vous pouvez vous permettre d’avoir des
membres inactifs ou peu efficaces. En acceptant de les intégrer, vous pouvez avoir de
bonnes surprises ! Le principal est qu’il y ait au moins deux ou trois personnes
suffisamment actives ou pour lancer la dynamique.
Idéalement, un bon noyau de départ réunit trois profils :
1— Les leaders (un ou plusieurs), qui connaissent bien le sujet et apportent une
légitimité à la communauté. Il leur suffit d’intervenir de temps en temps à la demande du
facilitateur pour apporter des idées sur un sujet particulier, lancer les invitations ou
arbitrer un conflit.
2— Les porteurs de projets (un ou plusieurs), qui développeront des projets et
consacreront probablement plus de temps à leur projet qu’à la communauté. Le fait
d’avoir inscrit leur projet dans la communauté leur procurera beaucoup de soutien et, en
retour, ils devront informer régulièrement, à la demande du facilitateur, le reste de la
communauté de leurs avancées.
3— Les facilitateurs (un ou plusieurs), assez rigoureux et capables d’avoir une action
proactive, une fois par semaine, durant une heure. Ils sont, de préférence, intéressés par
le sujet, mais n’ont pas besoin d’être experts, reconnus dans leur domaine ni même très à
l’aise avec les échanges collectifs, car ils auront principalement des échanges
interpersonnels avec les leaders, les porteurs de projets et les éventuels autres rôles
d’animation. Ils devront surtout assurer le suivi une heure par semaine et, s’ils ne peuvent
pas le faire ou ne souhaitent plus s’engager, prévenir le groupe en amont afin de trouver
un remplaçant. Vous n’aurez pas toujours quelqu’un prêt à accepter cet engagement
avant que le noyau soit opérationnel, mais cela ne pose pas de problème. Ce qui importe,
dans ce premier noyau, c’est d’avoir des personnes qui ont une dynamique favorable au
lancement de la communauté.
Une même personne peut assumer plusieurs de ces rôles, mais il est utile que des
personnes différentes assument ces rôles, dès que possible, afin que la communauté ne
soit pas centrée sur un seul animateur. Si vous ne devez avoir qu’une seule personne avec
87

vous, choisissez en priorité une personne disponible et ayant le goût du contact pour
devenir le facilitateur. Vous trouverez ensuite des leaders et des porteurs de projets parmi
les membres de la communauté.

Les arguments pour inviter à rejoindre le noyau de départ
Comment proposer aux membres d’un groupe existant de participer au noyau

S’il existe déjà une communauté ou au moins un projet collectif, vous devez proposer
en priorité à l’ensemble des membres de participer à la réorganisation. Si le groupe est
actuellement très hiérarchisé, vous pouvez dans un premier temps n’impliquer que le
groupe de coordination existant pour respecter son fonctionnement. Proposez cependant,
sans l’imposer, d’inclure dans le noyau au moins une ou quelques autres personnes du
groupe pour faciliter l’ouverture.
Vous pouvez faire la proposition collectivement lors d’une rencontre du groupe, ou
avec l’outil de discussion en ligne, s’il en existe un, ou, à défaut, en envoyant un mail à
l’ensemble des membres actuels. En parler auparavant à quelques personnes permet
d’avoir leur soutien lorsque vous ferez la proposition à l’ensemble du groupe. Après la
proposition collective, contactez individuellement les quelques personnes que vous
souhaitez tout particulièrement avoir dans votre noyau. Elles se sentiront plus concernées
grâce à cet échange individuel et vous aurez ainsi plus de chance qu’elles vous donnent
leur accord.
Comment proposer à de nouvelles personnes de rejoindre le groupe

L’idéal est de les contacter directement et individuellement. Il est plus facile de
convaincre à travers un échange direct. Proposez une rencontre physique ou bien
privilégiez le téléphone, et n’utilisez le mail ou la messagerie d’un réseau social qu’en
dernier ressort.
Ceux à qui vous vous adressez manquent, très probablement, de temps pour s’investir
dans cette communauté, comme dans toutes celles auxquelles ils participent déjà, y
compris la famille et les amis. Ils perçoivent, probablement, l’intérêt d’avoir une
communauté pour échanger, mutualiser, voire gagner du temps, mais comment participer
ou même contribuer à l’animation d’une communauté sans y passer trop de temps ? Vous
pouvez développer un argumentaire en quatre points :

88

1— Vous êtes débordé, sans pouvoir faire tout ce que vous souhaitez (activités, travail,
famille, etc.). Pourtant vous souhaiteriez développer plus d’échanges, mutualiser certaines
tâches pour gagner du temps, obtenir plus de résultats concrets et de visibilité dans vos
projets…
2— Depuis une quinzaine d’années, se sont développées de nouvelles méthodes
simples à mettre en œuvre, qui s’appuient sur des trouvailles de certains (des logiciels
libres sont développés par des milliers de personnes), mais aussi les progrès récents dans
la compréhension du cerveau, la psychologie ou encore l‘anthropologie. De nouvelles
approches permettent aujourd’hui d’organiser et de faire vivre de grandes communautés
de plusieurs centaines de personnes avec seulement une heure par semaine de suivi (et
même moins pour la plupart des animateurs). Elles s’appuient sur la synergie entre de
petits groupes projet et une communauté nombreuse, ainsi que sur quatre activités pour
faire vivre naturellement la communauté avec peu de temps d’animation. De plus en plus
de groupes l’utilisent un peu partout dans le monde : CYou, communauté de passionnés
de sciences ; Léman Innovation Numérique (LIN), large communauté pluridisciplinaire qui
rassemble des acteurs de l’innovation ouverte ; IP Sénégal, groupe des innovateurs du
Sénégal ; Interlangues, pour promouvoir le dialogue interculturel et le multilinguisme.
3— La mise en place d’une nouvelle communauté où la réorganisation d’une
communauté existante se fait en trois étapes61 :
• une rencontre avec un petit groupe de départ ;
• la mise en place de quatre activités qui favorisent ensemble, naturellement,
l’implication des membres et les échanges entre les membres ;
• l’invitation de nouveaux membres pour être suffisamment nombreux afin qu’il y ait
toujours assez de personnes qui contribuent.
4— Demandez-leur ensuite s’ils acceptent de participer à une première rencontre (en
présentiel ou en ligne, selon l’éloignement des membres du réseau). S’ils choisissent plus
tard de participer à l’organisation de la communauté, cela se fera pendant une durée
limitée, libre à eux ensuite de continuer à s’investir ou non dans la communauté.

Préparez la première rencontre du noyau

61. En réalité, il s’agit de quatre étapes, mais vous avez déjà passé la première si vous partez d’une communauté existante ou si vous avez
identifié votre noyau de départ.

89

La première rencontre se fait de préférence en présentiel, mais, si vous êtes éloignés
(par exemple avec des personnes de plusieurs pays), commencez par une réunion en ligne.
Cette première rencontre est une bonne occasion de tester différents outils pour les
réunions, à commencer par un sondage pour trouver une date qui convient.

À faire

Trouver la date et l’heure pour la première rencontre du noyau
Pour faciliter le sondage de dates, vous pouvez demander en amont aux plus occupés
quelles sont leurs dates d’indisponibilité dans les prochaines semaines et les créneaux
horaires où ils pourraient se rendre disponibles (en journée, en soirée, à partir de quelle
heure, le week-end ?).
1— Allez sur https://framadate.org/ (ou sur http://doodle.com s’il y a des décalages
horaires entre les participants).
2— Sur Framadate, allez sur « Créer un sondage spécial date » (ou sur Doodle,
« Planifiez un événement »). Puis, tapez un titre, par exemple « Première rencontre pour
organiser la communauté », éventuellement une description et, surtout, votre nom et
adresse mail. Cliquez sur « Aller à l’étape 2 » (ou sur « Continuer ») ;
3— Choisissez au moins trois ou quatre dates, pas toutes dans la même semaine —
certains peuvent avoir des empêchements sur une semaine entière. Choisissez pour
chacune de ces dates au moins deux horaires différents pour prendre en compte les
contraintes de chacun, et essayez de ne pas dépasser une dizaine de choix en tout. Cliquez
ensuite sur « Continuer ».
4— La page suivante récapitule vos différents choix de date. Choisissez « Créer le
sondage ».
5— Vous arrivez alors sur la page d’administration de votre sondage. Entrez votre
prénom et vos disponibilités en bas de page et cliquez sur « Enregistrer ».
6— Il ne vous reste plus qu’à récupérer le « lien public du sondage » et à l’envoyer aux
membres du noyau, en leur demandant de voter avant une date limite que vous pouvez
fixer entre trois jours et une semaine.
7— Quand ils cliqueront sur ce lien, les membres du noyau arriveront sur une page du
même type que la vôtre, sur laquelle ils pourront ajouter, à leur tour, leur prénom (ou leur
90

nom complet) et qualifier les créneaux horaires proposés en cliquant sur « oui », « si
nécessaire » ou « non ».

Exemple de mail d’invitation
Objet : trouver une date pour la rencontre de la communauté XXX
Bonjour Brigitte, Marie, Paul et Pierre [lorsque l’on n’est pas trop nombreux, c’est mieux de citer chacun
pour qu’il se sente plus concerné],
Comme nous en avons parlé précédemment, je vous propose que nous nous rencontrions
pour mettre en place la communauté autour de [Thème ou territoire] [formulation
alternative : “... pour organiser la communauté XXX afin qu’elle puisse se développer tout en demandant le
minimum de temps d’animation”]. Pour cela, indiquez les dates et heures qui vous seraient
possibles, possibles si nécessaires ou impossibles en allant sur le lien suivant :
https://framadate.org/XxXxXxXxXxXxXx [copiez ici le lien du sondage]
Pouvez vous répondre avant le [date dans 3 à 7 jours] afin que nous puissions fixer
ensemble la date et l’heure qui conviennent le mieux à tous ?
Bien amicalement [ou “cordialement” ou “amitiés” ou toute autre formule qui vous est habituelle…]
[votre prénom]

Par la suite, lors des rencontres, vous inviterez l’ensemble de la communauté. Si
quelqu’un ne peut pas participer, il pourra probablement venir aux rencontres suivantes.
Mais, pour cette première rencontre en petit comité, vous souhaitez que tous les
membres du noyau puissent participer. Recommencez, si nécessaire, un nouveau sondage
avec d’autres dates, en ayant pris soin de consulter préalablement les indisponibilités de
ceux qui sont les plus occupés.
Une fois la date fixée, il vous reste à trouver le lieu et à envoyer l’invitation en y
ajoutant un ordre du jour. Gardez toujours à l’esprit, en rédigeant vos mails, que même les
plus impliqués de votre communauté sont occupés par beaucoup d’autres choses dans
leur profession, leurs loisirs, leur famille. N’hésitez pas à rappeler le contexte, le but de la
communauté ou certaines informations utiles, tout en restant concis. C’est tout un art !

À faire

Le mail d’invitation

91

Objet : Rencontre pour la mise en place (ou la réorganisation) de la communauté 
Bonjour Brigitte, Marie, Paul et Pierre [lorsqu’on n’est pas nombreux, il est préférable
de citer chaque personne pour les impliquer davantage],
Notre rencontre « pour mettre en place la communauté autour de  » ou « pour organiser la communauté  afin qu’elle
puisse se développer tout en demandant le minimum de temps d’animation » aura lieu le
.
La rencontre durera environ deux heures [ce qui est une bonne durée pour une réunion
en présentiel. Il est préférable d’indiquer la durée ou l’heure de fin].
Lors de cette rencontre, nous aborderons ensemble les points suivants :
1— Tour de table et prise de notes collectives.
2— Organiser la communauté pour augmenter l’activité et réduire le temps
d’animation.
3— Organisation de la communauté.
a) Description du groupe.
b) Règles de fonctionnement.
c) Identification des premiers projets.
d) Identification d’un facilitateur.
4— Ouverture et entraide avec d’autres communautés.
a) Participation ou non de la communauté à l’écosystème Coop-group.
b) Participation à la communauté d’animateurs de groupes Anim-fr.
5— Plan d’action et prochaines étapes.
Venez avec votre ordinateur, nous testerons ensemble la prise de notes collective [s’il y
a un accès à l’internet dans le lieu de la rencontre].
Bien amicalement [« cordialement », « amitiés » ou toute autre formule qui vous sied],


92

Pour la réunion, préparez les documents qui vous aideront : un pad prérempli, une
présentation, une affichette indiquant les codes d’accès au réseau wifi, l’adresse du pad,
etc.

93

—2—
Deuxième étape
La rencontre pour organiser la communauté

Mettre en place une communauté
Exercice collectif

Entrainez-vous, jouez !
Pour vous sentir plus à l’aise avant de lancer la
rencontre pour organiser votre communauté,
jouez à mettre en place une communauté. Cela
vous donnera une première expérience qui vous
sera très utile pour maîtriser la méthode et vous
concentrer sur le fond. Proposez ce jeu aux
personnes qui constituent le noyau de départ ou à
quelques membres de votre famille et à des amis.
Je propose de commencer avec les communautés
suivantes :
— une communauté thématique : la passion des tomates ;
— une communauté territoriale : les chauffards de la région.
Prévoyez deux heures, comme pour une véritable rencontre d’organisation de
communauté. Ajoutez à cela le temps nécessaire pour rédiger quelques mails pour
finaliser ensemble les points que vous n’aurez pas eu le temps de traiter.

La rencontre va se dérouler en cinq grandes étapes :
1— Démarrage : tour de table et prise de notes collectives (quinze minutes).
2— Présentation : « Comment organiser la communauté pour augmenter l’activité et
réduire le temps d’animation » (quinze minutes).
94

3— La partie principale : organiser la communauté.
a) Description du groupe.
b) Règles de fonctionnement.
c) Identification des premiers projets.
d) Identification d’un facilitateur.
4— Ouverture et entraide avec d’autres communautés.
a) Participation ou non de la communauté à l’écosystème Coop-group.
b) Participation de certains à la communauté Anim-fr d’animateurs de groupes.
5— Conclusion de la rencontre : plan d’action et prochaines étapes (quinze minutes).
Si vous n’avez pas fini de faire tous les choix à la fin de cette rencontre, vous pourrez
continuer d’échanger en ligne et, si nécessaire, prévoir une deuxième rencontre.

Démarrage de la rencontre
Cette rencontre est l’occasion de tester la prise de notes. Si vous n’avez pas accès à
l’internet, choisissez une personne qui prendra les notes et les partagera en ligne, via un
pad, juste après la réunion.

À faire

Mettre en place un espace de notes collectif
Pour mettre en place un pad :
1— Allez sur https://framapad.org.
2— Choisissez un nom pour votre communauté, suivi de la date de la rencontre sous la
forme année, mois, jour (par exemple : lapassiondestomates20161025).
3— Choisissez une durée suffisante pour avoir le temps de recopier les notes sur votre
site. Si vous n’avez pas encore de site, choisissez exceptionnellement six mois pour avoir le
temps ensuite de sauvegarder vos notes à leur place définitive.
4— Cliquez sur « Créer un pad ».
5— Supprimez le texte d’explication affiché par défaut après en avoir pris connaissance.

95

Vous pouvez ensuite placer certaines informations sur le pad avant la réunion pour
faciliter le travail62.

La rencontre peut commencer par un tour de table. L’objectif est de faire en sorte que
chacun s’exprime une première fois pour faciliter sa participation par la suite.
Selon des relations qui existent entre les participants (se connaissent-ils déjà ou non ?),
vous pouvez demander à chacun :
— Son prénom et trois mots clés qui permettent de tracer sa personnalité ou son état
d’esprit actuel. Cette technique de présentation est utilisée dans les barcamps63.
— Son prénom et comment se sent-il actuellement (technique de la météo64).
— Son prénom et ce qu’il attend de la communauté, en une phrase.
Vous pouvez commencer par vous exprimer vous-même pour laisser le temps aux
participants de réfléchir à ce qu’ils vont dire et fournir un modèle de réponse courte. Si
vous ne connaissez pas tous les participants, notez sur une feuille de papier le prénom du
locuteur, selon le plan de la salle et l’emplacement de chacun. Cela permet d’interpeller
ou de donner la parole sans être très physionomiste.
Incitez ensuite chacun à inscrire sur le pad (ou sur une feuille de papier) son nom, son
mail, ses coordonnées téléphoniques et éventuellement les autres moyens de contact
(Facebook, Twitter, Slack, Skype, Snapchat). Ces données seront cruciales pour pouvoir
contacter chaque participant.
62. Attention, les pads perturbent les connexions internet et, dans certains pays, en particulier en Afrique subsaharienne, ils fonctionnent
mal. Dans ce cas, vous pouvez utiliser le traitement de texte en ligne Google Docs, (https://drive.google.com/) il vous faudra alors un compte
Gmail. Vous pouvez également utiliser un service équivalent. Les liens étant bien plus long sur Google Drive que sur un pad, il peut être utile
d’utiliser un raccourciceur d’URL tel que https://frama.link/
63 https://fr.wikipedia.org/wiki/BarCamp#Les_Barcamps_en_pratique
64 http://www.ithaquecoaching.com/articles/meteo-interieure-mots-emotions-7323.html

96

Comment organiser notre communauté ?
Il s’agit d’une présentation brève, de dix à quinze minutes maximum. Pour construire
votre discours, je vous conseille de présenter quatre aspects qui portent sur la manière
d’apprendre et d’assimiler, selon la structure MERE conçue par David Jay65 :
• Motivation. Quelle est la principale difficulté rencontrée pour animer une
communauté de façon pérenne, et quelle serait la situation idéale si l’on n’était pas
confronté à ces limites.
• Explication. Certaines communautés sont très actives tout en prenant un temps très
raisonnable d’animation. Des méthodes permettent aujourd’hui de reproduire ce résultat.
Indiquez-en le principe : synergies entre petits groupes actifs et grande communauté ;
quatre activités pour faire vivre la communauté « naturellement » (cf. partie I).
• Recette. Fournir les étapes pour y arriver : rencontre du noyau, mise en place des
activités et élargissement de la communauté.
• Exercice. Proposez de suivre ensemble cette méthode sur la communauté choisie.
Si vous êtes satisfait de votre présentation et qu’elle fonctionne bien avec votre noyau
de départ, n’hésitez pas à la partager sur votre site et avec d’autres communautés (par
exemple sur Anim-fr).

Description de votre communauté
Si vous n’avez pas encore défini votre communauté, voici
neuf points qui vous permettront de la décrire ensemble :
• Type de groupe : thématique ou territorial. Si vous avez du
mal à choisir, comment imaginez-vous votre développement
dans le futur ? Ajoutez de nouvelles thématiques en se
focalisant sur un territoire ou, au contraire, en accueillant de
nouveaux territoires sur la même thématique.
• Mots clés : entre trois et dix mots, décrire votre thématique, votre territoire, vos
centres d’intérêt.

65. Voir la vidéo de la structure MERE, développée par David Jay, sur https://youtu.be/pRe06wcim2k?t=53m2s. Voir aussi les travaux du
théoricien de l’éducation David Kolb, notamment le modèle « Experiential Learning ».

97

• Description en un paragraphe : que fait la communauté ou qu’a-t-elle l’intention de
faire ? Qu’est-ce qui vous rassemble ?
• Description courte en une phrase : présentation de votre communauté.
• Nom du groupe : le plus explicite possible sur le thème ou le territoire concerné.
• Nom court pour les URL et les adresses mail : nom sous une forme raccourcie ou
éventuellement un acronyme, sans espaces ni caractères particuliers (à l’exception du tiret
et du souligné).
• Partenaires : la communauté n’ayant pas de structure propre, cette partie présente
les associations, sociétés et autres organisations qui peuvent lui apporter certains moyens,
tels que locaux, visibilité, hébergement financier, lorsque nécessaire, etc. Cette
information est facultative et permet simplement de rendre visibles quelques structures
autour de la communauté. Vous pourrez y ajouter d’autres organisations au fur et à
mesure, mais inutile de mettre toutes les organisations qui sont membres de la
communauté ni d’en faire un enjeu de pouvoir...
• Nombre de participants actuels : ce chiffre va évoluer, mais il est bon que les
membres sachent régulièrement combien ils sont.
• Adresse web de la page d’accueil (si elle existe) de la communauté.
Vous avez défini ce qui vous rassemble et vous avez les moyens de le communiquer aux
autres. Nous pouvons d’ores et déjà définir quelques règles de fonctionnement. Là aussi,
évitez de céder à la tentation de passer de nombreuses réunions à définir des chartes ou
des règlements intérieurs. Comme avec les outils, on a tendance à s’abriter derrière des
documents pompeux que plus personne ne lira par la suite. Il est bien plus utile d’avoir
trois règles courtes que vous pourrez rappeler souvent, par exemple en les plaçant en bas
des mails de la liste de discussion.
Le fait de définir préalablement et collectivement des règles leur donnera de la
légitimité. Il sera plus facile de proposer à un membre de s’en tenir aux règles du groupe
que de lui demander de suivre de nouvelles règles.

Pour en savoir plus

98

Trois

règles

efficaces

pour

le

fonctionnement

des

groupes66 :

Bienveillance et bientraitance ; écoute apprenante ; partage sincère
La bienveillance est une règle simple, fondamentale. Elle permet d’accueillir les
nouveaux contributeurs et d’accepter d’écouter les idées qui diffèrent des nôtres. Nous
avons appris à juger rapidement, et cela nous amène à rejeter beaucoup d’idées. Pourtant,
c’est le croisement des points de vue qui permet de progresser, bien plus que le rapport
de force ! La bientraitance est une autre facette importante. On peut blesser quelqu’un
sans malveillance, par exemple à travers de malheureux propos teintés d’humour.
L’écoute apprenante ne consiste pas seulement à laisser parler l’autre, mais à chercher
réellement ce qu’il peut nous apporter, même si nous éprouvons un sentiment de
frustration lorsque notre interlocuteur émet un avis différent. Cela permet de sortir du
dogmatisme et des arguments d’autorité. Personne n’a toutes les solutions et nous avons
tous à apprendre !
Le partage sincère offre un troisième aspect qui facilite les échanges dans le groupe.
Nous allons avoir à partager des informations. Plus nous le ferons, plus la communauté
s’enrichira. Rappelez-vous la loi de Metcalfe : « L’utilité d’un réseau est proportionnelle au
carré du nombre de ses utilisateurs. » Mais cela n’est vrai que si les membres du réseau
échangent entre eux, sinon l’utilité se limitera à la somme des utilisateurs ou, pire encore,
elle sera réduite à l’apport de celui qui parle le plus fort.

Vous devez ensuite identifier les premiers projets. L’idéal est d’en avoir au moins deux
et, si possible, ne pas dépasser cinq projets pour faciliter le travail du facilitateur au
départ. Il peut s’agir de nouveaux projets. Dans ce cas, il est préférable que chaque projet
intéresse deux ou trois des membres du noyau pour que le projet soit collectif dès le
départ. Ce peut aussi être des projets déjà existants, portés par une personne ou par l’une
des structures qui participent au noyau de départ. Cela facilite le démarrage. Il ne s’agit
pas pour la personne ou la structure qui ont initié le projet de perdre son identité, mais
plutôt de lui donner plus d’ampleur en accueillant de nouvelles personnes et en profitant
de ce qu’apporte la communauté.
Pour chaque projet, notez son nom, une petite phrase qui le décrit et le nom de ceux
qui sont prêts à s’y investir. Les porteurs de projets peuvent choisir un référent qui sera

66. Ces points ont été formulés respectivement par Stéphane Langlois, Thomas Wolf et Laurent Marseault.

99

contacté régulièrement par le facilitateur pour faire le point et lui proposer de partager
l’avancement avec le reste de la communauté. Vous pouvez éventuellement ajouter
l’adresse d’un site, s’il existe, où seront partagées les informations sur le projet.
Il vous reste enfin à identifier le ou les facilitateurs. Voici les engagements que doit
respecter le facilitateur :
— Le facilitateur s’engage à aider la communauté (et ses projets collectifs) à
communiquer. Il doit le faire chaque semaine et cela nécessite une heure de son temps67.
• S’il ne peut pas assurer cette heure, durant une semaine, il s’engage alors à
envoyer un mail à la communauté pour lui signifier qu’il n’est pas disponible, mais que,
sans attendre la semaine suivante, les porteurs de projets signaleront où ils en sont.
•S’il ne peut pas assurer cette tâche plusieurs semaines de suite ou même
définitivement, le facilitateur s’engage à prévenir la communauté. Il peut proposer un
remplaçant temporaire ou permanent, ou d’autres participants peuvent se proposer.
— Pendant cette heure hebdomadaire, le facilitateur va68 :
1— Contacter les référents projet n’ayant pas communiqué sur l’avancement de leur
projet depuis un mois afin de faire le point et leur proposer d’envoyer un message à la
communauté (idéalement, chaque référent projet devrait communiquer avec la
communauté au moins une fois par mois).
2— Vérifier qu’il y a eu au moins un message dans la semaine sur chaque projet ou, si
nécessaire, envoyer lui-même un message avec les informations des projets.
3— Vérifier qu’une rencontre de la communauté est bien prévue prochainement, en
ligne ou en présentiel, ou relancer l’organisateur de rencontres, ou encore envoyer un
sondage de date.
4— Vérifier que l’agenda, le flux d’information et éventuellement les pages projet sont
mis à jour régulièrement, ou relancer l’attrapeur, le blogueur, le gestionnaire de
communauté, etc. Parfois, le temps qu’un membre accepte l’un de ces rôles, le facilitateur
peut les assumer en publiant un article au moins une fois par mois.

Ouverture et entraide avec d’autres communautés
67 Pas besoin de faire plus d’une heure pour ce qui est du rôle du facilitateur, sauf si le facilitateur souhaite également assurer un autre
rôle tel que porteur de projet ou tout simplement contribuer à la vie de la communauté (mails, rencontres) suivant le temps qu’il est
disposé à fournir en plus.
68 Cette partie sera détaillée dans la troisième partie “la vie du groupe”

100

Avant de mettre en place les outils, puis d’inviter de nouveaux participants, il reste
deux choix à faire sur les liens entre la communauté et l’extérieur.
• Le premier choix concerne la participation de la communauté à un ou plusieurs
écosystèmes pour ne pas rester isolée. L’écosystème peut apporter une identité et une
légitimité fortes ou, au contraire, permettre au groupe de conserver sa propre identité en
assurant une simple mise en réseau de communautés. Il est possible de participer à
plusieurs écosystèmes pour bénéficier d’encore plus d’échanges.

Pour en savoir plus

Participer à l’écosystème Coop-group
L’écosystème Coop-group.org est une mise en réseau de communautés qui partagent
des valeurs communes d’ouverture tout en respectant l’identité de chacune. Pour
participer à Coop-group, votre communauté doit s’engager sur trois conditions69 :
— elle doit être ouverte à tous ceux qui le souhaitent sans adhésion ni autre
restriction70 ;
— elle doit s’engager à développer le pouvoir d’agir de ses membres71 ;
— elle doit partager publiquement ses productions (par exemple, grâce à des licences
de distribution et de réutilisation de type Creative Commons-by-sa72).
Il est possible d’identifier, de voir la présentation et de s’inscrire (ou se désinscrire)
facilement à une ou plusieurs communautés. Coop-group dispose d’une page générale
(http://coop-group.org/) qui présente les communautés par thème, carte territoriale,
mots clés, etc. L’écosystème s’appuie sur une base de données qui contient les
informations indiquées plus haut (« Description de votre communauté »). Il est même
possible de créer des écosystèmes plus spécifiques rassemblant un sous-ensemble de
communautés (c’est le cas de l’écosystème CYou sur les sciences et technologies). Pour les
communautés qui le souhaitent, Coop-group propose aussi plusieurs services gratuits : un
accompagnement pour la mise en place et pour le suivi de la communauté ; des outils qui

69 Voir “soutien aux groupes existants ou en formation” : http://coop-group.org/wakka.php?wiki=Reseaux
70 Comme nous l’avons vu, une communauté peut très bien s’appuyer sur une association distincte qui en assure le “secrétariat” (pour ses
démarches, ses financements, etc.). Mais la participation à la communauté n’a pas besoin d’être conditionnée à l’adhésion à l’association qui
peut ainsi rester petite et simple à gérer.
71. Voir Ivan Illich, « La convivialité » (version originale « Tools for Conviviality », 1973), coll. « Points », Seuil, 2014https://fr.wikipedia.org/wiki/Outil_convivial.
72. Voir Gatien Bataille, « Les réseaux qui durent sont sous licence », CC-BY-SA, disponible sur http://ebook.cooptic.eu/francais/wakka.php?wiki=LesReseauxQuiDurentSontSousLicenceCcBy.

101

peuvent être utilisés en complément de ceux de la communauté (liste de discussion,
espace de partage, rencontres en ligne).

• Le deuxième choix a trait à la participation des animateurs qui le souhaitent à une
communauté d’animateurs pour faciliter l’échange, l’entraide et la montée en
compétence collective. Il est tout à fait possible d’être simplement observateur ou même
inactif dans cette communauté d’animateurs, de même que vous aurez des observateurs
et des inactifs dans votre propre communauté !
La communauté Anim-fr rassemble actuellement plus de quatre cents animateurs
francophones de communautés, de projets collectifs et même d’écosystèmes collaboratifs.
Anim-fr facilite l’échange entre animateurs, indépendamment des écosystèmes auxquels
ils appartiennent : il suffit d’aller sur http://coop-group.org/anim-fr/. On y trouve, par
exemple, certains animateurs de Coop-group, du mouvement Colibris (http://colibrislemouvement.org/), du réseau Transition ou encore de diverses organisations et
entreprises.
Parmi les acteurs du noyau de départ, identifiez tous ceux qui souhaitent être inscrits
dans une communauté d’animateurs. Après la réunion, indiquez-les dans le plan d’action à
la personne qui sera en charge de les inscrire (au facilitateur, par exemple).

Pour faire avancer les choses

Aider les animateurs dans différentes langues
Coop-group s’est étendu vers de nouveaux territoires et de nouveaux thèmes73. Mais
pour développer l’écosystème, nous devrons aussi l’étendre à de nouveaux domaines
linguistiques. Une des façons les plus simples de le faire est de créer de nouvelles
communautés dans de nouvelles langues, avec des noyaux de départ constitués de
plusieurs personnes dont certaines appartiennent déjà à une ou d’autres communautés de
l’écosystème. Dans le cas d’un écosystème qui devient multilingue, cela implique dans un
premier temps d’avoir des personnes qui maîtrisent leur propre langue, mais aussi le
français afin de créer les ponts avec les autres communautés.
Si la méthodologie et l’approche de l’écosystème Coop-group vous intéressent et que
vous souhaitez créer un équivalent dans votre langue, vous pourriez rassembler quelques
73. Contrairement à d’autres initiatives internationales, Coop-group s’est développé en grande partie en français. Sa vocation n’est pas
d’imposer une langue, le français ou l’anglais, mais plutôt de s’adapter au mieux aux besoins de chaque communauté, quelle que soit la langue
dans laquelle ses membres échangent.

102

personnes qui sont habituées à l’animation de communauté et qui parlent le français (en
plus de votre langue) afin de bénéficier des échanges au sein de la communauté Anim-fr.
Ces quelques personnes formeront le noyau de départ d’une première communauté dans
votre langue, équivalente à Anim-fr. Petit à petit, de nouvelles communautés territoriales
et thématiques naîtront et formeront un nouvel écosystème.

Fin de la rencontre : plan d’action et prochaines étapes
Il est temps maintenant de reprendre ce qui a été dit et d’en extraire un plan d’action
en prenant soin de noter qui doit faire quoi, éventuellement avec une date limite. Le
facilitateur peut être chargé du suivi du plan d’action.
Il faut, par exemple, inscrire les informations de chacun sur un annuaire commun en
utilisant un outil, ou tout simplement un tableur ou un traitement de texte, de préférence
en ligne pour faciliter le partage et la mise à jour. Le plan d’action comprendra d’autres
points, comme inscrire ceux qui ont donné leur accord sur Anim-fr, etc. Attention, il est
conseillé à ce stade de ne pas mettre en
place d’autres outils que le simple
annuaire.
Enfin, vous terminerez la rencontre
en demandant aux participants de
partager leurs rapports d’étonnement.
Nous verrons au chapitre suivant
comment mettre en place les outils du
groupe. Ce sera la prochaine étape, une
fois

que

tout

ce

qui

concerne

l’organisation, hors outils, aura été
finalisé.

À faire

Check-list pour organiser une communauté
Si vous partez d’une communauté existante, cochez ce que vous avez déjà.
• Identification du noyau de départ pour organiser la communauté.
• Sondage pour trouver la date et envoi de l’invitation.
103

• Les coordonnées de chaque membre du noyau notées quelque part.
• Choix du nom du groupe.
• Choix d’un nom court à utiliser pour les URL et les adresses mail.
• Choix du type de communauté (thématique ou territorial).
• Rédaction d’une description du groupe en une ligne.
• Rédaction d’une description du groupe en un paragraphe.
• Choix de mots clés pour décrire le groupe.
• Éventuellement, identification de partenaires (optionnel).
• Identification du nombre de participants actuel.
• Identification de la page d’accueil (uniquement si elle existe déjà).
• Adoption de trois règles simples de fonctionnement.
• Quelques projets identifiés avec nom, référent et description en une phrase.
• Identification du facilitateur (ou des facilitateurs).
• Choix du ou des écosystèmes dans lesquels s’insérer.
• Identification et inscription de ceux qui acceptent d’être inscrits sur Anim-fr et/ou une
autre communauté d’animateurs (au moins le facilitateur).
• Plan d’action défini avec qui se charge de chaque point.
• Mise en place d’un annuaire partagé avec le noyau et les porteurs de projets.
• Contact avec le ou les écosystèmes choisis.
• Inscription de ceux qui ont accepté sur Anim-fr et/ou une autre communauté
d’animateurs.

104

—3—
Troisième étape
Les moyens d’animation

L’alliance des outils et des hommes
Ce chapitre présente différents outils pour vous
aider à animer votre groupe. Si vous n’êtes pas
familier avec les outils disponibles en ligne, cela
peut vous sembler difficile. N’hésitez pas à vous
faire aider par une personne plus aguerrie qui
pourra regarder avec vous cette partie et vous aider
à faire les bons choix et les mettre en œuvre. Pour
les plus avancés qui voudraient mettre en place
leurs

propres

outils,

vous

trouverez

des

informations pratiques dans des encadrés.
Une erreur courante est de vouloir utiliser systématiquement un outil. Certaines choses
sont encore aujourd’hui faites plus facilement par un cerveau humain. Même avec
plusieurs centaines de participants dans votre communauté, vous connaîtrez sûrement
mieux les proactifs que n’importe quelle machine. Par contre, vous aurez probablement
oublié une grande part des observateurs et des inactifs, et les mémoires informatiques
vous seront d’un grand secours pour ne pas les abandonner à leur sort — et ainsi éviter de
voir se réduire également le nombre des plus actifs74. Il faut trouver le juste équilibre
entre les humains et les outils, sachant que notre objectif est d’obtenir le maximum
d’activité et de richesse dans la communauté avec le minimum de temps d’animation.
Une deuxième erreur consiste à chercher un outil qui fasse tout et, si on ne le trouve
pas, à le redévelopper depuis zéro ! Vouloir partir d’un seul outil monolithique, c’est
s’empêcher d’en choisir certains autres très performants. C’est également voir certaines
fonctionnalités vite dépassées par de nouveaux outils qui ont évolué. La solution
monolithique ne peut pas rester la meilleure sur chaque aspect. Si, en plus, on décide de
74 La loi des 90-9-1 nous dit que perdre des inactifs c’est également perdre des actifs.

105

développer soi-même ou de faire développer « un outil qui fait tout », le ticket d’entrée
risque d’être très élevé ! Trop souvent, l’effort est porté sur la recherche de financement
d’un développement informatique plutôt que sur l’animation de communauté. J’ai vu,
ainsi, au cours de ces dernières années, de nombreuses communautés qui n’ont jamais
décollé ou qui se sont effondrées, négligées par leurs animateurs au profit d’outils qui
étaient censés les aider.

Pour faire avancer les choses

Dépasser les limites de l’approche modulaire
Un outil unique monolithique a des avantages : il permet une cohérence entre
l’ensemble des fonctionnalités. Mais beaucoup des relations entre les différentes
fonctionnalités se limitent à intégrer les résultats de l’une dans une page de l’autre, ce que
l’on peut faire avec des technologies simples, telles que les « widgets » (ou de façon moins
efficace avec des « iframes »). Parfois même, les relations se limitent à un simple lien pour
accéder à une fonctionnalité depuis une autre. Il y a cependant une information qu’il est
utile de partager entre les différents outils : l’identification et l’authentification de
l’utilisateur.
Faut-il choisir entre modularité et identification ? Faut-il imposer pour chaque outil une
nouvelle inscription ? Nous avons fait le choix, dans Coop-group, de rester modulaire et de
n’imposer qu’une seule inscription : celle à la liste de discussion. Tous les autres outils
peuvent être utilisés sans inscription. Cela est très efficace pour faire gagner du temps aux
animateurs comme aux participants et abaisser la barrière à l’entrée. Être identifié sur ces
différents outils serait utile, mais pas au point de décourager les actifs en leur imposant
plusieurs inscriptions ou bien de devoir financer le développement d’un lien spécifique
entre chaque outil.
Il existe cependant une solution : permettre aux différents outils d’échanger des
informations d’identification et d’authentification. On parle de SSO (Single Sign On, ou
authentification unique). Certains de ces systèmes sont développés spécifiquement pour
un ensemble d’outils. D’autres, comme Google Connect ou Facebook Connect, permettent
de s’identifier facilement sur de très nombreux outils, mais sont liés à une société dont le
modèle économique repose sur la valorisation de votre profil.
Défi aux développeurs : développer un SSO ouvert, indépendant des fournisseurs,
simple à utiliser, mais aussi à intégrer dans un outil quelconque, et inciter d’autres
106

fournisseurs d’outils à l’utiliser. Il existe déjà quelques briques de base, telles que le
système d’authentification décentralisé OpenID, mais il reste du chemin pour en faire une
fonctionnalité simple et surtout largement diffusée.

Nous allons étudier une douzaine de fonctionnalités qui peuvent être prises en charge
par quelques outils simples. Si vous avez choisi de participer à l’écosystème Coop-group,
nous vous proposerons une solution pour chacun de ces outils et vous resterez libre de
prendre la solution offerte ou un autre outil de votre choix.

Disposer d’un flux d’information
L’outil de diffusion d’information

Il existe de nombreuses possibilités pour diffuser un flux d’information sur internet, à
tel point que parfois, certaines communautés ne proposent qu’un blog ou un groupe
Facebook. Elles oublient l’importance de disposer d’un espace de partage qui permet de
retrouver les informations indépendamment du moment où elles ont été fournies. Dans
l’écosystème Coop-group, nous ne fournissons pas un outil spécifique, mais nous vous en
recommandons deux :
— Soit un blog qui pourra facilement s’intégrer dans une autre page, grâce aux « flux
RSS » qu’il génère. Il en existe de nombreux, tels que Wordpress ou encore Overblog.
— Soit une « page Facebook » qui, contrairement au « groupe Facebook », peut être
intégrée dans une page web et ainsi être facilement accessible à ceux qui n’ont pas
Facebook.
Twitter est également une façon de diffuser des informations courtes, et un fil twitter
peut facilement être intégré par exemple dans la page d’accueil de la communauté.

107

Les compétences du griot, bloggeur, journaliste ou community
manager
Installer un outil de diffusion d’information nécessite des compétences simples mais
tout de même nécessaires, n’hésitez pas à vous faire aider par des personnes autour de
vous qui ont cette compétence. Une fois cela fait, l’écriture d’articles nécessite très peu de
compétences techniques.
Un article doit répondre aux critères suivants :


L’article peut-il tenir sur un seul paragraphe, deux au maximum ?



Avez-vous pensé aux QQOQCCP75 : Qui, Quoi, Où, Quand, Comment, Combien,
Pourquoi ?



Le vocabulaire et le niveau d’information sont-ils adaptés au public concerné ?



Avez-vous trouvé un titre percutant76 ?

Organiser des rencontres régulières
Le calendrier

Le calendrier est un outil utile que vous pouvez intégrer dans votre espace de partage.
Dans l’écosystème Coop-group, nous proposons un calendrier collaboratif qui permet de
mettre vos rencontres et événements sur votre espace de partage, mais aussi sur un
calendrier commun. Vous pouvez également, grâce à lui, inviter d’autres groupes en
inscrivant votre événement dans leur calendrier, si vous le souhaitez.
Le sondage de date

Lorsqu’on doit se mettre d’accord sur une date, il existe des outils gratuits, très simples
à utiliser, qui font gagner un temps considérable. Je recommande l’application libre
http://framadate.org/. Il suffit d’envoyer le lien du sondage à la liste de discussion et de ne
pas oublier de fixer une date limite pour les réponses.

75 https://fr.wikipedia.org/wiki/QQOQCCP - en anglais “Five W’s” : Who, What, When, Where, Why?
76 première partie, chapitre 4 “l’information, premier moyen d’animation” - encadré “exercice individuel : titres pleins, titres creux - je lis
ou je ne lis pas”

108

La prise de note collective

Ce troisième outil va nous permettre de prendre des notes ensemble. Vous pouvez
utiliser un pad (http://framapad.org/, par exemple) ou un traitement de texte en ligne.

Se réunir à distance
Pour réunir une communauté à distance, il faut lui imposer le minimum de contraintes,
sinon on risque de ne toucher que les plus proactifs. Il faut éviter d’obliger à télécharger
une application spécifique que tout le monde n’a pas par défaut sur son ordinateur.
L’outil idéal pour des rencontres à distance sur internet doit répondre aux
caractéristiques suivantes :
— de préférence gratuit et idéalement en logiciel libre ;
— si possible utilisable sur ordinateur, smartphone et tablette et même, dans l’idéal,
pouvant accepter des participants par téléphone77 ;
— n’imposant aux utilisateurs ni téléchargement ni inscription préalable ;
— fiable, mais ne nécessitant pas de disposer d’un très haut débit ;
— permettant des rencontres à distance au moins jusqu’à vingt-cinq ou
trente personnes ;
— chaque utilisateur doit pouvoir rejoindre la réunion à distance à partir d’un simple
lien, sans nécessiter que l’organisateur de la rencontre ait à l’inviter au préalable.
Si, en plus, l’outil permet d’intégrer un système de prise de note (comme un pad) et
qu’il permet le partage d’écran, alors c’est le grand bonheur !
Plusieurs outils existent sur internet, mais sont limités. Beaucoup, comme Skype de
Microsoft ou Hangout de Google, obligent à inviter chacun individuellement à la rencontre
à distance. Ils sont, néanmoins, assez bien adaptés aux rencontres limitées aux groupes
projet qui réunissent, au plus, une dizaine de personnes. Le nouveau standard web RTC
permet d’organiser des conférences audio ou en visioconférence sans rien à télécharger,
simplement en rejoignant une page web. Il fonctionne sur plusieurs navigateurs (Chrome,
Firefox, Opera), mais, au moment où j’écris ces lignes, il n’est pas encore opérationnel sur
Internet Explorer, qui est fourni avec Windows, ni sur Safari, installé par défaut sur tous les

77 Attention cependant dans le cas d’appels téléphoniques dans une rencontre internationale, de proposer des numéros de téléphone dans
le plus grand nombre possible de pays concernés pour éviter des factures trop lourdes aux utilisateurs

109

Mac. Il semble, par ailleurs, qu’il a du mal à permettre des rencontres à distance, en
visioconférence, avec beaucoup de participants.
Il existe également des outils dédiés à la vidéoconférence, comme ceux de Polycom,
mais chaque membre de la communauté devrait acquérir un matériel spécifique pour
pouvoir participer. Ils disposent parfois d’applications utilisables pour se connecter depuis
un ordinateur à certains réseaux de vidéoconférence, mais elles nécessitent un
téléchargement.
En attendant, nous utilisons souvent Flashmeeting de l’Open University : jusqu’à
trente participants, pas d’application à télécharger, une prise en main très simple et
efficace (une seule personne parle à la fois), et il fonctionne même avec une connexion à
bas débit. Flashmeeting n’existe actuellement que sur peu de serveurs et nécessite un
compte pour réserver des réunions (mais pas pour y participer). Un nouvel outil semblerait
convenir, bien que nous l’ayons encore peu testé en grandeur réelle. Il s’agit de Glowbl qui
permet d’installer des espaces permanents, des « livestages », à une adresse donnée. Un
nombre non limité de participants peuvent écouter, voir et dialoguer par chat. Dix
participants peuvent utiliser leur micro et leur webcam en même temps.
Il existe également d’autres possibilités de se réunir à distance, sans la vidéo, par le son
et/ou le texte :
• La réunion téléphonique est un des outils les plus anciens et les plus simples pour
échanger de façon synchrone à distance. Cependant, lorsque la réunion concerne
plusieurs pays, le coût pour les participants peut être élevé. Certains outils de réunion
téléphonique proposent des numéros dans plusieurs pays, mais cela reste limité.
• Les serveurs de « voix sur IP » sont souvent utilisés pour échanger à plusieurs par les
adeptes du jeu vidéo en réseau. On trouve, par exemple, le logiciel libre de
communication vocale Mumble, ou encore les logiciels propriétaires TeamSpeak et
Ventrilo. Ils sont en général très performants, mais nécessitent que les participants
téléchargent un logiciel.
• Les chats permettent d’échanger à plusieurs par écrit. Il existe de nombreux outils de
chat sur internet dont certains n’imposent pas de créer un compte. Les pads qui
permettent d’écrire ensemble sur un même document disposent également souvent d’un
chat, les deux outils étant très complémentaires. Il existe des outils de chat sur
smartphone qui permettent également d’échanger en audio ou en visioconférence, mais

110

seulement à deux, tels que les applications WhatsApp ou Viber, téléchargeables
gratuitement, mais incompatibles entre elles.

Les compétences de l’organisateur de rencontres
L’organisateur de rencontres devra faire en sorte qu’une rencontre en présentiel ou à
distance soit organisée régulièrement. Ce rôle peut être rempli par le facilitateur, le
leader, ou bien un participant du groupe. L’organisateur aura besoin de quelques
compétences simples pour organiser les rencontres et éventuellement conseiller
l’animateur de la rencontre :
• Connaître les outils de sondage en ligne et savoir les utiliser.
• Savoir ajouter une date sur le calendrier et savoir également la modifier si nécessaire.
• Savoir gérer les décalages horaires au besoin.
• Penser à envoyer deux ou trois fois l’invitation à une rencontre (par exemple une
semaine avant et la veille).
• Connaître les différentes phases d’une rencontre pour proposer un ordre du jour ou
aider l’animateur à le faire.
• Connaître quelques méthodes d’animation participatives pour conseiller l’animateur
de la rencontre.
• Savoir mettre en place un système de prise de notes collective (par exemple un pad)
et savoir s’en servir.

Les discussions en ligne
Pour faciliter l’échange entre les rencontres, il faut un moyen pour que chacun puisse
recevoir les messages de la discussion dans une boîte aux lettres qu’il consulte
régulièrement. L’outil de discussion cherche à toucher tous les participants et pas
seulement les plus actifs. Pour participer à une discussion, il faut qu’un participant fasse
deux choses :
— Qu’il ait l’outil utilisé pour la discussion : toute personne sur internet dispose d’une
adresse mail, mais ne consulte pas forcément Facebook, Twitter, etc.
— Qu’il s’inscrive à la discussion de la communauté : il s’agit du seul cas où l’inscription
est indispensable. Dans certains cas, de nouvelles personnes ne peuvent pas s’inscrire
elles-mêmes, mais doivent demander à un des membres de le faire, ce qui ajoute une
111

difficulté et du temps pour les animateurs. C’est le cas, par exemple, dans une discussion
collective sur la messagerie Facebook.
Il existe plusieurs solutions pour disposer d’une liste de discussion. L’écosystème Coopgroup met à disposition un serveur de liste de discussion mail, grâce au logiciel libre
Mailman 2, pour les communautés qui le souhaitent. Il est également possible d’utiliser
des services en ligne, tels que Google Groups ou Yahoo Groupes. Si vous disposez de
serveurs, vous pouvez également installer vous-même un serveur de listes de diffusion, tel
que Mailman 2 ou Sympa. Bien que je vous recommande d’utiliser une liste de discussion
pour toucher le plus de monde, y compris les moins actifs, vous pouvez également
discuter en ligne avec la messagerie instantanée de Facebook ou avec Twitter à l’aide d’un
hashtag commun.
Vous devrez ensuite proposer une page permettant l’inscription, mais aussi la
désinscription. L’information minimum que vous devez demander est l’adresse mail de
celui qui souhaite participer. Il peut être utile de demander aussi le prénom et
éventuellement le nom. De nombreux sites proposent de fournir bien d’autres
informations sur le nouveau participant, on parle alors non plus d’identification, mais de
profil78. Cela peut être très utile, mais n’est absolument pas indispensable.
Il est extrêmement utile de fournir une page avec les archives des discussions.
Beaucoup

de

serveurs

de

liste

permettent

d’avoir

ces

échanges

classés

chronologiquement, mais aussi par « fil de discussion » comme dans un forum (les
réponses sont regroupées en dessous de la question concernée). D’ailleurs, certains outils
marient serveur de liste mail et forum, permettant de bénéficier du meilleur des deux
(outils push et pull qui permettent de contribuer au choix par mail ou depuis une page
web).
Généralement, des pages permettent de présenter les membres de la communauté.
Les systèmes de gestion de profils permettent de donner des informations sur les
participants et de les rendre accessibles avec différents niveaux de détail aux autres
membres de la communauté ou aux personnes extérieures. Mais cela peut aussi être fait
avec une simple page de traitement en ligne qui rassemble tout le monde pour y

78. Voir la présentation des membres effectuée sur une simple page de traitement de texte, sur http://coop-group.org/Saulieu/ ; ou, avec
une base de données plus complète, voir la présentation du groupe sur http://coop-group.org/anim-fr/.

112

consacrer le minimum de temps ou, de façon plus avancée, avec une petite base de
données contenant les présentations des membres.

Pour en savoir plus

La vraie valeur des communautés
Le profil décrit de multiples aspects de chaque utilisateur. Il permet de faire des
traitements automatiques pour, par exemple, montrer la répartition des membres sur une
carte ou encore connaître les préférences d’un utilisateur en particulier. Il est surtout utile
pour les fournisseurs qui souhaitent proposer des produits adaptés à chaque personne
grâce à un profiling, mais aussi aux utilisateurs qui souhaitent identifier d’autres membres
immédiatement et automatiquement, sans avoir à prendre le temps de découvrir les
membres de la communauté au travers de leur activité dans le groupe.
Les profils permettent de connaître beaucoup de choses quand ils sont bien renseignés,
mais ne sont pas indispensables ! Beaucoup de communautés fonctionnent très bien avec
l’adresse mail comme unique information sur leurs membres. Aucun profil ne vous
apportera ce qui vous offre d’échanger avec des personnes pendant des mois, voire des
années, et de découvrir avec qui vous avez envie de faire alliance.
Une des plus grandes valeurs d’une communauté est de vivre sur une longue durée
avec des personnes dont vous apprendrez à connaître le potentiel et les limites.

Les compétences du modérateur
Le rôle de modérateur peut être assumé par une ou plusieurs personnes. Il aura comme
rôle de gérer la discussion et d’administrer les outils. Chaque outil a son propre
fonctionnement (serveur de liste de discussion, Facebook, Twitter). L’écosystème Coopgroup utilise un serveur de liste Mailman 279.
Pour modérer une discussion, vous devez vous assurer que vous savez :
— vous connecter à l’interface de gestion de l’outil ;
— indiquer à un membre la page d’inscription et de désinscription sur l’espace de
partage ;
— inscrire un ou plusieurs membres directement ;
— désinscrire un ou plusieurs membres ;

79. Des tutoriels pourront vous aider sur cornu.eu.org/texts/mailman.

113

— vérifier si un membre est bien inscrit ;
— accepter ou refuser un message en attente (modération) à partir de l’interface
d’administration et/ou à partir d’un mail de notification reçu ;
— mettre la liste provisoirement en modération en cas de débat un peu trop
enflammé.
Le paramétrage de l’outil de discussion nécessite un peu de savoir-faire, on parle du
rôle d’administrateur pour une liste. Il est donc possible de se faire aider dans ces
moments particuliers par une personne compétente, même si elle ne fait pas partie du
groupe. Pour le reste, il suffit qu’un ou quelques membres de la communauté puissent
intervenir au jour le jour, lorsque nécessaire.

L’espace de partage
Il reste à mettre en place l’espace de partage. Trois types de pages qui seront mises à
jour par des personnes différentes :
— les pages statiques qui n’ont que très rarement besoin d’être modifiées ;
— des espaces dynamiques qui listent les projets du groupe, les ressources ou les
prochaines dates ;
— et des pages de travail qui doivent être mises à jour facilement par tous.
Attention, la plupart des outils de blog sont adaptés pour le fil d’information, mais pas
pour la grande majorité des pages du groupe qui ne doivent pas dépendre de la
chronologie des dates de mise à jour.
Pour créer votre espace de partage, les pages à prévoir sont les suivantes80 :
• la page d’accueil : elle peut aussi intégrer d’autres pages. Dans le cas de Coop-group,
elle affiche directement le contenu de la description du groupe, le calendrier des projets
en cours, la liste des ressources et le fil d’information ;
— Les pages de partage :
• la liste des projets en cours (page dynamique), par exemple une page wiki ;

80. Les communautés de l’écosystème Coop-group qui le souhaitent pourront demander la mise en place d’un espace de partage.

114

• une page pour chacun des projets (pages de travail). Il est possible d’utiliser des pages
de traitement de texte en ligne (Google Docs ou Zoho Docs) ou, parfois, une page wiki
extérieure au site, accessible grâce à un lien depuis la liste des projets en cours ;
• la liste des ressources (page dynamique) ;
• une page pour chacune des ressources produites par le groupe (page statique81).
— La page pour l’activité de diffusion d’information :
• le fil d’information (Facebook, blog ou autre). Cette page peut être extérieure au site
(page Facebook ou blog), mais intégrée dans une colonne de la page d’accueil. Il n’est
donc pas nécessaire d’avoir un compte Facebook pour consulter le fil d’information.
— Les pages pour l’activité de rencontres :
• le calendrier du groupe (page dynamique). Un calendrier collaboratif permet
d’afficher les dates du groupe sur la page d’accueil. Un calendrier général permet
également de suivre tous les événements de toutes les communautés ;
• un espace d’échange synchrone à distance pour se retrouver lorsqu’on le souhaite.
Cette page peut pointer vers un chat. C’est un même espace pour toutes les
communautés. Lorsque l’une d’elles souhaite se réunir en ligne, il lui suffit de réserver la
date et l’heure dans le calendrier. L’avantage de l’espace d’échange synchrone est qu’il
permet d’avoir une même adresse où se déroulent toutes les rencontres à distance ;
• une page de notes pour chaque rencontre (pages de travail). Un pad ou une page de
traitement de texte en ligne peuvent être utilisés selon les cas. Ces pages sont extérieures
au site (elles n’en ont pas l’aspect), mais sont accessibles grâce à un lien depuis l’annonce
de la rencontre dans le calendrier ;
• les pages de sondages qui utilisent des outils externes n’ont pas besoin d’être liées au
site. Il suffit de donner le lien dans un message de la discussion en ligne et éventuellement
dans le fil d’information.
— Les pages pour l’activité de discussion en ligne :
• la page d’inscription et de désinscription ;
• la page des archives des messages ;
• la liste des membres ;
— Les pages d’administration :

81. Ces pages devraient devenir des pages wiki intégrant la ressource mise à disposition sur la boîte à outils collaborative MultiBàO, ce qui
permettrait de partager facilement la ressource avec d’autres sites.

115

• la page de présentation du groupe. Celle-ci ne doit pas être mise à jour par n’importe
qui, mais par un des animateurs à la suite d’un choix collectif. En revanche, elle doit être
facile à trouver et lisible par tous ;
• la page de suivi du groupe et de ses projets (page de travail). Cette page sera vue en
détail dans la partie suivante : « La mise en place du suivi des projets » ;
• la page d’administration du site. Beaucoup de sites disposent d’outils
d’administration. Par exemple, sur un wiki, ils permettent de voir les dernières pages
modifiées, etc.
Une fois que toutes ces pages sont disponibles, vous devez faire en sorte qu’elles soient
accessibles facilement partout sur le site, soit grâce à un accès dans le menu, soit sous la
forme d’un module directement visible sur la page d’accueil.

116

Pour faire avancer les choses

Au-delà des archives de la liste de discussion, les archives du groupe !
L’accès aux archives de la discussion en ligne est très utile. Mais il se dit également des
choses très intéressantes lors des rencontres, sur le fil d’information et même un peu
partout sur le web en relation avec l’objet de la communauté.
Une première solution est de prévoir quatre pages, chacune fournissant les
informations en fonction de la date où elles ont été apportées :
— Le fil d’information : il suffit de remonter dans la page d’information pour retrouver
les anciennes.
— Les rencontres : le calendrier permet de pointer vers les notes de réunion.
— Les discussions : la page des archives de discussion.
— La veille sur le web : une page de la communauté où l’on peut retrouver un
ensemble de pages web sélectionnées, non encore sujettes à des discussions. On parle de
curation, c’est-à-dire la sélection et le partage de contenus issus du web. Pour sélectionner
les pages que vous souhaitez rediffuser, vous pouvez créer un journal des informations
republiées avec Scoop.it ou classer vos signets avec Diigo ou encore les classer
graphiquement avec Pearltree.
Il est particulièrement utile de pouvoir disposer d’une page permettant de retrouver les
informations classées par thème plutôt que par chronologie : « Je ne sais plus où ni quand,
mais nous avons parlé d’une astuce qui pourrait nous être bien utile pour… »
Il n’existe pas de solution permettant d’agréger automatiquement toutes ces activités
et de les classer entièrement automatiquement. Ici, l’humain est plus puissant que la
machine pour organiser et trier des informations non structurées82. Cela ne veut pas dire
qu’un petit coup de main de l’ordinateur est inutile. Une première solution consiste à faire
un schéma heuristique (ou mind mapping) pour cartographier toutes les informations
utiles. Une deuxième solution est proposée par l’outil libre Assembl, développé au départ
pour faciliter les débats en intelligence collective83. Il fournit une vision d’ensemble de ce
qui a été dit dans le groupe84. Il facilite et rend plus rapide le travail de l’attrapeur, en
82 Certains pensent qu’il suffit que l’homme s’adapte à la machine et qu’il ne fournisse que des informations structurées. C’était même la
base de la première génération du “Knowledge Management” qui a échouée. La deuxième génération du Knowledge Management au début des
années 2000 a remis l’humain à sa place et la machine à son service : http://prospectic.fing.org/news/rapport-d-etonnement-sur-le-theknowledge-forum-2007
83 Développé par l’association Imagination for People et la société Bluenove avec le soutien de l’Institut du Nouveau Monde au Québec https://github.com/ImaginationForPeople/assembl
84 Pour la méthodologie d’intelligence collective, voir “Comment produire un document à plusieurs centaines de personnes”, in “Faire
ensemble ! Manuel à l’usage des animateurs de réseaux collaboratifs”, Coop-tic.eu - http://tinyurl.com/produire100

117

présentant une colonne avec les archives mail et une autre avec une cartographie qui
rassemble les idées triées. Il suffit de placer les informations issues de la colonne de
gauche vers celle de droite. Il est aussi possible de saisir directement des idées lors d’une
réunion ou pour un fonctionnement de type forum, ou encore de sélectionner des
éléments de pages web pour la veille. Il existe des mises en œuvre pour les entreprises et
les organisations85 et aussi pour les communautés centrées sur le bien commun86.

Les compétences de l’attrapeur
Le rôle d’attrapeur peut être assumé par une ou plusieurs personnes, par exemple le
facilitateur, le leader ou bien d’autres participants du groupe.
L’attrapeur n’a pas besoin de maîtriser tous les outils (il peut se faire aider
ponctuellement lorsqu’il est nécessaire de changer les pages statiques). Il doit être
cependant capable :


d’ajouter un nouveau projet dans la liste (et la page de travail qui lui
correspond) ;



d’ajouter une nouvelle ressource dans l’espace dédié ;



de mettre à jour une page de travail et montrer à des participants comment le
faire ;



éventuellement d’ajouter une présentation d’un membre sur le site ;



éventuellement d’utiliser un outil pour attraper toute les informations utiles
pour le groupe (voir l’encadré “pour faire avancer les choses : au-delà des
archives de discussion, les archives du groupe”) ;

Si vous utilisez Yeswiki (l’outil utilisé pour la majorité des communautés Coop-group),
vous pouvez apprendre à vous en servir en passant votre “brevet Yeswiki” :
http://yeswiki.net/wakka.php?wiki=TutorielS (45 minutes pour devenir un “maître
Wiki”).
Pour découvrir l’outil Assembl qui permet d’attraper toutes les informations issues de la
discussion, des rencontres, du fil d’information et du Web : http://assembl.org/userguides/ (en anglais).
85 http://assembl.org/
86 http://citizen99.org/index.fr.html

118

La mise en place du suivi des projets
Nous avons maintenant les outils pour les activités de la communauté et des projets
ouverts collectifs (information, rencontre, discussion, espace de partage avec des pages de
travail et de ressources). Il reste maintenant, pour le facilitateur, à démarrer le suivi des
projets et des activités de la communauté. La feuille de suivi peut être un simple tableau,
par exemple sur un tableur en ligne. Une nouvelle colonne peut être ajoutée chaque mois
juste à droite de la liste des projets.

A faire

Exemple de tableau de suivi d’une communauté
Les trois questions à poser régulièrement à chaque référent de projet :
1. Quelle est la prochaine étape ?
2. Y a-t-il une prochaine date de rencontre (en ligne ou en présentiel) ?
3. Est-il possible de partager les informations sur la situation du projet avec l’ensemble
du groupe sur la liste ?
N’hésitez pas à faire remonter les difficultés pour que le groupe puisse aider les projets
en difficulté ou qui s’essoufflent.

Pour faire avancer les choses

Améliorer les outils de suivi
119

Il est intéressant de compléter le tableau de suivi avec un véritable tableau de bord au
service du facilitateur ou du groupe de soutien qui aide plusieurs facilitateurs dans
l’écosystème. Les informations pourraient apparaître de façon très graphique, par
exemple avec des points verts, orange ou rouges pour avoir rapidement une vue
d’ensemble des activités qui nécessitent de l’attention.
• Information (collecte du flux RSS provenant du blog ou des modifications de la page
Facebook) :
— vert : une publication depuis moins d’une semaine ; orange : une publication
depuis moins de deux semaines ; rouge : au-delà.
• Rencontres (collecte des modifications du calendrier) :
— vert : une prochaine date prévue ; orange : pas de date prévue ni de dates
anciennes depuis un mois ; rouge : au-delà.
• Discussion (collecte des mails de la liste) :
— en vert : 1 à n mails dans la semaine ; orange : pas de mail depuis quinze jours
ou plus de n mails par semaine ; rouge : au-delà.
• Espace de rencontre :
— vert, orange ou rouge en fonction de la date de dernière mise à jour.
Voici un nouveau défi pour les développeurs ! Un tel tableau de bord devrait pouvoir
s’adapter à la plupart des outils utilisés par les communautés, s’intégrer facilement sur
une page du site (par exemple, dans un widget) et contenir également un tableau de suivi
très facile à compléter pour le facilitateur.

Les compétences des porteurs de projets
Les porteurs de projets ont peu de choses à connaître pour que leur projet bénéficie de
la communauté. Ils doivent :
• aller sur le site de la communauté et sur leur page de travail depuis le site ;
• mettre à jour la page de travail du projet ;
• envoyer une information sur l’outil de discussion en ligne de la communauté ;
• être au courant qu’il existe un ou des facilitateurs avec lesquels ils feront
périodiquement le point sur le projet.

120

Si les porteurs d’un projet ne savent pas mettre à jour le calendrier ou le fil
d’information, cela peut être fait par quelqu’un d’autre à partir des informations postées
sur l’outil de discussion.
Tout est en place, le facilitateur peut désormais commencer son travail hebdomadaire
en contactant chaque référent de projet une fois par mois, en complétant le tableau de
suivi et en faisant en sorte qu’il y ait des informations chaque semaine sur la discussion en
ligne. Ainsi, il sera rodé à l’exercice lorsque la communauté grossira.

À faire

Votre check-list, si vous utilisez les outils Coop-group
Si vous partez d’une communauté existante, cochez ce que vous avez déjà.
Vous avez fait vos choix pour faciliter l’appropriation d’utilisateurs très divers plutôt
que de choisir les outils que vous connaissez ou ceux que vous aimeriez.
Vous avez identifié les outils que vous avez déjà que vous souhaitez conserver.
Vous avez prévenu Coop-group afin de mettre en place les autres outils.
Les outils Coop-group sont en place.
L’outil de diffusion d’information est choisi et en place (page Facebook, blog...).
Les journalistes savent utiliser l’outil et ont acquis les compétences nécessaires.
Les premiers articles ont été mis sur l’outil de diffusion d’information.
L’organisateur de rencontres a fait un premier sondage, mis à jour le calendrier et lancé
de premiers messages d’invitation.
Le noyau de départ et les porteurs de projets sont inscrits sur l’outil de discussion.
Les premiers messages ont été envoyés sur l’outil de discussion en ligne.
Le ou les modérateurs ont fait les exercices de formation.
Dans l’espace de partage, une page a été mise en place pour chaque projet.
Le ou les attrapeurs ont fait les exercices de formation.
Pour le suivi des projets et autres actions, le document de suivi est en place.
Le facilitateur a commencé à contacter les porteurs de projets et à remplir le
document.
Les porteurs de projets ont fait les exercices de formation.
121

À faire

Votre check-list si vous mettez en place vos propres outils
Si vous partez d’une communauté existante, cochez ce que vous avez déjà.
Vous avez fait vos choix pour faciliter l’appropriation d’utilisateurs très divers plutôt
que de choisir les outils que vous connaissez ou ceux que vous aimeriez.
L’outil de diffusion d’information est choisi (page Facebook, blog, etc.).
L’outil de diffusion d’information est en place.
Le ou les « journalistes » savent utiliser l’outil et ont fait les exercices de formation.
Les premiers articles ont été mis sur l’outil de diffusion d’information.
Pour les rencontres : le calendrier est choisi et en place.
L’organisateur de rencontres a fait un premier sondage, mis à jour le calendrier et lancé
de premiers messages d’invitation.
Un outil de rencontre à distance a été choisi et testé une première fois.
L’outil de discussion en ligne est choisi.
L’outil de discussion en ligne est en place.
Le noyau de départ et les porteurs de projets sont inscrits sur l’outil de discussion.
Les premiers messages ont été envoyés sur l’outil de discussion en ligne.
Le ou les modérateurs ont fait les exercices de formation.
Pour l’espace de partage, l’outil est choisi.
Toutes les pages de l’espace de partage sont en place.
Une page simple à mettre à jour a été mise en place pour chaque projet.
Le ou les attrapeurs ont fait les exercices de formation.
Pour le suivi des projets et des autres actions, le document de suivi est en place.
Le facilitateur a commencé à contacter les porteurs de projets et à remplir le
document.
Les porteurs de projets ont fait les exercices de formation.

122

—4—
Quatrième étape
Inviter et lancer le groupe

Comment être plus de cent membres dans la communauté ?
Une communauté est plus facile à animer audelà d’une centaine de membres. Si votre groupe
existe déjà et que vous avez du mal à avoir une
dynamique

suffisante,

cela

peut

nécessiter

d’élargir le périmètre du groupe. Si vous créez une
nouvelle communauté ou si celle que vous
réorganisez n’atteint pas ce nombre, vous allez
lancer des invitations collectives et des invitations
individuelles.

Les

premières

permettent

de

toucher un grand nombre de personnes, mais
avec seulement quelques pour-cent de retours avec un bon ciblage. Les invitations
individuelles permettent de cibler des personnes que l’on connaît et que l’on souhaiterait
avoir dans le groupe. Avec une invitation individuelle suivie, quelque temps plus tard,
d’une relance, cela permet un taux de retour très important de l’ordre de 90 %. Les deux
sont complémentaires.
Une invitation n’est pas une inscription, il faut demander l’autorisation à une personne
pour l’inscrire au groupe. Si celle-ci est intéressée, son inscription doit être la plus simple
possible. Vous pouvez mettre un lien direct vers la page d’inscription de votre espace de
partage et même proposer de simplement répondre au message pour que vous vous
chargiez vous-même de l’inscription. Cela peut sembler plus de travail, mais votre objectif
est d’avoir le plus rapidement possible une centaine d’inscrits pour gagner ensuite
beaucoup de temps.

123

Pour faire avancer les choses

Faciliter encore plus l’inscription
Lorsqu’on met un lien dans un message, il faut que la personne arrive sur un
questionnaire le plus court possible. Si vous avez choisi de mettre en place un profil plus
complet, attendez un peu. Vous pourrez toujours relancer la personne plus tard pour
qu’elle vienne le compléter. Au minimum, il vous faudra demander son prénom, son nom,
si vous pensez qu’il est indispensable, et son email.
Vous pouvez aussi automatiser une inscription lorsque la personne répond au mail
d’invitation. Dans ce cas, l’adresse de retour doit pointer sur un robot qui détecte
l’adresse de la personne, ainsi que son prénom et son nom.

Il existe deux façons d’inviter quelqu’un dans un groupe. Le premier principe, l’opt-in,
consiste à lui demander préalablement s’il accepte d’être inscrit. Le deuxième principe,
l’opt-out, consiste seulement à lui demander s’il ne souhaite pas être inscrit. L’opt-out
donne de bien meilleurs résultats, mais, attention, vous ne pouvez faire cela qu’avec des
personnes très ciblées et dont vous savez qu’il serait naturel qu’elles participent. Cela peut
se faire facilement avec les membres du noyau et les porteurs de projets qui ont déjà
accepté de contribuer à la communauté. Utilisez l’opt-out uniquement si vous êtes sûr que
cela ne sera pas mal perçu par vos interlocuteurs. « Qui ne dit mot consent » est une
maxime qui a des limites.
Préparez les deux types d’invitations, collectives et individuelles, et faites en sorte
d’avoir votre première centaine de participants dans un temps court, typiquement
deux semaines. Cela évitera que les premiers inscrits attendent trop longtemps avant de
voir démarrer l’activité.

Lancez des invitations collectives
Tout d’abord, sélectionnez soigneusement les autres groupes sur lesquels vous allez
lancer l’invitation, sur des listes de discussion ou sur les réseaux sociaux ou, encore,
directement lors d’une réunion physique. Choisissez de préférence des communautés
complémentaires sur un sujet ou un territoire proche où vous savez que certains membres
124

seront intéressés et qui feront un lien naturel entre les deux communautés. Vous pouvez
également inviter les membres d’une structure (association, ONG, entreprise, collectivité)
qui œuvre sur la même thématique ou le même territoire que votre communauté, en leur
précisant qu’il n’y a pas de concurrence avec eux, mais qu’au contraire il s’agit de mettre
en réseau les personnes et les organisations dans le thème ou sur le territoire, au bénéfice
de tous.
Choisissez, de préférence, des communautés dont vous — ou des membres de votre
noyau d’animation — faites partie. Vous pouvez également passer par un membre actif de
la communauté ou de l’organisation à laquelle vous voulez lancer l’invitation. Cela permet
d’avoir une légitimité pour lancer une invitation et évite de donner l’impression de spamer
le groupe. Plus la personne qui invite est légitime dans le groupe auquel est envoyée
l’invitation, plus le taux de retour sera bon. Identifiez, pour chaque groupe, la personne
unique qui va envoyer l’invitation, éventuellement cosignée, afin d’éviter les doublons.
Vous allez également sélectionner différents canaux de diffusion généraux : voie de
presse, pages personnelles sur les différents réseaux sociaux, pages Twitter des membres
du noyau d’animation, réunion d’information, etc.
Le message d’invitation doit être court et l’inscription simple :
— inscription en deux clics pour un message en ligne (un dans le message et un sur la
page d’inscription) ;
— un ordinateur connecté avec une personne pour aider à s’inscrire dans le cas d’une
réunion physique ;
— ou même une simple feuille où les personnes intéressées peuvent mettre leur nom
et leur mail si elles sont intéressées (attention aux mails illisibles).
À chaque étape ou clic supplémentaire demandé, on perd un grand nombre de
personnes. Il faut donc simplifier au maximum l’inscription.

125

Exemple

Message collectif d’invitation
Ce message peut être envoyé par mail ou sous forme de post sur les réseaux
sociaux, ou bien encore servir de base pour une très courte annonce lors d’une
rencontre physique.
Objet : Lancement d’un groupe sur 
Bonjour,
Nous lançons un nouveau groupe francophone international : 

Vous souhaitez y participer ?
Il vous suffit d’aller sur 
pour vous inscrire (ou vous désinscrire quand vous le souhaitez)
ou bien simplement m’envoyer un message à  pour que je le fasse pour
vous.
Venez partager avec nous les initiatives les plus innovantes repérées dans le monde,
échanger avec les acteurs du  et découvrir des approches
nouvelles.
À bientôt pour échanger ensemble,
 ou l’équipe d’animation de 

(N’hésitez pas à adapter le message tout en le gardant très court afin qu’il ait le
plus de chances d’être lu. Les phrases en gras permettent d’attirer le regard sur les
quelques informations importantes).

Des invitations individuelles pour ceux que l’on souhaite
particulièrement avoir avec nous
Pour la partie individuelle, il faut tout d’abord constituer une liste des personnes que
l’on souhaiterait avoir dans le groupe. Cela peut être fait, par exemple, avec un tableur où
l’on trouve pour chaque personne à inviter un champ au format « Prénom Nom »
, format qui permet un envoi facile par simple copier-coller dans le champ
destination d’un mail ou dans le formulaire d’inscription d’une liste.
126

Une telle approche des invitations individuelles est très efficace lorsqu’elle est bien
réalisée et que l'on connaît au moins un peu les personnes invitées (il peut être utile de
faire signer le message par des personnes qui connaissent le destinataire). Elle permet un
très bon taux de retour (jusqu'à 80 ou 90%).

Exemple

Tableau pour le suivi des invitations individuelles

Détail des colonnes du tableau :
• Nom + mail : sous la forme « nom  » afin de pouvoir copier-coller facilement
dans le champ destination d’un mail.
• Structure : juste pour avoir une idée de son organisation, si cela est pertinent.
• Remarque.
• Qui invite : celui qui se charge de l’invitation pour éviter les doublons.
• Invitation : date de l’invitation, une fois qu’elle est envoyée.
• Relance 1 : date de la première relance, une fois qu’elle est envoyée.
• Relance 2 : le cas échéant, date de la deuxième relance, une fois envoyée.
• Réponse : oui ou non, une fois la réponse reçue, rien tant qu’il n’y a pas de réaction.
• Inscription : une fois que la personne s’est inscrite ou qu’on l’a inscrite à sa demande.

Il reste maintenant à envoyer un mail d’invitation, ou un message Facebook pour ceux
qui ne lisent plus leur mail, à chaque personne individuellement en ajoutant simplement le
prénom de la personne à un message type qui sera le même pour tous. Le fait d’envoyer
un mail directement à une seule personne à la fois, avec son prénom dès la première ligne,
demande un peu plus de travail, mais donne beaucoup plus de force au message. Il peut
être judicieux également de montrer dans l’invitation qu’il n’est pas nécessaire de
contribuer pour participer au groupe, que le nombre de messages restera raisonnable et
qu’il est possible de se désinscrire à tout moment.
Exemple

127

Message individuel d’invitation
Le mail proposé ici utilise le tutoiement. Suivant le cas il peut être utile de préparer un
deuxième message type avec le vouvoiement. Il fonctionne pour un homme ou une femme.
Objet : Une nouvelle communauté sur 
Bonjour ,
Je lance un nouveau groupe international francophone sur .
Au regard de tes connaissances et de ton intérêt pour le sujet, je te propose de nous
rejoindre pour participer à cette aventure. <éventuellement un peu plus d’explications sur
les premières choses que fera le groupe>.
Il te suffit d’aller sur  pour t’inscrire (ou te
désinscrire). Suivre le groupe devrait te prendre très peu de temps et permettre des
échanges avec un grand nombre d’acteurs du . Pour te faire gagner
du temps, dis-moi simplement si tu es d’accord et je peux m’occuper de ton inscription.
En attendant d’avoir le plaisir d’échanger avec toi.
Amicalement,


Après environ une semaine, vous pouvez envoyer un mail de relance pour les
personnes invitées qui ne se sont pas inscrites ou qui ne vous ont pas demandé de le faire,
puis une deuxième relance. Mais si la personne n’a pas réagi ni à l’invitation ni aux
relances, vous pouvez considérer qu’elle ne souhaite pas faire partie du groupe.
Exemple

Message de relance
Objet : Démarrage du groupe 
Bonjour ,
As-tu bien reçu mon message à propos du groupe  ?
Dis-moi si cela t’intéresse, nous commençons les échanges dès lundi.
Amicalement,


Faites patienter les premiers inscrits en attendant les autres
128

Pour faire patienter les premiers inscrits, vous pouvez envoyer un message au bout
d’une semaine ou deux pour indiquer que de nouveaux membres continuent de rejoindre
la communauté et que les échanges démarreront dans quelques jours. Ainsi, l’attente sera
perçue comme positive, car une grande partie des participants sait, intuitivement, que
plus il y a de monde dans la communauté, plus elle sera visible et les échanges seront
variés.

Exemple

Message d’attente pour les premiers inscrits à la communauté
Bonjour à tous,
Merci de vous être inscrit sur ce nouveau groupe sur . D’autres personnes sont
en train de nous rejoindre. Encore un peu de patience et nous devrions pouvoir démarrer
nos échanges d’ici .
Amicalement,


Présentations des membres sur la liste
Il s’agit de la dernière étape pour lancer ou développer votre groupe. La première
discussion dans le groupe n’a pas pour but d’inciter le plus grand nombre de personnes
possible à contribuer87. Une personne qui s’est déjà exprimée dans un groupe aura bien
plus de chance de contribuer lors des autres échanges. Habituellement, il y a entre 10 et
20 % de personnes qui réagissent lorsqu’on pose une question. En posant la simple
question « qui êtes-vous ? », l’objectif est d’avoir environ 40 % du groupe qui répond. Ce
tour de table permet de se présenter88, d’aider le plus grand nombre à contribuer une
première fois et à donner le ressenti qu’il y a du monde dans le groupe.
Un autre intérêt de commencer par une discussion très simple est de donner, dès le
départ, de bonnes habitudes en incitant, en particulier les contributeurs, à faire des
messages courts.
Pour amorcer la pompe, vous pouvez aussi sélectionner une dizaine de « complices ».
Vous allez leur écrire en direct, en dehors de la liste ou du groupe Facebook. Vous allez
87. Même si vos membres ont rempli un profil complet pour s’inscrire dans votre groupe (ou disposent d’un profil Facebook, par exemple),
se présenter en quelques lignes est très utile pour aider à passer le cap de la contribution.
88 Même si vos membres ont dû remplir un profil complet pour s’inscrire dans votre groupe (ou disposent d’un profil Facebook ou autre),
se présenter en quelques lignes est très utile pour aider à passer le cap de la contribution.

129

demander aux complices de se présenter sur la liste immédiatement après que vous avez
envoyé le message demandant à tous les membres de le faire. Grâce à ces premières
réponses, les autres membres auront tendance à se présenter à leur tour. En général, dès
que l’on atteint une dizaine de réponses, les participants ont l’impression qu’il y en a
beaucoup. Il est toujours difficile d’être le premier à prendre la parole, mais on a tendance
à se jeter à l’eau lorsque nombreux sont ceux qui l’ont déjà fait.

Exemple

Un message pour les complices
Objet : Besoin de ton aide
Bonjour 
Tu fais partie de ceux qui ont montré un intérêt pour le groupe . Je
vais lancer dans les prochains jours un tour de table de présentation. J’ai besoin de ton
aide.
Peux-tu répondre au message que je vais envoyer bientôt au groupe, et te présenter
(qui tu es, ce que tu attends du groupe et, éventuellement, ce que tu peux lui apporter) ?
Un simple paragraphe suffit. Cela serait très utile pour aider à amorcer les premières
réactions.
Amicalement,


Exemple

Message de lancement du tour de table
Ce mail comprend deux parties : le lancement du tour de table lui-même, qui doit
rester court, et une partie qui donne quelques conseils pour participer.
Objet : Démarrage des échanges dans le groupe
Bonjour à tous,
Bienvenue à ceux qui nous ont rejoints sur ce groupe . Nous sommes
maintenant .
Je vous propose de jeter un œil sur le fonctionnement du groupe en bas de mail pour
vous aider à participer et, dès maintenant, de vous présenter en trois ou quatre lignes,
simplement en répondant à ce mail.
130

J’en profite pour me présenter moi-même : [présentez-vous avec vos attentes,
l’ensemble en un paragraphe].
Amicalement,

________________________________________________________________

Fonctionnement de la communauté «  »
qui rassemble les acteurs francophones pour 
• Pour envoyer un mail à tout le monde il vous suffit d’écrire à .
• Si vous répondez à un mail envoyé sur la liste, vous partagerez votre réponse avec
tous les membres, ce qui nous permet de discuter tous ensemble.
Pour faciliter le fonctionnement, je vous propose quelques règles simples :
1— Gardez vos mails courts, un ou deux paragraphes, et vérifiez que l’objet du mail
correspond bien au contenu.
2— Pas besoin de répondre que vous avez bien reçu le mail, car, si tout le monde le fait,
cela ferait beaucoup de mails en plus.
3— Si un message concerne juste une seule personne, mettez son mail dans le champ
« destinataire » plutôt que le mail de la liste du groupe.
Nous avons également un site  et nous organiserons
régulièrement des rencontres en ligne et, je l’espère, de temps en temps en présentiel
aussi.
Quelques principes pour que notre communauté s’enrichisse de notre diversité :
• soyez bienveillant et bientraitant ;
• adoptez une écoute apprenante ;
• partagez avec sincérité.

131

C’est parti !
Une fois que vous avez dépassé la centaine de participants et effectué le premier tour
de table, le groupe est maintenant prêt au travail. Souvent, de nouvelles personnes
continuent de se présenter alors que les véritables échanges ont commencé. C’est normal,
car au fur et à mesure que les participants voient que de plus en plus de personnes se
présentent et contribuent, il y a une certaine pression qui les incite à se présenter à leur
tour. D’autres ne se présenteront pas. Il est important alors, dans les messages
d’animation, de faire comprendre que l’on ne doit pas se sentir coupable de ne pas avoir
participé, car dans un grand groupe, la non-participation est la norme, mais que ceux qui
veulent apporter une idée, même simple et à n’importe quel moment, sont les bienvenus,
qu’ils aient ou non contribué auparavant.

132

Partie III

Faire vivre la
communauté

133

—1—
La vie du groupe semaine après semaine

Ce chapitre s’adresse plus particulièrement aux
facilitateurs. Nous allons y voir comment faire pour
que la communauté reste active, grâce à quelques
actions qui vous prendront un temps minimum. Il
intéressera aussi tous ceux qui ont un rôle actif au
sein de la communauté et qui souhaitent donner un
coup de main au facilitateur lorsque cela est
nécessaire. Nous partons du principe que votre
communauté est organisée avec plusieurs projets
collectifs ouverts, suffisamment de participants — dont une part significative s’est déjà
présentée, à travers l’outil de discussion, en établissant son profil en quelques lignes — et
que les quatre activités de la communauté ont été mises en place (fil d’information,
rencontres, discussion entre les rencontres et espace de partage).

Rendre la communauté naturellement active
Pour que la communauté se développe au travers des projets et des échanges entre les
membres de la communauté, le facilitateur doit s’assurer de trois choses.
Tout d’abord, il est important que les participants reçoivent au moins un message par
semaine et pas plus de quelques messages par jour. Assurez-vous qu’au moins un message
soit envoyé chaque semaine sur l’outil de discussion. Si ce message concerne
l’avancement d’un des projets, cela va donner l’image d’une communauté où « il se passe
des choses » et incitera d’autres acteurs à donner des informations qui leur semblent
pertinentes, à faire de la veille, à demander de l’aide, voire même à lancer un nouveau
projet. Ce simple message va créer progressivement un cercle vertueux. Pour que cela ait
encore plus de poids, proposez au référent du projet concerné de l’envoyer lui-même.
Vous enverrez des messages vous-même seulement lorsque aucun porteur de projet
134

n’aura pas pu en envoyer dans la semaine. Néanmoins, votre rôle n’est pas que chaque
projet avance. C’est la responsabilité des porteurs de projets. Si un projet s’arrête, c’est
regrettable, mais pas déterminant pour la communauté. Vous allez chercher à contacter
tous les référents de projet, mais ne perdez pas un temps inutile avec ceux que vous ne
pouvez pas joindre. Focalisez-vous sur les projets qui avancent bien, cela peut aider les
autres à devenir plus actifs.

Pour en savoir plus

Des messages, ni trop ni trop peu...
Au moins un message par semaine, mais évitez d’en avoir trop !
Le nombre de messages acceptable diffère selon les communautés. Certaines, très
militantes, tolèrent de très nombreux messages. Dans le cas général, pour une
communauté qui rassemble des personnes diverses, pas forcément militantes, le
maximum varie d’un à quelques messages par jour. Il est possible de dépasser ce seuil
durant des pics temporaires d’activité, en annonçant à l’avance la durée de cette période,
par exemple, lors de la phase de présentation des membres de la communauté ou encore
lors d’un débat. Dans certains cas spécifiques, par exemple avec des chefs d’entreprise qui
ne souhaitent pas échanger entre eux, mais qui utilisent la communauté pour prendre et
livrer des informations, le nombre maximum de messages peut chuter à un ou deux par
semaine.
Procédez par approximations successives pour trouver le nombre de messages à ne pas
dépasser par semaine. Si vous questionnez les participants sur le nombre de messages
qu’ils peuvent accepter, ils auront tendance à fournir un chiffre faible par peur d’être
surchargés. De même, dès qu’une personne demande à se désinscrire du fait du trop
grand nombre de messages qu’elle reçoit, cela n’est pas forcément représentatif. En effet,
certains préféreront être en dehors de la discussion en ligne tout en suivant régulièrement
ce qui se passe dans le groupe à travers le fil d’information.
Lorsqu’il est nécessaire de limiter le nombre de messages échangés dans le groupe,
vous pouvez proposer que les discussions sur un projet particulier se fassent seulement
entre les membres du projet plutôt qu’avec toute la liste. Le référent du projet continuera
de présenter l’avancement à l’ensemble de la communauté une fois par mois au moins.
S’il s’agit d’une discussion plus générale qui concerne toute la communauté, mais qui
135

prend de l’ampleur, vous pouvez proposer d’introduire cette discussion sur un autre outil,
par exemple un forum. Bien que les outils pull, comme les forums, soient moins efficaces
que les outils push, il est possible de proposer une synthèse hebdomadaire de la
discussion.
À l’exception des discussions qui s’emballent, les échanges dépassent rarement le
nombre de messages acceptable : prochaines rencontres, comptes rendus, avancement
des projets et quelques informations de veille et demandes d’aide.

Deuxième point important, le facilitateur doit s’assurer que les rencontres aient lieu
régulièrement, généralement une fois par mois, et veiller à ne jamais annuler deux
rencontres successives. Même si elles ne rassemblent qu’un petit pourcentage des
membres de la communauté (typiquement 10 % de la communauté), ces rencontres ont
un effet très stimulant sur les plus actifs. Les membres peuvent également prévoir une
rencontre ponctuelle ou annuelle plus importante pour rassembler le plus possible de
participants de la communauté et même accueillir d’autres personnes au-delà de la
communauté. Une telle rencontre pourra être traitée comme un projet collectif au sein de
la communauté.
La troisième et dernière mission du facilitateur consiste à s’assurer que le fil
d’information et l’espace de partage soient mis à jour régulièrement, et tout
particulièrement au cours d’une étape importante de l’évolution de la communauté, par
exemple, lorsqu’on veut mettre au point un nouveau descriptif pour la communauté ou
lorsqu’un nouveau projet naît. La première chose dont on s’occupe généralement, c’est le
fil d’information, souvent au détriment de l’organisation de rencontres et de discussions
entre les rencontres. Si vous avez peu de temps, consacrez-le en priorité à ces dernières. Si
le fil d’information n’est pas mis à jour régulièrement, ce n’est pas vital pour la
communauté. Bien sûr, si un community manager, un blogueur, un journaliste ou vousmême avez du temps à consacrer au fil d’information, cela sera bénéfique au
fonctionnement de la communauté.

Pour en savoir plus

Nouveaux projets, anciens projets et projets qui aboutissent
Durant la vie de la communauté, certains projets vont se lancer, d'autres s'arrêteront
soit parce qu'ils ont terminé leur tâche, soit par essoufflement. Que faire dans ces cas là ?
136

Lorsqu'un nouveau projet se lance, vous allez ajouter une ligne à votre feuille de suivi.
N'oubliez pas de demander le mail, le téléphone et éventuellement d'autres moyens de
joindre le référent du projet. Vous allez également ajouter une page spécifique au projet
accessible depuis la partie « actions et projets en cours » de l'espace de partage. Vous
pouvez créer une nouvelle page de préférence dans un traitement de texte en ligne ou un
pad afin que les participants au projet puissent contribuer très facilement.
Lorsqu'un projet se termine, déplacez la ligne concernée dans votre feuille de suivi,
pour la placer plus bas. Cela vous permettra de distinguer les projets en cours que vous
suivrez régulièrement des projets terminés mais dont vous conservez les coordonnées des
référents au cas où. Le lien vers la page de travail de ce projet qui se trouvait jusqu'à
présent dans la partie « actions et projets en cours » pourrait être déplacé pour être
placée par exemple dans une nouvelle page qui liste les « anciens projets » (cette page «
anciens projets » pourrait être accessible grâce à un lien depuis la page d'accueil, par
exemple juste en dessous de l'espace « actions et projets en cours ».
Parfois les projets aboutissent à un résultat qui donne lieu à un document (un guide
pratique, un compte rendu d'événement, etc.). Ce dernier, qui aura pu être préparé grâce
à la page de travail du projet pourra, une fois finalisé, être rendu accessible depuis
l'espace « ressources » de la communauté. Il pourra également faire l'objet d'une
information au sein du groupe mais aussi en dehors, afin de le valoriser au mieux. Une fois
ce résultat obtenu, le projet peut se terminer s’il n'a rien d'autre à faire, ou bien continuer
à produire d'autres résultats qui pourront être à leur tour diffusés.

Rien n’empêche que vous décidiez de vous investir dans d’autres rôles au sein de la
communauté : lancer un projet, animer des rencontres, alimenter le fil d’information ou
encore attraper tout ce qui peut être utile à la communauté. Mais avant toute chose,
consacrez une heure par semaine pour les trois actions de votre rôle de facilitateur ! C’est
le secret qui permettra à votre groupe de se développer naturellement, semaine après
semaine.

137

Pour en savoir plus

Comment inciter de nouveau participants à participer
Si vous avez réussi votre premier tour de table, vous avez environ quarante pour cents
de vos participants qui auront contribué une première fois et auront ainsi plus de facilité à
réagir aux discussions dans votre groupe. Mais comment faire par la suite pour que
certains qui ne sont encore jamais intervenus osent passer le cap à leur tour ?
Une bonne technique est de profiter de nouveaux inscrits dans le groupe. A n’importe
quel moment, lorsque vous avez quelques personnes nouvelles, vous pouvez leur
souhaiter la bienvenue publiquement dans le groupe et leur proposer de se présenter en
un paragraphe (vous pouvez vous inspirer du premier message de lancement du tour de
table). Indiquez également que ceux qui ne l’ont pas encore fait peuvent en profiter pour
se présenter. Lorsque le groupe est actif, beaucoup de participants qui sont restés
observateurs ne se sentent pas à l’aise de ne pas contribuer mais ne savent pas comment
intervenir une première fois alors qu’ils ne sont pas encore connus du groupe. En les
incitant à se présenter avec les nouveaux, vous leur tendez une perche que certains seront
ravis de saisir.

Une heure par semaine, le secret de la réussite !
Contacter chaque semaine un ou deux référents de projet, s’assurer qu’il envoie bien
un message d’avancement au reste de la communauté, vérifier qu’une date de prochaine
rencontre a bien été fixée ou faire le nécessaire pour qu’elle le soit, vérifier que l’espace
de partage et le fil d’information sont alimentés, tout cela ne vous prendra qu’une heure
par semaine, mais une heure toutes les semaines. Quelles sont les conditions qui vont
vous permettre de libérer une heure par semaine pour vous consacrer à ce rôle ?
Tout d’abord, choisissez un moment de la semaine propice et dont vous pensez pouvoir
le dédier entièrement à cette mission. À cette date, qui sera notée dans votre agenda,
mais pas dans ceux de vos interlocuteurs, vous prendrez l’initiative de contacter les
référents projet, généralement par téléphone, et l’ensemble de la communauté à travers
l’outil de discussion en ligne. Comme pour tout événement de votre agenda, il peut arriver
un imprévu. Vous devez alors décaler ce « rendez-vous avec la communauté » sans
l’annuler, sauf cas de force majeure. Si vous savez que vous ne pourrez pas assurer votre
138

rôle pendant une période ou même définitivement, il est de votre responsabilité de
trouver au sein de la communauté quelqu’un qui pourra vous remplacer temporairement
ou définitivement.

Exercice individuel

Démarrer votre rôle de facilitateurs

1— Définissez quel jour et quelle heure de la semaine vous allez exercer votre mission
de facilitateur de la communauté.
Jour et heure de mon rendez-vous hebdomadaire avec la communauté :
_______________________________________________________
2— Inscrivez ces dates sur votre agenda et si vous connaissez déjà vos périodes
d’indisponibilité, décalez les dates qui coïncident.
3— Vérifiez que vous avez tout ce qu’il vous faut pour commencer votre rôle :
• Vous avez la feuille de suivi, le nom, mail et téléphone de chaque référent de projet.
• Vous avez déjà envoyé au moins un premier message à l’ensemble de la
communauté, par exemple votre présentation.
• Vous savez vous servir des outils : ajouter une date sur l’agenda, faire un sondage de
date, ajouter et retirer une personne de la liste de discussion, ajouter une information,
ajouter une page pour un nouveau projet sur l’espace de partage, etc.
4 — Identifiez une personne qui pourra vous remplacer si nécessaire.
Nom de mon remplaçant occasionnel : ______________________________

139

Pour faire avancer les choses

Un tableau de bord pour les communautés
Plusieurs indicateurs de l'activité du groupe pourraient être relevés automatiquement
pour donner au facilitateur ou à ceux qui les aident dans l'écosystème des points sur
lesquels se concentrer (par exemple sous la forme d'un feu vert, orange ou rouge). Un
nouveau défi pour les développeurs :
pour le fil de discussion : dernier message de moins d'une semaine (vert), moins d'un
mois (orange) ou plus (rouge) ;
pour la discussion en ligne : dernier message de moins d'une semaine et avant dernier
de plus d'un jour (vert), dernier message entre une et deux semaines ou entre 2 et 3
messages max dans une journée de la semaine (orange) ou autre (rouge) ;
pour les rencontres : une prochaine date est placée dans l'agenda (vert), pas de
prochaine date fixée et dernière date datant de maximum un mois (orange) ou autre
(rouge) ;
pour l’espace de partage : dernière mise à jour il y a moins d'un mois (vert), deux mois
(orange) ou plus (rouge) ;
pour le facilitateur : dernière mise à jour de la feuille de suivi il y a une semaine ou
moins (vert), moins de deux semaines (orange) ou plus (rouge) ;
Pour chaque projet : dernier mail du référent il y a un mois ou moins (vert), deux mois
(orange) ou plus (vert) ;
Les seuils (vert, orange ou rouge) pourraient être ajustables en fonction des groupes. Il
serait également intéressant d'avoir une vue sur une communauté pour le facilitateur ou
sur plusieurs pour ceux qui aident les facilitateurs qui le souhaitent au sein de
l’écosystème de communautés.

140

—2—
Identifier les moments clés du groupe

Maintenant que votre communauté est organisée et
fonctionne, elle va connaître des moments particuliers,
parfois des périodes difficiles à vivre. Il est possible de
faciliter considérablement le passage de ces moments
clés à condition de bien les comprendre et de savoir les
partager avec le reste du groupe.
La

méthode

dite

« ICE »

permet

d’identifier

rapidement certaines déficiences dans une communauté. Vous pouvez l’utiliser pour faire
le point de la situation avec votre communauté ou pour effectuer la première analyse
d’une nouvelle communauté :
— I pour Implication. Avez-vous quelques personnes qui s’impliquent (porteurs de
projets, facilitateur, etc.) ?
— C pour Communs. Avez-vous des communs89 accessibles, par exemple sur votre
espace de partage (définition du groupe, règles de fonctionnement, valorisation des
productions, etc.) ?
— E pour Échanges. Avez-vous des échanges à tous les niveaux (entre les plus actifs qui
participent aux réunions et le reste de la communauté, avec l’extérieur du groupe pour
faciliter l’arrivée de nouveaux membres, etc.) ?

Le diagnostic de la situation plutôt que celui des personnes
Ce qui est en jeu ici se situe le plus souvent à l’échelon du rôle plutôt que des
personnes qui le portent. Vous êtes vous-même probablement proactif, réactif,
observateur et inactif, selon les groupes dont vous faites partie. Une personne peut avoir
des prédispositions pour endosser telle ou telle fonction, mais peut, si nécessaire, se
charger de n’importe quelle autre mission. J’ai vu ainsi des spécialistes de la coopération

89. Les communs sont des informations ou des biens « qui peuvent servir à tout le monde ».

141

devenir, sans s’en rendre compte, « leader négatif » lorsque le groupe était confronté à
une crise, et d’autres, plus habitués à détruire qu’à construire, prendre pourtant un rôle
important dans la reconstruction d’un collectif. Nous jouons, parfois sans nous en rendre
compte, à des jeux psychologiques où nous nous plaçons, tour à tour, dans le rôle
d’accusateur et de victime90. Tout est une question de contexte, et de rôles que nécessite
le contexte.

Pour en savoir plus

Les rôles tournants dans le triangle de Karpman
Un des cas les plus spectaculaires de dissociation des rôles et des personnes est celui où
trois personnes se retrouvent dans une situation conflictuelle. Si l’une a le rôle de
bourreau et l’autre le rôle de victime, la troisième peut prendre le rôle de sauveur. Mais
ces rôles symboliques peuvent s’inverser : le sauveur devient bourreau, le bourreau
victime et ainsi de suite. On parle, en analyse transactionnelle, de « triangle dramatique »
ou de « triangle de Karpman91 ».
Vous pensez sans doute pouvoir être lucide si cela vous arrive et capable de gérer la
situation ? Dans le cadre de situations singulières, je me suis retrouvé plusieurs fois dans le
rôle de sauveur, de victime et de bourreau. Lorsque cela vous arrive et que vous en prenez
conscience, il est délicat d’expliquer que vous avez agi en bourreau dans le cadre d’un rôle
que vous avez rempli inconsciemment. Si certains interprètent ce rôle comme étant la
révélation de votre vraie nature, vous basculerez aussitôt de l’état de toujours volontaire
et coopératif, à celui de « vilain canard » ! Apprenez à séparer et à faire la distinction entre
le rôle et l’individu qui se cache derrière et, quel que soit le rôle, sachez qu’un jour vous
l’endosserez à votre tour. Cherchez à comprendre les rôles comme indicateur d’une
situation plutôt que comme révélateur d’une personne.

Lorsque nous rencontrons une personne pour la première fois, nous avons l’habitude
de lui demander « ce qu’elle fait dans la vie », pour lui attribuer un rôle, une étiquette. Le
nier ne ferait qu’affaiblir notre capacité d’analyse. Notre mode de pensée et nos habitudes
nous conduisent à vouloir fournir des réponses accompagnées de jugements (l’étiquette
est parfois trompeuse), avant même de comprendre ce qui se passe dans le groupe. Nous
90. Voir l’extrait du film Oui, mais… (Yves Lavandier, 2001), https://frama.link/anim1h-ouimais
91. Cf. l’article de Stephen Karpman, « Fairy Tales and Script Drama Analysis », Transactional Analysis Bulletin, vol. 7, n° 26, pp. 39-43,
1970, disponible en ligne : https://www.karpmandramatriangle.com/pdf/DramaTriangle.pdf

142

allons donc devoir prendre conscience de notre premier jugement sur les personnes, puis,
dans un second temps, chercher à identifier les rôles et en quoi ils sont révélateurs d’une
situation particulière dans le groupe. Essayons si possible également, comme nous l’avons
vu, de ne pas conserver notre jugement sur les personnes à partir du rôle qu’elles ont
endossé92. Cela est particulièrement difficile à faire tant notre inconscient est conditionné
à juger le plus rapidement possible puis à rechercher uniquement les informations qui le
confirment. “Notre mode de pensée et nos habitudes nous conduisent à vouloir donner
des réponses souvent accompagnées de jugements, avant même de ressentir et
d’entendre entre nous et à l’intérieur de nous ce qui se passe dans le groupe93”.

Identifier les six moments clés dans un groupe
Lorsque survient une situation particulière, la première étape est d’être capable de la
reconnaître et de la qualifier. Il existe de nombreux cas de figure, mais nous allons
analyser les plus courants avec, à chaque fois, des indicateurs qui permettent de les
identifier. Les rôles nous seront très utiles pour repérer ces moments clés et pour en
cumuler plusieurs.
1— L’essoufflement. Après l’euphorie du démarrage ou du redémarrage du groupe, les
idées se retrouvent confrontées au réel et le soufflé a des chances de retomber. Même
lorsque la synergie entre équipes projet et communauté fonctionne bien, certains projets
s’essoufflent, sans contaminer la communauté pour autant. Il restera suffisamment de
projets pour susciter une image positive et active de la communauté. Cependant, même
avec une organisation irréprochable, l’activité de la communauté peut présenter un creux.
Par exemple, lorsque l’indicateur du nombre de participants aux rencontres régulières est
en baisse. Cette phase est tout à fait normale. Si elle est identifiée comme telle, la baisse
de participation ne devrait pas s’accentuer trop. Comprendre qu’il s’agit d’une période
provisoire permet de s’armer de patience et de persévérer.
2— La vague de désabonnements. Lorsque le groupe a subi une baisse d’activité et qu’il
redémarre ensuite, certains peuvent se désabonner et cela peut inciter d’autres membres
à faire pareil. Même s’il existe un lien direct qui permet à ceux qui le souhaitent de se
92
On
parle
de
biais
de
confirmation
(et
plus
précisément
de
“persistance
https://fr.wikipedia.org/wiki/Biais_de_confirmation
93 Ivan Maltcheff, “les nouveaux collectifs citoyens - pratiques et perspectives”, éditions Yves Michel, 2011

des

croyances”)

:

143

désinscrire, certains membres le feront quand même à travers l’outil de discussion en
ligne, en adressant une demande visible de tous. Pour éviter la contamination, répondez
publiquement à la demande de désabonnement. Indiquez dans votre message que vous
allez procéder à sa désinscription, mais qu’il est préférable que ceux qui souhaitent se
désabonner le fassent à partir du lien indiqué en bas du mail. Ensuite, désinscrivez la
personne et modérez les messages pendant quelques jours pour ne laisser passer que
ceux qui concernent le groupe.
3— La crise d’adolescence du groupe. La plupart des groupes s’appuient au départ sur
un ou quelques fondateurs qui ont un rôle central. On peut assimiler un groupe à un être
collectif qui passe par différentes étapes d’évolution. Tout comme pour les humains, le
groupe doit construire sa propre personnalité avant d’atteindre sa propre autonomie
(phase adulte). Pendant les premiers mois de leur développement — de dix-huit à vingtquatre mois —, les groupes sont sous la coupe de leurs fondateurs. On parle alors de
« groupe enfant94 ». Après cette phase, le groupe est confronté à une période de crise.
Cette « crise d’adolescence » est une phase difficile, mais nécessaire. Elle est marquée par
l’émergence d’un leader « négatif » (il s’agit du rôle et non pas de la personne), ou par une
coalition contre le leader ou les animateurs. Cette phase délicate doit permettre de
conserver l’historique et les valeurs initiales du groupe et de l’ouvrir vers de nouvelles
évolutions, indépendamment du leader. On peut détecter cette période de crise à travers
les déclarations de mécontentement du leader : s’il déclare que « personne ne fait rien »,
le groupe est au stade enfant ; s’il se plaint que « personne ne l’aime », le groupe est
adolescent et s’il annonce qu’« il ne sert plus à rien », le groupe est alors adulte. Le
chapitre suivant donne des pistes pour traiter ces moments particuliers.
4— La transmission des tensions. Des tensions se profilent à l’occasion d’une nouvelle
phase dans l’évolution du groupe, d’autres émergent des échanges, des avis différents lors
d’une confrontation, ou encore viennent de l’extérieur. Les tensions se transmettent et
mutent rapidement, comme des virus, à tel point que l’on ne pourrait plus en identifier
l’origine. Par exemple, si un des membres de la communauté a des difficultés
personnelles, son comportement va être influencé par ses propres tensions, qu’il va

94. Certains groupes restent longtemps sous la coupe de leurs fondateurs. On les nommera ironiquement « groupes Tanguy », en référence
au film éponyme d’Étienne Chatiliez, 2001.

144

ensuite transmettre à d’autres membres95. La source apparente du conflit sera différente
de la véritable cause de tension qui, elle, est extérieure au groupe. Ceux qui subissent ces
tensions peuvent, à leur tour, les transmettre, etc. Il faut donc repérer l’existence de ces
tensions, stopper toute activité pour ne pas les alimenter, et ensuite les traiter. Il existe
plusieurs façons de traiter des tensions. La violence ou la fuite, inscrites dans notre
cerveau reptilien — siège de nos instincts que nous utilisons lorsque nous sommes en
danger — ne donnera pas ici de bons résultats. D’autres stratégies plus efficaces peuvent
être proposées par des personnes suffisamment extérieures aux échanges, telles que la
médiation, la communication non violente, le rire, la bienveillance, les excuses et même la
gratitude pour ce qui a été accompli auparavant.
5— Le troll sort du bois. On qualifie de « troll » celui qui génère des polémiques. Il y a là
une provocation intentionnelle dans le but de nuire, ce qui le différencie des cas
précédents96. Dès qu’un troll est identifié, les arguments rationnels n’aideront
malheureusement pas à résoudre le problème. Une des pistes consiste à l’ignorer ou à
« ne pas le nourrir », c’est-à-dire ne lui fournir aucune matière à polémique (« Don’t feed
the troll ! »). Cette méthode n’est pas toujours infaillible, car, si le troll se sent ignoré ou
insatisfait, il aura tendance à vouloir renflammer la discussion97.
6— Le départ d’un rôle clé. Il est tout à fait normal qu’un membre de la communauté,
même parmi les plus actifs, s’éloigne au bout d’un certain temps. Cela peut être dû à la
lassitude, à des divergences avec le reste de la communauté, ou tout simplement à des
raisons personnelles. Si la personne qui s’en va cumule plusieurs rôles, la situation peut
être critique et le créateur peut vite devenir le fossoyeur de son propre groupe. Lorsque
les rôles sont mieux répartis, la situation peut être plus facile à gérer. Le départ d’un
leader, s’il est peu impliqué dans le groupe, peut faire perdre un peu de légitimité, mais
pas plus. Le départ d’un porteur de projet peut parfois signer la fin de son projet, mais la
communauté n’en souffrira pas trop si elle en a d’autres. Avec l’organisation que nous
avons proposée, le seul départ qui peut être dangereux pour la communauté est celui du
facilitateur, qui assure le suivi de l’ensemble des projets et des actions. Il est donc

95. La mémétique est un concept proposé par Richard Dawkins, qui a étudié des éléments de culture, les « mèmes », selon une évolution
darwinienne étendue. Un mème peut être une idée, une rumeur, une mode ou une tension. (Source : Wikipédia.)
96. On a tendance à confondre troll, leader négatif et individu ayant ses propres tensions.
97.
Voir
l’article
« Comment
réussir
à
ne
pas
faire
taire
Casse-Bonbons »
sur
http://vadeker.net/articles/cyberculture/comment_reussir_a_ne_pas_faire_taire_Casse-Bonbons.html

145

impératif que le facilitateur prévienne le groupe s’il ne souhaite ou ne peut plus assumer
son rôle, temporairement ou définitivement, afin que la communauté puisse lui trouver un
remplaçant. De ce point de vue, la bonne volonté de celui qui part facilite fortement la
transition. Le départ d’un membre ayant un rôle d’animation associé à l’un des cas de
tension décrits précédemment doit être traité avec beaucoup d’attention, si possible avec
l’ensemble du groupe.

Partager le diagnostic avec le reste du groupe
Le diagnostic est difficile à partager avec le reste du groupe, car la conscience de
chacun est affaiblie du fait des tensions. Quelques personnes extérieures peuvent avoir le
recul nécessaire pour analyser la situation. Mais les protagonistes refuseront
catégoriquement les diagnostics proposés, quitte à avancer des arguments totalement
irrationnels.
La nature a doté les animaux — dont l’homme — de deux modes de réaction rapide
pour faire face au danger, avant même d’avoir pu l’évaluer de façon plus complète :
l’attaque ou la fuite98. S’il fallait attendre les quelques secondes que nécessite une
réponse plus analytique par notre cortex préfrontal, nos chances de survie seraient
fortement diminuées. Chez l’homme, ce comportement peut prendre de multiples formes,
par exemple l’agressivité, l’argumentation excessive, ou bien le mutisme, le retrait social
ou la toxicomanie99. D’un autre côté, nous, les humains, avons un avantage de survie assez
particulier : nous ne courons pas vite, nous ne sommes pas forts et nous ne savons pas
voler, mais nous savons faire des alliances jusqu’à douze. Ainsi, les chasseurs-cueilleurs
pouvaient se relayer pour veiller pendant que d’autres dormaient. Cela leur permettait de
réagir suffisamment tôt en cas d’attaque. Mais cet avantage entraîne un nouveau danger :
le risque d’exclusion sociale. En effet, qui dit alliance dit possibilité d’entrer ou de sortir de
cette alliance. Comme dans des sociétés traditionnelles, avec le bannissement, aujourd’hui
encore, dans la société moderne, un exclu peut se retrouver seul et à la rue.
L’exclusion sociale peut conduire à la mort biologique et, plus fréquemment, à la mort
symbolique, un homme perdant sa réputation ou se discréditant auprès du groupe, par
exemple. Dans ce cas, nous utilisons nos réflexes habituels, que sont l’attaque ou la fuite,
deux comportements tout à fait inadaptés. Si l’on s’est trompé, par exemple, le fait de

98. Walter B. Cannon, « Bodily Changes in Pain, Hunger, Fear and Rage », Cornell University, 1915.
99 https://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9ponse_combat-fuite

146

s’excuser serait bien plus approprié pour retrouver la considération du groupe. Mais les
expressions de sociabilité demandent plus de « temps de cerveau ». Parmi les réponses à
court terme face au danger — en plus de l’attaque et de la fuite —, certains font
l’hypothèse de la sociabilité100 comme troisième réponse. Nous ne pouvons adopter des
réactions efficaces que si la tension due au risque est suffisamment faible pour nous
permettre de rester conscient et de faire des choix stratégiques et moins instinctifs. Mais
nous devons reconnaître que la crainte de l’exclusion sociale nous pousse — tous — à des
réactions irrationnelles et inappropriées.
La question n’est donc pas tant de savoir si vous pouvez avoir un comportement
irrationnel d’attaque ou de fuite, mais plutôt de savoir quand. Nous devrions aussi
apprendre à connaître la limite au-delà de laquelle nous allons déclencher une réaction
mal adaptée, d’attaque ou fuite, qui peut se traduire par de l’agressivité, un besoin de
justification, le départ du groupe ou, tout simplement, le mutisme. Si vous acceptez votre
propre limite au stress et au danger, vous accepterez plus facilement celle des autres, qui
peut être plus basse ou plus élevée selon les personnes.

Exercice

Aime-moi ou je te casse la g... !
Deux personnes, a et b, discutent ensemble d’un sujet quelconque ;
— a donne un argument et b en propose un autre ;
— a se rend compte que si l’argument de b est juste, alors le sien doit être faux (ce qui,
contrairement à notre intuition logique, n’est pas toujours vrai101) ;
— a perçoit un danger : s’il dit des choses fausses, b va le rejeter (risque d’exclusion
sociale) ;
— la réaction de a est immédiate : il faut montrer à tout prix à b qu’il a tort ou sortir de
la discussion (attaque/fuite) ;
— évidemment, tout cela s’est passé trop rapidement pour impliquer la conscience
(moins de 400 millisecondes pour chaque réaction) ; notre système nerveux autonome,
responsable des réactions non volontaires, a pris les devants.
100. Bernadette von Dawans, Urs Fischbacher et al. « The Social Dimension of Stress Reactivity: Acute Stress Increases Prosocial Behavior
in Humans », Psychological Science, vol. 23, n° 6, 2012, pp. 651-660.
101. Le philosophe et scientifique américano-polonais Alfred Korzybski s’est demandé, au sortir de la Première Guerre mondiale, comment
nous pouvions faire de telles erreurs. Il a pris conscience que les mécanismes de pensée qui avaient provoqué cette guerre reposaient sur les
postulats de la logique d’Aristote et a proposé une nouvelle logique « non aristotélicienne » : Alfred Korzybski, « Science and Sanity, an
Introduction to Non-Aristotelian Systems and General Semantics » (1re éd. 1933), Institute of General Semantics, 1995.
http://semantiquegenerale.free.fr/doc.htm

147

Moralité : pour éviter d’être rejeté par l’autre, il faut lui en mettre plein les dents !
Notre capacité de réaction face au danger (notre nature), associée à ce que nous avons
intégré de la logique (notre culture), peut faire des ravages.
Pourriez-vous vous rappeler de moments identiques que vous avez vécus avec des rôles
différents :
— Vous êtes c, un tiers qui observe la scène.
— Vous êtes b et vous vous faites opposer des arguments irrationnels, éventuellement
avec agressivité.
— Vous êtes a et vous percevez les arguments de b comme un danger.
Bien sûr, c’est le cas où vous êtes a qui est le plus difficile à se remémorer. C’est
pourtant celui qui vous en apprendra le plus sur votre limite au danger et au stress,
probablement plus basse que vous ne l’imaginez, et sur celle des autres.

Il n’est pas facile de partager une information sur le groupe avec le groupe. Si nous
avons identifié l’endroit exact du nœud qui complique nos relations collectives, nous
n’avons pas proposé pour autant des solutions en accord avec notre nature humaine ou
notre culture. Nous pouvons aider à ce qu’au moins une personne du groupe fasse le bon
diagnostic. Nous pouvons également proposer des méthodes pour que le groupe, une fois
le constat identifié et partagé, puisse trouver ensemble des solutions. Mais nous sommes
assez démuni pour faire en sorte que le diagnostic soit acceptable par le plus grand
nombre, y compris parfois par nous-même.

148

Pour faire avancer les choses

Comment partager sans mettre en danger ?
Pour avancer sur la gestion de la tension dans les groupes, nous pourrions nous
concentrer sur la façon de partager avec d’autres un diagnostic qui implique le rôle qu’ils
jouent sans que cela déclenche une réaction immédiate face au danger perçu d’exclusion
sociale. Une question plus difficile qu’il n’y paraît : tout travail sur soi repousse les limites
du passage en mode « danger », mais ne les supprime pas. De plus, nous ne pouvons pas
faire l’hypothèse que seuls ceux qui auront réussi ce changement personnel pourront
participer au groupe, si nous souhaitons mettre en place une grande communauté. Nous
allons devoir, comme pour les autres méthodes proposées dans cet ouvrage, trouver le
moyen de mettre en place l’environnement favorable qui permettra de contourner cette
difficulté.

149

— 3—
Le fonctionnement de la communauté :
parlons-en ensemble102

Une activité moins facile qu’il n’y paraît
Nous

avons

vu

comment

organiser

une

communauté pour l’animer avec peu de temps.
Cependant, nous nous sommes limités pour cela à
trois des quatre grandes fonctions que peut réaliser
une

communauté :

aider

à

s’approprier

de

l’information ; faciliter l’échange, l’entraide et la
montée en compétence collective ; faciliter le
développement de projets collectifs. La quatrième
grande fonction, que nous avons jusqu’à présent
soigneusement écartée, consiste à développer l’intelligence collective dans l’ensemble de
la communauté. Il ne s’agit plus cette fois d’agir avec quelques personnes (généralement
moins de douze) sous le regard des autres membres de la communauté, mais d’interagir
tous ensemble ou, tout au moins, avec tous les proactifs et les réactifs.
Réfléchir avec plusieurs centaines voire des milliers de personnes qui interagissent
entre elles de façon globale est aujourd’hui possible. Cela nécessite cependant des
méthodes particulières. Nous en avons développé une pour trouver de nouvelles idées
ensemble103 qui a été testée de nombreuses fois104. Il existe également des méthodes
pour prévoir des tendances grâce à un grand groupe qui interagit105. Ces approches sont
extrêmement efficaces, mais pas indispensables pour faire vivre une communauté. Nous

102 Ce chapitre est dédié à Social 3.0, une communauté de soutien aux entrepreneurs en France qui a inspiré et testé la méthodologie
proposée dans ce chapitre. En effet, toutes les méthodes proposées dans les autres chapitres ont été testées plusieurs fois. Même si les groupes
humains ne sont pas une science exacte, elles se sont avérées reproductibles. Pour la question plus complexe du groupe qui discute de luimême, je me suis inspiré des éléments existants puis j’ai cherché à assembler ces pièces de puzzle sous la forme d’un tout cohérent adapté aux
communautés présentées ici. Social 3.0 a montré l’efficacité de la méthodologie proposée. Il restera à la tester dans plusieurs communautés et,
comme pour les autres méthodes, à continuer de l’améliorer...
103. Jean-Michel Cornu, « Comment produire un document à plusieurs centaines de personnes », in « Faire ensemble ! Manuel à l’usage des
animateurs de réseaux collaboratifs », Coop-tic.eu, disponible sur : http://tinyurl.com/produire100.
104. Voir, par exemple, Marika Bernier, Jean-Michel Cornu, « Rapport sur les premiers tests des outils Catalyst avec le groupe Anim-fr »,
septembre 2014, disponible sur http://frama.link/anim1h-catalyst..
105.
Emile
Servan-Schreiber,
Lumenogic
« Intelligence
Is
Collective »,
disponible
sur
http://www.lumenogic.com/www/static/pdf/Intelligence_Is_Collective.pdf.

150

les avons mises de côté jusqu’à présent pour permettre une animation la plus simple
possible. Il existe cependant un thème qui concerne l’ensemble de la communauté et qui
devrait être discuté avec tous les actifs : la communauté elle-même !
Nous avons jusqu’à présent très peu parlé de gouvernance. Cela était intentionnel, car
nous avons cherché à organiser la communauté pour qu’elle n’en ait que très peu besoin.
La gouvernance des projets se fait au sein de leur équipe réduite. Elle n’a que peu
d’impact sur la communauté tant que sa charte ou ses règles de fonctionnement sont
respectées. Quant aux quatre activités propres à la communauté, elles présentent des
enjeux relativement faibles, une fois l’organisation acceptée. Même la réorganisation que
nous avons détaillée dans la deuxième partie peut se faire plus facilement si elle est
déléguée à un petit noyau de départ. Il est bien plus facile de développer une gouvernance
décentralisée dans une équipe de douze que dans un groupe de plusieurs centaines de
personnes !
Cependant, il est utile pour les membres de la communauté de sortir de temps en
temps la « tête du guidon » et de prendre à bras le corps les difficultés rencontrées. Pour
éviter que cela ne prenne un temps considérable, la communauté discutera d’elle-même,
c’est-à-dire de sa propre organisation, au cours d’une réunion, avec un début et une fin.
Cette rencontre sur le groupe pourra être organisée chaque fois qu’une difficulté est
identifiée. Il est bien de prévoir qu’elle se déroule au moins une fois par an.

Traquons les enjeux de pouvoir !
Le pouvoir se définit par « la capacité à produire un effet » (le pouvoir de faire), mais
aussi par « la capacité à commander, à contraindre, à imposer sa volonté106 » (le pouvoir
de décision). Le premier peut être obtenu en participant à un projet, par exemple, le
second peut poser plus de problèmes, en particulier lorsqu’il s’étend à l’ensemble de la
communauté. La première idée consisterait à interdire les enjeux de pouvoir et à exclure
ceux qui ne se conforment pas à cette règle. Mais « chacun d’entre nous influence l’autre,
que nous en soyons conscient ou non, que nous le fassions avec une intention éthique ou
non107 ». Nous pouvons bien sûr essayer de traiter les abus de pouvoir les plus évidents,
mais nous ne pouvons pas aller à l’encontre de la nature humaine en niant la tendance de
chacun à impulser ce qu’il croit être bon pour le groupe ou pour soi-même.

106 Les deux définitions sont données par wiktionaire : https://fr.wiktionary.org/wiki/pouvoir#Nom_commun
107 Ivan Maltcheff, “les nouveaux collectifs citoyens - pratiques et perspectives”, éditions Yves Michel, 2011 - p39

151

Une autre possibilité consiste à diminuer les enjeux de pouvoir. Cette approche a plus
de chance de réduire naturellement les luttes, sans les supprimer totalement. Deux pistes
existent au sein même de l’organisation de la communauté.
— La première s’appuie sur le fait que la majorité des membres se trouve dans une
grande communauté et non dans une structure. Si les deux coexistent, la grande
communauté gérera les opportunités et la petite structure gérera les contraintes. Les
opportunités sont souvent multiples et le choix de les réaliser tient moins d’une décision
collective que de l’envie de quelques personnes de faire le travail. Par exemple, ajouter un
nouvel article sur Wikipédia. Beaucoup d’enjeux seront déportés au sein de la petite
structure, comme l’association Wikimédia qui chapeaute le projet Wikipédia. Le nombre
réduit de personnes concernées, si possible inférieur à douze, permet de conserver notre
capacité de comprendre les enjeux entre chaque protagoniste. Même si cela ne suffit pas
à résoudre les conflits de pouvoir, comprendre ce qui se passe peut certainement y aider.
De plus, si la structure est positionnée non pas au-dessus, mais comme un simple
secrétariat au service de la communauté, le pouvoir au sein de la structure restera limité.
Au pire, la communauté pourra choisir de quitter la structure qui n’aura pas su résoudre
ses problèmes internes, pour s’adosser à un autre secrétariat.
— La seconde piste a trait à la place que prennent les projets collectifs dans
l’organisation de la communauté. Ces derniers nécessitent de nombreux choix et peuvent
conduire les acteurs à influencer ces choix. Il s’agit de cantonner les décisions au sein
d’une petite équipe projet dont la taille reste compatible avec nos capacités cognitives. En
nous focalisant sur la facilitation de développement de projets portés par de petites
équipes, nous n’allons pas résoudre le problème lié aux enjeux de pouvoir, mais nous
chercherons à les extraire de la grande communauté pour les localiser dans de petites
équipes. Si la communauté est organisée pour que chaque projet qui fonctionne lui soit
bénéfique et que chaque projet qui échoue ne la mette pas en danger, alors les difficultés
qui ne pourraient être surmontées par certaines des équipes ne mettront pas en péril le
grand groupe.
Il s’agit donc de cantonner les enjeux de pouvoir à de petits groupes, pas plus de
douze personnes (équipes projet ou secrétariat), pour rester dans les limites de nos
capacités cognitives. Afin de réduire les enjeux de pouvoir, posons-nous deux questions :

152

— Ce que nous souhaitons se traduit-il dans une action concrète ? Si oui, y a-t-il des
volontaires pour la mettre en œuvre ?
— Ce que nous souhaitons se traduit-il par un document (par exemple, une charte) ?
Dans ce cas, y a-t-il des volontaires pour préparer un projet qui sera soumis à la
communauté de façon itérative, jusqu’à parvenir à un résultat acceptable ?
Par exemple :
— Êtes-vous sûr que tout le monde doit être d’accord sur la manière dont certains
organisent les rencontres ? Peut-être qu’il est possible d’avoir plusieurs types de
rencontres organisées par des équipes différentes.
— Accepteriez-vous que certaines actions en direction de la communauté puissent être,
selon vous, imparfaites ? Si vous ne pouvez pas vous y résoudre, peut-être devriez-vous
créer une société qui apporte un « service » aux clients, plutôt qu’une communauté qui
est davantage orientée sur le développement des échanges entre les participants.

Au-delà de nos croyances : les quatre équilibres
« Si l’un a raison, alors l’autre a tort. » Cette idée est inspirée du principe de noncontradiction, proposé par Platon, qui fut repris par Aristote comme nécessité absolue : on
ne peut affirmer à la fois une proposition et sa négation. Dans notre culture, nous sommes
tout particulièrement attaché à la cohérence et à la non-contradiction108. Nous préférons
aller dans le mur plutôt que de risquer l’incohérence ! Mais regardons d’un peu plus près
ce qui nous semble une évidence. Nous comprenons implicitement que deux personnes ne
peuvent pas avoir raison en même temps si elles disent des choses contradictoires. L’une
d’entre elles doit avoir raison et l’autre tort. Et pourtant une affirmation différente n’est
pas forcément une négation. Cela est magnifiquement illustré par la parabole des aveugles
et de l’éléphant109.

La parabole des aveugles et de l’éléphant

108 Jean-Michel Cornu, la tragédie des 3C, http://www.cornu.eu.org/news/la-tragedie-des-3-c
109 Parabole du Jaïnisme, rendue célèbre par le poète américain John Godfrey Saxe au milieu du XIXe siècle. Source, Gérard Huet, The
Sanskrit
Heritage
Dictionary
http://sanskrit.inria.fr/DICO/index.html
cité
par
Wikipédia
:

http://fr.wikipedia.org/wiki/Anekantavada

153

Bien que tous fussent aveugles, six hommes habitant en Inde, très enclins à parfaire
leurs connaissances, allèrent voir un éléphant afin que chacun, en l’observant, puisse
satisfaire sa curiosité.
Le premier s’approcha de l’éléphant et, perdant pied, alla buter contre son flanc large
et robuste. Il s’exclama aussitôt : « Mon Dieu ! Mais l’éléphant ressemble beaucoup à un
mur ! » Le deuxième, palpant une défense, s’écria : « Oh ! Qu’est-ce que cet objet si rond,
si lisse et si pointu ? Il ne fait aucun doute que cet éléphant extraordinaire ressemble
beaucoup à une lance ! » Le troisième s’avança vers l’éléphant et, saisissant par
inadvertance la trompe qui se tortillait, s’écria sans hésitation : « Je vois que l’éléphant
ressemble beaucoup à un serpent ! » Le quatrième, de sa main fébrile, se mit à palper le
genou. « De toute évidence, dit-il, cet animal fabuleux ressemble à un arbre ! » Le
cinquième toucha par hasard l’oreille et dit : « Même le plus aveugle des hommes peut
dire à quoi ressemble le plus l’éléphant ; nul ne peut me prouver le contraire, ce
magnifique éléphant ressemble à un éventail ! » Le sixième commença tout juste à tâter
l’animal, la queue qui se balançait lui tomba dans la main. « Je vois, dit-il, que l’éléphant
ressemble beaucoup à une corde ! »
Ainsi, ces hommes discutèrent longuement, chacun faisant valoir son opinion avec
force et fermeté. Chacun avait partiellement raison, mais tous étaient dans l’erreur.

Le philosophe grec Euboulidès de Milet, adversaire d’Aristote, est connu pour ces
paradoxes philosophiques célèbres, notamment le « paradoxe du menteur110 » : « Un
homme disait qu’il était en train de mentir. Ce que l’homme disait est-il vrai ou faux ? » Ce
qu’il disait ne peut être ni vrai ni faux111 ! De même, comme dans la parabole de
l’éléphant, il y a des affirmations qui peuvent sembler contradictoires, mais qui sont
toutes vraies. On parle alors d’antinomie, notamment lorsqu’on cherche à avoir plusieurs
points de vue différents sur un sujet.
Nous allons étudier quatre groupes de deux affirmations qui nous font tourner en rond
dans les choix collectifs. Pour permettre au groupe d’avancer, nous allons devoir les

110 Un paradoxe qui aurait été inventé à partir du paradoxe du crétois de Epiménide. Source Wikipédia :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Paradoxe_du_menteur
111 S’il ce qu’il dit est vrai alors il est en train de mentir en disant qu’il ment donc il dit la vérité : ce qu’il dit (“je mens”) ne peut alors pas
vrai. Si ce qu’il dit est faux alors il ne ment pas, mais alors cela veut dire qu’il ne dit pas la vérité en disant “je mens” et donc… qu’il ment… Sa
phrase ne peut tout autant pas être fausse !

154

dépasser, chacune en ne donnant l’exclusivité à aucune des deux affirmations, mais plutôt
en cherchant à trouver un équilibre entre elles112.
Premier équilibre : priorité à l’humain ou priorité à la cause. Le militantisme dans notre
culture est caractérisé par un sens du sacrifice que l’on retrouve dans de nombreuses
traditions (judéo-chrétienne, marxiste, etc.). Si la défense d’une cause est tout à fait
louable, elle a parfois conduit à oublier d’autres aspects plus tournés vers l’humain : la
bienveillance, y compris par rapport aux contradicteurs, l’acceptation d’une part
d’imperfection, etc. Cette difficulté a conduit de nombreux groupes pourtant portés par
de belles intentions, au dogmatisme, l’intolérance113 et, parfois, jusqu’à la destruction du
collectif. Il faut trouver un équilibre ensemble entre « notre part du Colibri114 » au service
d’une cause et la prise en compte bienveillante des imperfections humaines.
Deuxième équilibre : ce que l’on dit ou ce que l’on fait. Normalement, tout le monde
devrait être cohérent : faire ce que l’on dit et dire ce que l’on fait. C’est effectivement une
direction à suivre au mieux, mais cette affirmation ne prend pas en compte un point
crucial : nous ne sommes pas parfait ! La difficulté est amplifiée par une autre limitation de
l’être humain. Chacun voit mieux les incohérences de l’autre que les siennes. Au contraire
même, il va chercher à se justifier en allant jusqu’au ridicule s’il le faut, pour démontrer
que toute sa démarche est cohérente. Ce problème est bien connu en psychologie sous le
nom de biais de confirmation115. Nous devons tendre vers le maximum de cohérence
possible en toute bonne volonté. Mais nous devons également reconnaître que nousmême, tout comme nos interlocuteurs, sommes des humains et donc avec une cohérence
imparfaite ! Il faut trouver un équilibre entre la recherche de cohérence entre ce que l’on
dit et ce que l’on fait et l’acceptation que ni nous ni les autres n’y arrivons parfaitement.
Troisième équilibre : identité et évolution. L’ensemble de l’univers est à la recherche
d’un équilibre entre évoluer pour s’adapter et conserver son équilibre. C’est vrai aussi bien
pour les étoiles, les êtres vivants… ou les groupes. La cellule, qui est généralement
considérée comme le plus simple des êtres vivants, dispose d’une membrane perméable.
Le fondement même de la cellule est de « séparer les eaux » : la mise en place d’une
membrane distingue l’extérieur et l’intérieur. Cela permet de maintenir au sein de la
112 Certaines de ces doubles affirmations décrivent deux choses nécessaires, d’autres présentent la différence entre l’idéal et ce que nous
permettent les limites de notre condition humaine.
113 Enquête sur le militantisme par Débora Nunes et Ordep Serra, présentée au Dialogues en Humanité 2009 et 2010 et citée par Ivan
Maltcheff, ibid.
114 Voir la légende du Colibri qui fait sa part à son niveau pour éteindre l’incendie de la forêt, présentée par Pierre Rabhi :
http://www.colibris-lemouvement.org/colibris/la-legende-du-colibri
115. On parle de « biais de confirmation » lorsqu’on privilégie les informations qui confirment nos idées ou nos hypothèses et que l’on
accorde moins de poids à celles en notre défaveur.

155

cellule plusieurs paramètres autour d’un équilibre bénéfique pour l’ensemble du système.
Ce phénomène s’appelle l’homéostasie. Mais la membrane doit être perméable, car sans
entrées et sorties la cellule ne peut s’adapter et ainsi survivre. Il faut construire un
équilibre entre préservation d’une part, suffisante d’identité et ouverture à l’évolution et à
l’adaptation.
L’équilibre du fonctionnement : objectifs ou limites. Il y a deux approches pour réguler
le fonctionnement d’un groupe. La première consiste à fixer des règles à respecter (charte,
règlement intérieur, etc.) et la deuxième à fixer une direction vers ce que l’on souhaite.
Chacune des deux approches a ses limites : tout baser sur des règles risque de brider
l’évolution qui consiste justement, souvent, à dépasser certaines règles. À l’opposé,
donner simplement des objectifs est bien illustré par la maxime « la fin justifie les
moyens ». Mais cela est-il vrai à n’importe quel prix ? Un groupe doit se fixer uniquement
quelques règles comme des limites infranchissables à ne pas dépasser et quelques pistes
d’objectifs comme une direction souhaitable, afin de laisser entre les deux le maximum
d’espace libre pour permettre au groupe d’évoluer pour s’adapter à l’imprévisible116.

Pour en savoir plus

Deux approches « opposées » de l’éthique
« L’éthique est une discipline philosophique portant sur les jugements de valeur117 »,
contrairement au droit qui, lui, porte sur un « jugement de faits ». Même si morale et
éthique ont la même étymologie signifiant « mœurs » (« mores » en latin et « ethos » en
grec), nous pouvons nous servir de ces deux termes pour faire des distinctions plus
subtiles. J’ai ainsi choisi118, comme certains auteurs, de distinguer les jugements de valeur
qui sont issus d’une référence absolue (Dieu, le Cosmos…), et que nous appellerons
« morale », de ceux qui sont construits par les hommes à partir de choix collectifs
raisonnés et que nous appellerons « éthique » (nous retrouvons ici l’idée de discuter
ensemble sur nous-mêmes qui forme la base de ce chapitre). Nous partirons ici du principe
116 Je suis conscient que cette approche est opposée à l’approche planifiée qui est enseignée en général dans la gestion de projets. J’ai
commencé à rencontrer ce type de contradiction dès mon premier livre sur “la coopération nouvelles approches” avec des règles non pas
différentes entre les projets planifiés et les projets coopératifs mais incroyablement opposées ! J’ai pu comprendre cette difficulté par la suite
comme une différence d’objectif entre les deux types de projets : un projet planifié gère des contraintes (obtenir ce que l’on a prévu, garantir
un résultat) tandis qu’un projet coopératif gère des opportunités (innover, obtenir le maximum de résultats dans un environnement humain
imprévisible…). Voir “l’abondance comme moyen d’innovation” : http://www.cornu.eu.org/news/introduction-de-internet-tome-2-services-etusages-de-demain ou encore “Le choix a posteriori” in “Faire ensemble ! Manuel à l’usage des animateurs de réseau collaboratifs, projet Cooptic, 2013 : http://ebook.coop-tic.eu/francais/wakka.php?wiki=LeChoixaPosteriori
117 https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89thique
118 Jean-Michel Cornu, “ProspecTIC, nouvelles technologies, nouvelles pensées”, FYP éditions 2008 - Qu’est-ce que l’éthique ? p308 - Voir
aussi “quelques idées sur l’éthique” présenté devant la Commission de réflexion sur l’Éthique de la Recherche en sciences et technologies du
Numérique d’Allistene (CERNA) lors de son séminaire de novembre 2013 : https://prezi.com/wr1e3nxgd2da/

156

que les personnes impliquées dans ces choix le font en toute bonne foi, en cherchant la
meilleure solution à leurs yeux.
Là où les choses se gâtent, c’est que dans la vie réelle nous nous trouvons parfois
devant des circonstances contradictoires. L’un des exemples les plus connus illustre bien
deux types de choix opposés qui peuvent être faits en éthique. Imaginez qu’un train n’ait
plus de frein et se dirige à toute vitesse vers un groupe de dix personnes qui se trouvent
sur la voie et n’auront pas le temps de s’enfuir. Vous vous trouvez près d’un aiguillage qui
permettrait de dévier ce train, mais sur la deuxième voie se trouve une personne.
Qu’allez-vous faire ?
— Actionner l’aiguillage et ainsi provoquer, de votre fait, la mort d’une personne ?
— Ou bien ne rien faire et laisser risquer dix personnes ?
Cruel dilemme !
Si vous avez fait le premier choix, vous avez eu une approche conséquentialiste : entre
deux maux, il faut choisir le moindre, quitte à tuer une personne.
Si vous avez fait le second choix, vous avez opté pour le déontologisme : il y a des règles
à ne pas dépasser, comme celle de ne pas tuer. Sinon cela ouvre une faille qui peut
affaiblir ce principe qui nous permet de vivre ensemble.
La tradition anglo-saxonne est plutôt orientée vers le conséquentialisme, alors que les
pays latins, comme la France, optent plutôt pour le déontologisme. Chaque approche a ses
propres inconvénients, mais, si nous n’avons plus de référence absolue pour dicter notre
conduite, il nous faut faire le choix nous-mêmes.
Si finalement vous avez opté pour un choix, l’avez-vous fait par conviction profonde, ou
bien avez-vous tenu compte de la différence entre chaque « mal » (dix morts contre un et
votre choix qui n’a pas d’impact sur le choix des autres) ? Pour le savoir, grossissons le
trait :
— Si vous avez choisi de ne pas actionner l’aiguillage, le feriez-vous si c’était l’ensemble
de l’humanité qui risquerait de disparaître par votre inaction à l’exception de la personne
qui se trouve sur l’autre voie, ou bien l’ensemble de la nature si vous faites peu de cas de
l’humanité ?
— Si vous avez choisi d’actionner l’aiguillage, le feriez-vous encore si cela tuait
neuf personnes pour en sauver dix et que de très nombreuses autres personnes, à côté de
157

l’aiguillage, observaient votre action, ouvrant la porte à des choix plus discutables (je peux
actionner l’aiguillage pour sauver ma propre mère, quitte à tuer une autre personne) ?
Aucun choix n’est parfait, nous cherchons en général à aller dans la direction qui nous
semble la plus désirable, tout en ne générant aucun trouble, on parle d’ataraxie, ou au
moins en les réduisant le plus possible. Le choix de respecter des principes ou bien d’être
pragmatique ne doit pas être dogmatique. Il nous faut sans doute allier le meilleur des
deux :
— Définir un nombre minimal de principes comme des limites à ne pas dépasser,
sachant qu’ils peuvent brider notre évolution et notre capacité d’adaptation, et même se
retrouver en contradiction entre eux. Faut-il aider un ami qui sombre dans l’alcool et qui
ne veut pas être aidé, ou bien respecter son choix et son autonomie119 ?
— Définir quelques pistes de ce que nous attendons de notre action (leurs
conséquences) pour nous donner une direction sans nous contraindre (que de projets
arrivent à peu de résultats, car ils essaient à tout prix de faire ce qu’ils ont défini au départ,
alors qu’ils auraient pu contourner bien des obstacles en se réorientant vers des objectifs
tout aussi désirables !).
Entre les deux, laissons le plus de vide possible pour nous permettre de saisir les
meilleures opportunités que nous rencontrerons sur notre route, pour obtenir le plus de
résultats possible sans dépasser certaines limites.

Les règles du jeu pour discuter ensemble de nous-mêmes
Nous savons maintenant que converger vers une vision commune de notre propre
groupe n’est pas une tâche évidente pour le groupe et pour nous même. Nous avons
réduit au maximum les enjeux de pouvoir et nous avons cherché un équilibre autour des
quatre grandes familles de croyances qui nous empêchent d’avancer. Il nous faut
maintenant mettre cela en pratique pour échanger tous ensemble sur nous-mêmes. Mais
comment faire cela concrètement ?
Grâce à nos six aveugles découvrant un éléphant nous savons que le débat
contradictoire pour savoir qui a raison peut nous conduire à une impasse. Cela, d’autant
119 L’autonomie pluraliste considère qu’il existe plusieurs principes à respecter qui peuvent entrer en contradiction. C’est le cas par
exemple du principe de bienfaisance (fais le bien aux autres) et du principe d’autonomie (n’impose pas ton bien aux autres). Voir Hans Tristan
Engelhardt, The Foundation of Bioethics, Oxford University Press, 1986

158

plus que nous ne pouvons garder à l’esprit que les trois derniers éléments d’une
discussion120. Il est plus intéressant de « montrer le groupe au groupe » en cartographiant
la diversité des idées et des désaccords pour obtenir une vision d’ensemble. Cette
approche

cartographiée

est

un

mode

de

pensée

particulièrement

puissant,

complémentaire de notre raisonnement.

Pour en savoir plus

Nous avons non pas un mais deux modes de pensée121
Les sciences cognitives nous apprennent que si pour penser nous utilisons notre
mémoire à court terme, nous avons alors non pas un, mais au moins deux modes de
pensée.
Le premier mode de pensée fait appel à la « boucle phonologique » qui permet
d’enchaîner des concepts en série par exemple lors de la construction de discours
hypothético-déductifs. Mais cette mémoire à court terme est limitée à trois notions. Les
animaux utilisent différents langages (sonores, dansés…), mais restent limités dans leur
capacité à construire un discours. L’homme, au contraire, a développé un vocabulaire
symbolique qui lui est transmis culturellement dès le plus jeune âge et qu’il conserve dans
sa mémoire à long terme. Ainsi, il lui est possible d’alimenter en continu sa boucle
phonologique, au fur et à mesure de la construction de la pensée, et de construire un
discours par l’ajout sans limites de nouvelles déductions à chaque étape de son discours.
Cette pensée « rationnelle » nous a apporté non seulement un mode de communication
très sophistiqué avec nos congénères, mais également a permis le développement de
notre intelligence.
Mais ce premier mode de pensée a des limites. La construction d’un discours est par
nature linéaire (la boucle phonologie travaille en série dans le temps). Tout se passe
comme si nous choisissions à chaque étape la prochaine étape d’un parcours. Nous ne
pouvons pas prendre plusieurs chemins à la fois. Même si nous pouvons revenir en arrière
pour essayer un nouvel embranchement, nous sommes limité dans le nombre d’essais
possibles sans nous perdre. Cela a des conséquences sur notre limite à penser de cette
120 Il s'agit d'une limitation d'une de notre mémoire de travail appelée boucle phonologique, qui ne permet de "conserver en tête" que
trois items dans une chaîne d'idée. Pour le modèle des différentes mémoires de travail, voir A. D. Baddeley and G. Hitch, Working Memory, in G.
H. Bower (ed), The psychology of learning and motivation: Advances in research and theory, vol. VIII, Academic Press, New York, 1974
121 Cet encadré est un article paru sur mon blog. La première idée en a été présentée dans mon livre “ProspecTIC, nouvelles technologies,
nouvelles pensées” (version PDF en ligne du chapitre : http://www.cornu.eu.org/files//ProspecTIC_pensee2.pdf ) –
voir
également
“cartographier
pour
donner
une
vision
d’ensemble”
:
http://ebook.cooptic.eu/francais/wakka.php?wiki=CartographierPourDonnerUneVisionD039ens

159

façon : nous ne pouvons pas facilement explorer tous les cheminements possibles et
conservons donc notre propre « fil de pensée » tant que celui-ci n’est pas réfuté ou, plus
exactement, tant que nous n’acceptons pas cette réfutation. Mais il existe de nombreux
domaines, comme le débat philosophique122 ou politique, où il n’y a pas un seul
cheminement possible entre des postulats et une conclusion. Cela est particulièrement
crucial dans un domaine particulier : le conflit d’intérêts. Chacun suit alors son propre
cheminement. Il n’est alors possible, avec ce premier mode de pensée, que de gagner ou
de perdre face à l’autre (la loi du plus fort, éventuellement améliorée par Sun Tzu ou
Machiavel pour en faire la loi du plus habile). Cependant, il est également possible de faire
un « compromis » ne prenant que partiellement en compte chacun des deux « points de
vue ».
Il existe une troisième solution qui consiste à faire converger au moins partiellement les
intérêts pour trouver suffisamment de points communs (approche coopérative par la
convergence d’intérêts123, dite « win-win ») — ou, mieux encore, à articuler des points de
vue apparemment incohérents entre eux pour proposer une vision nouvelle de la question
(ce que Hegel a appelé le « saut qualitatif » en dialectique). Mais cette solution fait appel à
un autre mode de pensée. Nous pourrions le décrire comme la vision du plan permettant
de se représenter les différents cheminements (vision allocentrée) par rapport à la vision
de notre seul point de vue par rapport à l’endroit où nous nous trouvons (vision
égocentrée). Une deuxième mémoire à court terme, le calepin visuo-spatial, garde à
l’esprit plusieurs éléments en parallèle afin de nous aider à constituer une « carte
mentale ». Elle nous permet, par exemple, de compter a posteriori les fenêtres d’une
maison, alors que nous n’en avons plus l’image devant les yeux, à condition que leur
nombre soit limité. C’est également cette même mémoire de travail qui nous permet de
créer de nouvelles idées en reliant deux idées anciennes que nous avons à l’esprit. Mais le
calepin visuo-spatial est également limité. Son « empan mnésique » est compris entre cinq
et neuf124. Nous sommes donc restreints, tous comme les autres animaux, à ne relier que
quelques idées entre elles.
122 C’est la question du scepticisme, abordée entre autres par Hegel : si la vérité est une, comment expliquer la multiplicité des
philosophies
123 Jean-Michel Cornu, la coopération nouvelles approches, publication en ligne, 2001 http://www.cornu.eu.org/texts/cooperation
2.1 biens non consommables et environnement d’abondance
2.2 les communautés qui durent convergent vers la coopétation
2.3 l’évaluation par l’estime
124 Georges A. Miller, The Magical Number Seven, Plus or Minus 2: Some limits on our Capacity for Processing Information, The
psychological review, vol. III, 1956, http://www.musanim.com/miller1956/

160

Pour aller plus loin, il faudrait pouvoir conserver dans notre mémoire à long terme, non
plus une suite non ordonnée de mots symboliques pour y accoler les concepts auxquels
nous voulons penser, mais plutôt un plan sur lequel nous pourrions avoir plusieurs
centaines de « lieux de mémoire » (loci) où nous pourrions lier les notions sur lesquels
nous voulons réfléchir. Nous pourrions alors construire non plus un simple cheminement
logique, mais, au contraire, découvrir des chemins nouveaux entre des idées qui n’avaient
pour certaines pas été reliées jusqu’alors. Par exemple, le poète lyrique grec Simonide, né
à Céos, en 556 av. J.-C., associait les personnes au plan d’une maison qu’il connaissait
bien125, ou encore les moines du Moyen Âge qui utilisaient les multiples éléments à
l’intérieur d’une cathédrale comme support à leur pensée, jusqu’à la Renaissance, où des
théâtres imaginaires, tel que l’« Idea del Theatro » de Giulio Camillo, et des roues
contenant des figures symboliques (Giordano Bruno) permettaient de mettre directement
en relations une pluralité de mondes habités. Mais après la Renaissance, cet « art de la
mémoire126 » est tombé en désuétude, faisant disparaître ce que l’on pourrait qualifier
« d’art de penser127 ». Le triomphe de la pensée rationnelle (la « pensée-1 ») a occulté
notre deuxième mode de pensée. Nous en avons perdu au passage, sauf à le faire
naturellement jusqu’à un certain point, la capacité de créer de la pensée par l’articulation
de points de vue qui ne sont pas déductibles les uns des autres, en les rassemblant sur un
même territoire. Il ne s’agit pas, bien sûr, de balayer notre pensée rationnelle, mais plutôt
de rééquilibrer notre capacité à penser en la complétant par ce deuxième mode.
Les cartes heuristiques (ou mind mapping) sont particulièrement utiles pour penser
dans ce sens, aussi bien individuellement que collectivement, bien que la plupart soient
plus adaptées à une vision arborescente où deux concepts hérités d’une idée source sont
rarement reliés entre eux. Mais il nous faut aller plus loin en construisant des plans de
territoires que nous conserverons en détail dans notre mémoire à long terme. Cela peut
être des cartes qui nous servent pour penser individuellement comme celle de notre
maison ou de notre environnement, ou bien d’autres cartes que nous partageons avec nos
semblables pour construire du débat. Nous pourrons alors nous appuyer sur ces plans
pour y conserver l’ensemble des éléments sur lesquels nous voulons construire de la
pensée, tout comme nous nous appuyons sur notre vocabulaire symbolique — qui, lui, a
125 Raconté par Cicéron, La réthorique, premier volume “de inventio” trad. “De l’orateur” Courbaud Edmond Éditeur scientifique,
Collection des universités de France, ISSN 0184-7155, 1 vol., Paris, France, Les Belles Lettres, 1966.
126 Yates Frances Amelia, L’art de la mé moire, trad. Arasse Daniel, Bibliothèque des histoires, ISSN 0768-0724, 1 vol., Paris, France,
Gallimard, impr. 1987, 1987.
127 Mary Caruthers, The Craft of Throught, Meditation, Rethoric, and the Making of Images, Cambridge University Press, 1998 ;
traduction française, Machina memorialis, méditation, réthorique et fabrication des immages au Moyen Âge, Gallimazrd NRF, 2002

161

bien été mémorisé depuis le plus jeune âge dans notre mémoire à long terme — pour
construire nos chemins de pensée, étape par étape, sous la forme de discours.
Il serait intéressant de construire des cartes communes faciles à mémoriser pour
chacun. Il faut, cependant, sûrement éviter la tentation d’utiliser le plan d’un territoire
connu (par exemple, la carte des pays dans le monde), pour éviter d’associer des concepts,
auxquels on associe des valeurs — bonnes ou mauvaises —, à des parties « habitées » de
ce territoire. Les réflexions actuelles pour trouver des cartes partagées, facilement
mémorisables dans notre mémoire à long terme, vont dans deux directions :
1— Soit la création d’un nouveau territoire simple, régulièrement utilisé et vu aussi
bien depuis une vision egocentrée (déplacement dans le territoire) qu’une vision
allocentrée (« vue du ciel »). On retrouve cette approche, par exemple, avec la carte de
« La Comté » qui permet de suivre le périple dans Le Seigneur des anneaux ou dans
certains jeux vidéo de stratégie. Très répandue dans les jeux vidéo, elle n’est pas encore
utilisée au service des communautés.
2— Une autre piste consiste à utiliser une carte déjà connue — au moins partiellement
— du plus grand nombre. Cela peut être une carte du ciel présentant les étoiles, ellesmêmes rassemblées sous la forme de constellations (seules les principales sont largement
connues, mais il devrait être possible d’étendre cette connaissance progressivement, au
fur et à mesure de l’utilisation de la carte). Il faut noter, cependant, que la carte du ciel
n’est pas la même pour les populations vivant au nord ou au sud de l’équateur. La carte du
« corps humain » (par exemple l’homme de Léonard de Vinci) serait également un bon
candidat. Elle comporte une cinquantaine de « lieux de mémoire » auxquels nous avons
déjà associé un nom, quels que soient notre culture et notre niveau de connaissance. Il est
possible aussi, et cela est peu connu, d’associer des idées à des cartes connues « non
géographiques », comme la liste des contes, des psaumes ou encore la généalogie d’une
famille racontés par les griots128.

128 Des cartes pour décrire des contes, rencontre avec Viviane Labrie : http://www.cornu.eu.org/news/des-cartes-pour-decriredes-contes

162

Pour faire avancer les choses

Un outil pour aider les humains à penser
Imaginons un outil libre pour nous permettre de dépasser une de nos limitations
cognitives (l’empan mnésique de notre calepin visuo-spatial), et ainsi penser, seul ou à
plusieurs, de façon bien plus puissante que nous ne pouvons le faire naturellement. Cela
pourrait même devenir le pendant de l’invention d’un langage commun pour le premier
mode de pensée, mais appliqué à notre deuxième mode de pensée, cartographié, celui qui
nous permet d’avoir une vue d’ensemble et de penser la différence.
Un tel outil serait basé sur le principe des schémas heuristiques (ou mind mapping) et,
pour avoir facilement une vision d’ensemble, il présenterait sur un même écran, les
contenus de trois niveaux de zoom (au-delà, on devient perdu) avec la possibilité de
remonter au niveau supérieur ou de zoomer sur une idée particulière pour en présenter
les idées supplémentaires.
Mais toutes les idées ne sont pas simplement arborescentes, et il peut être intéressant
de présenter les sous-idées par différentes formes : toutes au même niveau, comme une
chaîne ou bien encore comme un tableau pour présenter tous les cas de figure possibles
avec deux paramètres (des tableaux à plus de dimensions ne seraient pas adaptés à la
compréhension par le cerveau humain).
La carte des idées pourrait se superposer à une carte géographique pour faciliter la
mémorisation avec des outils de construction aussi puissants que ceux d’OpenStreetMap,
mais appliqués à des territoires qui n’existent pas ou même à la construction de cartes
constituées de listes de choses connues.
Pour aller plus loin, il faudrait pouvoir naviguer dans les idées de deux autres façons,
telles que présentées par le concept d’anoptisme d’Olivier Auber129 :
• sous la forme de chemins que l’on peut suivre d’idée en idée, un peu comme des
lignes de métro qui nous mènent de station en station (Prezi, par exemple, le permet) ;
• et sous la forme d’une carte sémantique permettant de relier des concepts à toutes
les idées de la carte qui les utilisent (comme les mots-clés utilisés dans le web 2.0, par
exemple).

129 http://perspective-numerique.net/wakka.php?wiki=anoptique

163

Les idées pourraient être importées dans la carte, en permettant de les attraper depuis
un outil de discussion (le mail, la messagerie Facebook, Twitter), ou bien, directement
depuis des pages web, en les surlignant, puis en les « tirant » pour les placer au bon
endroit sur la carte, comme le fait l’application Assembl, que j’ai aidé à développer.
Toutes les briques, ainsi que la compréhension nécessaire, sont là pour nous permettre
de développer des outils au service de l’homme qui lui donneront la possibilité de
dépasser ses limites cognitives et également au service des groupes pour leur permettre
de développer de l’intelligence collective.

Pour permettre la construction de cette vision d’ensemble commune, nous devons
reporter le choix à plus tard, pendant une deuxième phase, et nous concentrer au début
sur une libération « bienveillante de la parole ». Pour permettre la parole, il est donc
important de libérer du temps d’écoute, en donnant comme règle de ne pas interrompre
et d’attendre que l’animateur de la réunion nous passe la parole explicitement. Il est
également extrêmement utile de réserver des périodes de creux, sans paroles, pour
permettre à chacun d’intégrer ce qui a été dit. Les participants rempliront ce vide avec de
nouvelles idées. Il est très utile également que l’animateur pense à donner la parole à ceux
qui ne l’ont pas encore prise.
Le fait de construire la carte de la vision d’ensemble, progressivement, devant
l’ensemble du groupe permet à chacun de la rectifier, de la compléter et ainsi de se
l’approprier. Il ne s’agit pas de « corriger l’autre », puisqu’il faut éviter les débats
contradictoires, mais plutôt de permettre de rectifier la façon dont notre propre
contribution a été prise en compte, si nous pensons qu’elle a été mal comprise. Chacun
peut également compléter avec de nouvelles idées, même si elles peuvent sembler en
contradiction avec d’autres idées (un éléphant peut ressembler à la fois à un mur et à un
serpent).
Une fois les idées exprimées, vient le moment des prises de décisions. Deux règles
peuvent y aider.
1— La première consiste à ne pas faire un vote (49 % des membres pourraient être
frustrés…), ni à chercher un consensus où tout le monde serait d’accord, mais plutôt à
chercher à ce que personne ne soit en total désaccord. La sociocratie parle de « décision
par consentement » et l’IETF, qui fabrique les standards de l’internet, de « rough
consensus » ou « consensus approximatif ». Si plus personne n’a d’objection majeure et
164

tous peuvent « vivre avec la proposition », alors celle-ci est adoptée. Si une personne a
une objection majeure, alors le groupe travaille à une nouvelle formulation.
2— La deuxième règle cherche à éviter le fameux « Y a qu’à… Faut qu’on... ». Si
personne n’est prêt à s’engager pour mettre en œuvre une proposition particulière, il faut
se demander si elle est réellement utile et ce qui se passerait si on l’abandonnait.
Pour chaque proposition qui est faite, il faut donc qu’elle ne lève plus d’objections
majeures et que quelques personnes s’engagent à la mettre en œuvre.

Exemple

La sociocratie130
La sociocratie est un mode de prise de décision et de gouvernance agile qui permet à
une organisation, quelle que soit sa taille — d’une famille à un pays —, de se comporter
comme un organisme vivant, de s’auto-organiser. Elle est fondée sur le concept « plus
aucune objection argumentée d’aucune personne » et repose sur quatre règles :
La prise de décision par consentement
La sociocratie distingue les décisions stratégiques qui affectent le fonctionnement de
l’unité ou l’organisation du travail et les décisions opérationnelles, le travail au quotidien.
Pour des raisons d’efficacité, seules les premières sont prises par consentement. Il y a
consentement quand personne n’a d’objection importante et raisonnable. Quand une
personne émet l’objection, les autres membres du groupe travaillent ensemble à la lever.
S’ils y arrivent, la décision est prise ; sinon un processus d’escalade dans la structure de
l’organisation évite le blocage.
Les cercles
La sociocratie maintient la structure opérationnelle existante d’une organisation. À
chaque élément de cette structure, elle rajoute, en parallèle, un cercle chargé de la prise
de décisions politiques. Toute personne appartenant à la structure opérationnelle est
membre de droit du cercle correspondant. Des cercles ad hoc peuvent être créés pour
résoudre des problèmes spécifiques. Chaque cercle établit ses propres règles de
fonctionnement sur le principe du consentement de ses membres. Un cercle a pour
130 extraits de l’article sur la sociocratie dans l’encyclopédie Wikipédia : https://fr.wikipedia.org/wiki/Sociocratie

165

mandat de réaliser la mission de l’unité de travail, d’améliorer constamment la qualité de
sa production et d’assurer sa pérennité par l’éducation permanente de ses membres.
Le double lien
Dans une organisation gérée de manière traditionnelle, le responsable d’une unité
assure, à la fois, la communication descendante (les directives venant des niveaux
supérieurs de l’organisation) et la communication ascendante (le retour des informations
de la base vers les niveaux supérieurs). Assurer simultanément ces deux rôles est difficile
et source de confusion.
La sociocratie établit un double lien entre chaque cercle et son cercle de niveau
supérieur. Le responsable de l’unité opérationnelle est choisi par le cercle de niveau
supérieur. Une deuxième personne, obligatoirement distincte de la précédente, est choisie
par le cercle pour participer au cercle de niveau supérieur et donner ou non son
consentement aux décisions qui y sont prises. Ces deux personnes sont membres à part
entière des deux cercles.
L’élection sans candidat
Le choix et l’affectation des personnes dans une fonction ou la délégation d’une tâche à
un membre du cercle s’effectuent par un processus de vote sans candidat déclaré. Chaque
membre du cercle propose la personne qu’il estime la plus adaptée à la fonction, puis
justifie son choix. Le facilitateur du cercle propose alors un candidat qui est accepté, ou
non, par consentement.
Même si elle est élaborée en tenant compte de concepts complexes issus de la
cybernétique et des théories de la communication, la sociocratie est extrêmement simple :
elle a pu être utilisée par des enfants dans des écoles ou par des parlements de village en
Inde. Cette simplicité permet de l’installer dans une organisation avec un minimum de
formation.

166

Exemple

L’Internet Engineering Task Force (IETF)131
L’IETF est un groupe informel et auto-organisé dont les membres contribuent à
l'ingénierie et à l'évolution des technologies de l'Internet. C'est la principale structure
engagée dans l’élaboration des spécifications pour les nouveaux standards de l'Internet.
L’IETF est atypique dans la mesure où elle est constituée d'une série d'événements, sans
cadre statutaire ni conseil d'administration, sans membres ni adhésion.
L’IETF travaille selon un processus ouvert et selon un consensus approximatif. Cela
s’applique à tous les aspects du fonctionnement de l’IETF, y compris à la création de
documents IETF et aux décisions sur les processus qui sont utilisés. Mais l’IETF observe
également avec intérêt les expériences et le code mis en oeuvre à partir de ses standards,
et cela devrait aussi s’appliquer aux processus opérationnels de l’organisation.
La règle générale pour aboutir sur un sujet en cours de discussion est de parvenir à un
consensus approximatif, ce qui signifie qu'une très large majorité des personnes
concernées par le débat approuvent la décision. Le consensus approximatif a été défini de
différentes façons. L’une des plus simples est qu’à chaque fois qu’il y a une objection
sérieuse, il faudra en débattre jusqu'à ce que la majorité se rende compte du non
fondement de l’objection.
L’un des principes les plus cités de l’IETF est « les standards mis en oeuvre l’emportent
». Ainsi vous pouvez aider un standard à devenir plus répandu en créant davantage de
code mettant en œuvre ses règles. Les spécifications des standards IETF ne sont pas
considérées satisfaisantes jusqu’à ce que des applications indépendantes et
interopérables aient été démontrées.

131 Extraits du “Tao de l’IETF” : http://www.ietf.org/tao-translated-fr.html

167

C’est parti !
Nous avons maintenant tous les éléments pour notre réunion de la communauté sur sa
propre organisation. Il est plus facile de traiter de ce sujet lors d’une rencontre synchrone,
de préférence en présentiel. Nous allons analyser quatre clés pour le démarrage de la
réunion et quatre étapes dans le cœur de la réunion. De préférence, invitez l’ensemble de
la communauté (vous aurez probablement environ 10 % de participants) et surtout faites
un retour au reste de la communauté de ce qui se sera passé.
Pour cette rencontre, vous aurez besoin d’un animateur qui sera en position « meta »
pour observer ce qui se passe, les tensions, les enjeux. Pour cela, il devra accepter de ne
pas prendre directement part aux échanges, de rester neutre et de faire en sorte que la
parole circule. L’animateur de la réunion peut être extérieur à la communauté, mais il
devra bien maîtriser les différents aspects présentés dans ce chapitre. Il pourra être aidé
par une personne prenant des notes pour « montrer le groupe au groupe ». Les notes
doivent idéalement être visibles par tous pendant la réunion. Elles peuvent être prises sur
un paperboard, mais il est difficile de réorganiser les idées en flux continu ; sur des post-it
plus faciles à réorganiser, mais moins visibles de loin) ; sur un tableau blanc et qui permet
de déplacer les idées pour en rapprocher certaines ; sur un logiciel de schéma heuristique
ou un pad projeté grâce à un vidéoprojecteur.

Le démarrage de la rencontre
L’animateur commence par rappeler qu’au-delà des personnes présentes à la réunion,
tout ce qui va se dire concerne toute la communauté.
Météo intérieure132. Faites un tour de table où chaque participant indique en quelques
mots comment il se sent ici et maintenant. Cela permet de se connecter à chacun et
d’exprimer les tensions, même si elles viennent de conditions extérieures au groupe.
Règles du jeu. L’animateur expose les règles qui peuvent, en plus, être affichées à la vue
de tous :
1— Toutes les idées y compris celles en désaccord seront notées pour avoir une vue
d’ensemble, ce qui est bien plus efficace qu’un débat contradictoire « j’ai raison, tu as
tort ».

132 http://www.asblrcr.be/sites/default/files/La%20Meteo%20Interieure%20-%204.pdf

168

2— Ajoutez ou complétez, mais ne supprimez pas d’idées à ce stade. Même les idées
qui peuvent sembler stupides ne le sont peut-être pas. Elles peuvent même en inspirer de
nouvelles.
3— Un choix devient collectif lorsqu’il n’y a plus d’objection majeure. Chacun doit
pouvoir vivre avec ce choix.
4— Un choix collectif peut devenir une décision si quelques personnes sont prêtes à
s’engager pour le mettre en œuvre, sinon, voir si l’on peut faire d’une autre manière.
Les quatre équilibres à rechercher pendant la réunion
L’animateur raconte en trois minutes la parabole des aveugles et de l’éléphant afin de
donner des références communes à chacun et propose quatre équilibres à trouver qui
peuvent également être affichés dans la salle pour y revenir plus facilement :
• soyons au service de notre cause, mais n’oublions pas que nous sommes tous
humains et imparfaits ;
• essayons d’être le plus cohérent possible avec ce que l’on dit, mais bienveillant, en
prenant conscience que ni nous ni personne n’y arrive complètement ;
• sachons au mieux préserver l’identité de notre communauté, tout en évoluant pour
nous adapter aux nouvelles circonstances ;
• définissons de façon minimale les orientations désirables et les limites à ne pas
dépasser, tout en laissant le maximum d’espace libre pour permettre au groupe de
continuer de s’inventer.

Le corps de la rencontre
L’animateur prend en charge le passage explicite de la parole en veillant à sa circulation
pour que chacun puisse s’exprimer. Il peut aussi ménager des périodes de silence pour
aider à recentrer l’attention du groupe ou pour atténuer les tensions qui peuvent se faire
jour.
La discussion se fait en quatre étapes, chacune à partir d’une question.
1— Que se passerait-il si l’on n’arrivait pas à résoudre le problème ou même si le
groupe venait à disparaître ? Cette discussion révèle les attachements, les motivations et

169

les dépendances qui sont normaux, mais dont il est important de prendre conscience133.
D’ailleurs, tous les groupes ont une durée déterminée.
2— À quoi ressemblerait notre communauté idéale si l’on avait une baguette magique
qui nous permettrait de tout faire ? Cette étape est importante pour que notre cerveau ne
juxtapose ni mélange le problème et les solutions concrètes qui seront discutées134. Elle
permet une question intermédiaire qui, en plus, est plutôt agréable à discuter.
3— Que pourrions-nous faire pour nous rapprocher de cette situation idéale ? À ce
stade, on met tout sur la table sans sélection.
4— Comment nous organiser pour mettre en place ces idées ? Là, il va nous falloir faire
des choix. On peut y associer quelques questions complémentaires.
a) Peut-on réduire les enjeux pour la communauté — en les déléguant à une équipe
projet ou à un secrétariat ?
b) Peut-on réduire l’impact que cela aurait sur la communauté, si ce projet n’était pas à
la hauteur de nos espérances ?
c) Qui est prêt à s’engager sur ce projet ? Si personne n’est prêt, peut-on organiser les
choses autrement, par exemple, sans ce projet, ou différemment, pour que certains soient
motivés ?

La conclusion de la rencontre
Pour clôturer la rencontre, vous pouvez faire deux dernières choses :
— Rappeler les actions et engagements, et demander à ceux qui les ont pris de
confirmer.
— Proposer aux membres qui le souhaitent de faire un « rapport d’étonnement » :
qu’est-ce qu’ils ont appris ? Qu’est-ce qui les a intéressés, étonnés ?

133 Ivan Maltcheff, ibid. La question de la mort des groupes p96
134 L’effet Koulechov est un biais cognitif qui montre que deux étapes présentées successivement se contaminent mutuellement :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Effet_Koulechov

170

Et ensuite ?
Ensuite ? Et bien, fêtez ça ! Vous l’avez tous bien mérité. En aidant à mettre en place un
environnement favorable pour des projets, vous avez fait votre part du Collibri135. En
contribuant au développement d’une grande communauté pour favoriser l’échange et
l’entraide, vous apportez votre pierre pour construire demain136. En arrivant, même
imparfaitement, à échanger ensemble pour améliorer le groupe, vous lui donnez plus de
chance de vivre et de se développer. Alors oui, vraiment, vous avez bien mérité de fêter
cela ! Sans compter que le plaisir et la convivialité sont des moteurs extraordinaires pour
les communautés.

135 La légende du Collibri : http://www.colibris-lemouvement.org/colibris/la-legende-du-colibri
136 Le film Demain montre partout dans le monde comment des personnes s’organisent pour proposer des soltuons pour mieux vivre
ensemble : http://www.demain-lefilm.com/

171

Postface

Maintenant, c’est à vous de jouer ! Identifiez quels sont les concepts de la première
partie de ce guide que vous souhaiteriez revoir137 ; utilisez-les check-lists du début de la
deuxième partie pour savoir comment organiser collectivement et gagner du temps ; puis
mettez en pratique la troisième partie pour faire vivre la communauté en synergie avec
quelques projets collectifs.
N’attendez-pas d’avoir tout intégré ou organisé. Le bon moment, pour mettre en
œuvre ce que vous avez retenu, c’est tout de suite ! Même en agissant de façon
imparfaite, vous allez déjà gagner du temps par la suite et vous vous améliorerez au fur et
à mesure de vos actions. Préférez les petits pas aux grands sauts, jusqu’à l'arrivée
hypothétique. Comme le souligne le poète espagnol Antonio Machado : « Voyageur, il n’y
a pas de chemin, le chemin se fait en marchant138. »
Pour vous aider à passer à l’acte139, je vous propose un dernier petit exercice. Listez les
raisons pour lesquelles vous ne pouvez pas commencer dès maintenant à mettre en place
une nouvelle communauté ou à animer une communauté existante. Relisez attentivement
vos arguments, et vous constaterez que vous avez produit un magnifique spécimen de
prétextes que chaque être humain utilise pour procrastiner, c’est-à-dire remettre au
lendemain ce qu’ils doivent faire. Il vous suffit de les considérer comme des prétextes.
Ensuite, indiquez sur une simple feuille de papier votre prochaine étape, le premier « petit
pas », quelque chose de simple, par exemple, un coup de fil à une personne ou un mail à la
communauté pour en parler serait parfait.
Avant de terminer, je souhaiterai que vous m’aidiez à identifier les questions que vous
vous posez et les difficultés que vous rencontrez afin de vous proposer des contenus
supplémentaires : textes, vidéos, séminaire d’information ou de formation. Pour cela, je
vous invite à répondre au questionnaire à l’adresse suivante :
http://frama.link/anim1h-aidezmoi

137 Retrouvez la synthèse sur https://frama.link/anim1hsynthese1. Vous pouvez également remplir le questionnaire en ligne sur
https://frama.link/anim1h-Q1
138. « Caminante, no hay camino, se hace camino al andar. »
139 Petit clin d’oeil au site “On passe à l’acte”, le site de vos initiatives positives : http://www.onpassealacte.fr/

172

Vous l’avez compris, l’important est de ne pas rester seul. À plusieurs, vos projets
seront plus riches. Ces projets eux-mêmes bénéficieront d’une large communauté qui
rassemble des personnes, des organisations et d’autres projets. La communauté à son
tour ne doit pas rester isolée. Les écosystèmes de communautés ouvrent encore vers
d’autres échanges et synergies. Enfin, des communautés d’animateurs, telles que Anim-fr,
facilitent l’échange et l’entraide quels que soient les projets, les communautés ou les
écosystèmes.
Et si nous restions en contact ?
Rendez-vous sur mon blog : http://www.cornu.eu.org/
Vous y trouverez des contenus supplémentaires, en particulier des vidéos et des
webinaires, pour traiter des points que vous avez souhaité que l’on aborde ensemble.
À tout de suite !

173

Index
accès limité ............................................ 61
accueil (page d'accueil) ......................... 63
actions en cours ..................................... 60
administration du site .......................... 114
adolescence (crise du groupe) ............. 143
adulte (groupe adulte).......................... 143
agressivité ............................................ 145
allocentrée (vision) .............................. 159
amis (qui sont vos amis ?) ..................... 47
Animacoop ............................................ 75
Anim-fr .................................................. 76
Anim-fr (communauté) ....................... 100
anoptisme ............................................ 162
approche francophone de la coopération . 8
art de la mémoire ................................. 160
Assembl ......................................... 67, 115
association ............................................. 32
asynchrone (outils) ................................ 51
ataraxie ................................................ 157
attaque / fuite ....................................... 145
attention ................................................. 10
attrapeur ................................................. 67
auto-répondeur ...................................... 38
aveuglement paradigmatique................. 11
aveugles et éléphant (parabole) ........... 153
bannissement ....................................... 145
base de données des groupes ................. 72
biais de confirmation ................... 142, 154
Bienveillance et bientraitance ............... 97
blog ........................................................ 37
blogueur ................................................. 37
boucle phonologique ........................... 158
bourreau ............................................... 141
brise-glace ............................................. 45
calendrier ............................................... 73
calepin visuo-spatial ............................ 159
canal de communication privilégié ....... 24
carte de la communauté ......................... 13
carte mentale ....................................... 159
cartes heuristiques ............................... 160
cartographiée (approche) ..................... 158
Catalyst (projet) ................................... 149
cause (à défendre)................................ 154
cercles (sociocratie) ............................. 164
chats ..................................................... 108
citizen99 ................................................ 67
cohérence ..................................... 152, 154
Colibri (part du Colibri) ...................... 154
Colibris ................................................ 100
commentaires ........................................ 39

communauté ........................................... 27
communauté d’animateurs ................... 100
communication non violente ................ 144
community management .......................... 7
community manager .............................. 37
Communs ............................................. 140
compétence (montée en compétence
collective)........................................... 30
compétences de l’attrapeur .................. 116
compétences de l’organisateur de
rencontres ......................................... 109
compétences des porteurs de projets .... 118
compétences du griot, bloggeur,
journaliste ou community manager.. 106
compétences du modérateur................. 111
conflit d’intérêts ................................... 159
consensus approximatif........................ 163
conséquentialisme ................................ 156
contradictoires (affirmations)............... 153
convenor ................................................. 45
convivialité........................................... 170
Coop-group .............................................. 9
créateur fossoyeur .................................. 33
Creative Commons ................................ 70
crise d’adolescence .............................. 143
cultures ................................................... 18
curation ................................................ 115
CYou (communauté).............................. 69
date ......................................................... 42
décalages horaires .................................. 42
décision par consentement (sociocratie)
......................................................... 163
Demain (film) ........................................ 83
déontologisme ...................................... 156
départ d’un rôle clé .............................. 144
Description de votre communauté ......... 95
diagnostic ............................................. 140
diagnostic (partager le diagnostique) ... 145
digest ...................................................... 57
Diigo .................................................... 115
discours ................................................ 158
discussions entre les rencontres ............. 47
Don’t feed the troll ............................... 144
Doodle .................................................... 42
double lien (sociocratie)....................... 165
douze (nombre de participants, limite
cognitive) ........................................... 20
Échanges .............................................. 140
écosystème de groupes........................... 68
écoute apprenante .................................. 97
174

égocentrée (vision) .............................. 159
élection sans candidat (sociocratie) ..... 165
empan mnésique .................................. 159
enfant (groupe enfant) ......................... 143
engagements (du facilitateur) ................ 98
entraide .................................................. 15
équipe projet .......................................... 19
espace de partage ................................... 59
essoufflement (de la communauté) ..... 142
éthique ................................................. 155
étiquette (sur les personnes) ................ 141
évolution du groupe ............................. 154
exclusion sociale ................................. 145
Fablab-fr ................................................ 31
Facebook (page, groupe) ....................... 38
Facebook Connect ............................... 104
facilitateur de communauté ................... 23
facilitateurs (chapitre dédié) ................ 133
faire ce que l’on dit et dire ce que l’on fait
......................................................... 154
fédérations d’associations ..................... 71
fêter (le développement du groupe) .... 170
Flashmeeting ....................................... 108
forum ..................................................... 51
Framadate .............................................. 42
framapad ............................................... 44
geek ....................................................... 50
Glowbl ................................................. 108
Google Connect ................................... 104
Google Docs .......................................... 62
Google+ ................................................. 38
gouvernance .................................. 70, 150
gratitude ............................................... 144
greffier ................................................... 67
griot ....................................................... 37
groupe collaboratif ................................ 15
groupe de soutien .................................. 75
Hangout ............................................... 107
harvester ................................................ 67
helpers ................................................... 75
heure d’été ............................................. 42
homéostasie ......................................... 155
Hootsuite ............................................... 38
hypothético-déductifs (raisonnement) . 158
ICE (méthode) ..................................... 140
ice breaking ........................................... 45
Idea del Theatro ................................... 160
identité du groupe ................................ 154
IETF .................................................... 166
iframe .................................................. 104
iframes ................................................... 63
Imagination for People .......................... 33

Implication ........................................... 140
inactifs .................................................... 28
Incroyables Comestibles ........................ 83
infobésité ................................................ 56
information (diffusion et appropriation) 37
informations confidentielles .................. 61
InnovAfrica (forum) .............................. 72
inscription ............................................ 123
inscription/désinscription ....................... 65
intelligence collective .............. 15, 30, 149
Interlangues (groupe) ............................. 64
Internet Engineering Task Force (IETF)
................................................... 33, 166
interopérabilité ....................................... 54
invitations collectives .......................... 123
invitations individuelles ....................... 125
IP Burkina .............................................. 32
irrationnel ............................................. 146
jeux psychologiques ............................. 141
journaliste............................................... 37
Kaleidos-coop ........................................ 76
Karpman (triangle de) .......................... 141
leader ...................................................... 33
leader négatif ................................ 140, 143
légitimité ................................................ 34
Léman Innovation Numérique (LIN) ..... 88
lettre d’information ................................ 52
lettre d'information ................................. 37
lieux de mémoire ................................. 160
LinkedIn ................................................. 38
liste de diffusion..................................... 56
liste de discussion .................................. 54
loci (lieux de mémoire) ........................ 160
logiciels libres .......................................... 8
logique non aristotélicienne ................. 146
loi de Metcalfe ....................................... 28
loi du plus fort ...................................... 159
luddites ................................................... 50
Lumenogic ........................................... 149
Machiavel............................................. 159
Mailman (serveur de liste) ................... 110
médiation ............................................. 144
membrane perméable (de la cellule) .... 155
mémétique ............................................ 144
mémoire à court terme ......................... 158
mémoire à long terme .......................... 160
MERE (structure) ................................... 95
messagerie électronique ......................... 52
messagerie instantanée de Facebook ..... 52
messages (nombre acceptable)............. 134
meta (position meta) ............................ 167
Metcalfe (loi de)..................................... 27
175

Météo intérieure .................................. 167
méthodes d'animation de rencontres) .... 46
militantisme ......................................... 154
militants ................................................. 10
mind mapping.............................. 115, 160
modérateur de discussion ...................... 57
modes de pensée .................................. 158
modularité............................................ 104
montée en compétence collective .......... 15
montrer le groupe au groupe ............... 158
morale .................................................. 155
mort symbolique .................................. 145
MultiBàO ............................................... 45
multilinguisme ..................................... 101
Mumble ............................................... 108
mutisme ............................................... 145
newsletter .............................................. 37
nombre de messages acceptable .......... 134
non-contradiction (principe) ................ 152
notes (prise de) ...................................... 43
notification mail .................................... 52
noyau (groupe) ...................................... 69
noyau de départ ..................................... 85
observateurs ........................................... 28
officiers de liaison ................................. 71
OpenID ................................................ 105
OpenStreetMap.................................... 162
opt-in ................................................... 123
opt-out ................................................. 123
outils ...................................................... 35
pad (prise de note) ................................. 43
page d’accueil ........................................ 63
page de travail ....................................... 74
paradoxe du menteur ........................... 153
partage sincère ....................................... 97
Partenaires ............................................. 96
Pearltree ............................................... 115
persistance des croyances .................... 142
petit pas ............................................... 171
polémique ............................................ 144
Polycom ............................................... 108
position meta ....................................... 167
pouvoir (enjeux de pouvoir) ................ 150
premiers projets ..................................... 97
présentation (en ligne) ......................... 130
Prezi ..................................................... 162
principe 90-9-1 ...................................... 28
prises de décisions ............................... 163
proactifs ................................................. 28
profil .................................................... 111
projet ouvert .......................................... 19
pull (outils) ............................................ 63

push (outils) ........................................... 51
QQOQCCP .......................................... 106
rapport d’étonnement ............................... 9
réactifs .................................................... 28
règle du 1 % ........................................... 28
règles (à respecter dans le groupe) ....... 155
règles de fonctionnement ....................... 96
relance .................................................. 127
rencontres ............................................... 40
rendez-vous avec la communauté ........ 137
ressources ............................................... 60
réunion (présentiel et à distance) ........... 40
réunion téléphonique............................ 108
rire ........................................................ 144
risque d’exclusion sociale .................... 145
rôle ....................................................... 141
rôle clé.................................................. 144
rough consensus (IETF) ....................... 163
saut qualitatif........................................ 159
sauveur ................................................. 141
schéma heuristique ............................... 115
Scoop.it ................................................ 115
sémantique générale ............................. 146
Single Sign On (SSO) .......................... 104
Single Sign-On (SSO) ............................ 55
Skype ............................................. 95, 107
sociabilité (réponse à court terme) ....... 146
Social 3.0 ............................................. 149
sociocratie ............................................ 164
spams ..................................................... 38
stress..................................................... 146
structure ................................................. 32
suivi (tableau de suivi) ......................... 117
suivi des projets ................................... 117
Sun Tzu ................................................ 159
Sympa (serveur de liste) ...................... 110
synchrones (échanges) ........................... 41
synthèse de la première partie ................ 78
Tanguy (groupe Tanguy) ..................... 143
TeamSpeak........................................... 108
technologies (passionnés et réticents) .... 18
tensions ................................................ 143
Tiers-lieux Libres et Open Source
(TiLiOS)............................................. 32
Titres (pleins, creux) .............................. 36
tour de table (en ligne) ......................... 129
tragédie des 3C ..................................... 152
triangle de Karpman............................. 141
troll ....................................................... 144
tutoiement ............................................ 127
Twitter .................................................... 38
Twitterfeed ............................................. 38
176

Une heure par semaine ........................ 137
Ventrilo................................................ 108
Viber .................................................... 109
victime ................................................. 141
vidéoconférence .................................. 108
vilain canard ........................................ 141
visioconférence.................................... 107
vision cohérente..................................... 60
vote ...................................................... 163

vouvoiement......................................... 127
web RTC .............................................. 107
WhatsApp ............................................ 109
widget ............................................. 63, 104
wiki ........................................................ 62
Wikimedia Foundation .......................... 33
win-win ................................................ 159
YesWiki ................................................. 62
Zoho ....................................................... 62

177

Remerciements

Comment remercier tout le monde sans oublier personne ?
Vous avez été 20 000 à découvrir ce livre au fur et à mesure de son écriture. Je l’ai
proposé sous la forme d’un feuilleton hebdomadaire entre le 20 novembre 2015 et le
17 juin 2016. Certains l’ont suivi sur mon blog ou sur les réseaux sociaux, d’autres sur la
liste de la communauté Anim-fr qui rassemble plus de 400 animateurs de projets,
communautés ou écosystèmes. D’autres encore l’ont découvert grâce à @Brest, MultiBàO,
P2P Foundation, Innovation-pedagogique.fr ou bien les republications de beaucoup
d’entre vous.
En plus des chapitres envoyés un par un, le livre lui-même a été écrit sur un traitement
de texte en ligne sur lequel chacun pouvait ajouter ses commentaires. Ce sont plus de
400 commentaires, du simple encouragement au retour d’expérience, qui sont venus
s’ajouter par ce seul canal, sans compter les commentaires sur le pad, le blog et les
réseaux sociaux. Quel bonheur d’écrire à n’importe quelle heure du jour et de la nuit en
sachant qu’il y avait toujours quelqu’un de présent sur la page ! Il n’y a pas plus bel
encouragement pour un auteur que de se sentir entouré. Merci donc à : Yannick Audrain,
Julien Baley, Tidiane Ball, Didier Bardy, Tom Baumert, Raïssa Bekono, Sylvie Bernard,
Laurence Berthoud Lafarge, Mehdi Bitach, Jules Bourgine, Bruce Bourguignon, Justina
Boushra, Gilberte Caron, Pierre-Yves Cavellat, Frédéric Chazal, Jean-Marie Clément,
William Compaoré, Sébastien Cursan, Anton Deums, Marie-Anne Divet, Guillaume
Doukhan, Chaterley Epaminondas, Pierre Masudi Fikiri, Hortense Galéopsis, Aurelien
Gaucherand, Amandine Grandjean, Aurelien Grosdidier, Clément Farrugia, Dominique
Filatre, Norbert Friant, Amans Gaussel, Dominique Hebert, Philippe Henry, Anne-Flore
Jarry, Tibor Katelbach, Corinne Lamarche, Léa Lacroix, Jean Marc Manivet, Florian
Mariage, Emmanuel Marx, Christian Mitoyen, Laurent Morelli, Garlann Nizon, Guillaume
Renckly, Marie-Antoine Rieu, Norbert Romand, Pierre Runavot, Marianne Staal, Estelle
Storme, Bruno Tison, Julien Treille, Guillemette Trognot, Arturo Uscategui, Maxime
178

Varenne, Alex Verhille, Daniel Vidal, Christian Weisse, Cécile Ximénès ainsi que tous les
commentateurs anonymes qui se reconnaîtront.
Merci à toutes celles et tous ceux qui par leurs échanges ont enrichi ce livre : Olivier
Auber, Gatien Bataille, Catherine Bénacin, Michel Briand, Forestan Bredow, David Delon,
Louise Didier, Pierrre-Yves Gosset, Quentin Grimault, Mathias Lahiani, Stéphane Langlois,
Marie-Christine Lefèvre, Laurent Marseault, Christophe Masutti, Lilian Ricaud, Simon
Sarazin, Florian Schmidt, Christine Vaufrey, Bernard Vizier, Thomas Wolf et bien d’autres…
Merci également à Peggy et Marco Lachmann-Anke qui ont fait les dessins des
personnages qui illustrent cet ouvrage. Leurs images sont dans le domaine public, mais je
tenais à les créditer pour les remercier du grand nombre de photos et d’illustrations de
qualité qu’ils offrent sur le site pixabay.com.
Je voudrais aussi remercier toutes les personnes actives dans les communautés de
Coop-group qui ont expérimenté ces méthodes et aussi œuvré à enrichir le bien commun
au sein de leur groupe thématique et territorial. Un grand merci en particulier à tous les
facilitateurs et facilitatrices ainsi qu’aux « helpers » qui se sont mis au service de ces
communautés.
Un immense merci également à Marika Bernier et Denis van Riet qui, au sein
d’Imagination for People, m’ont accompagné, parfois dans des moments difficiles, dans la
mise en place, le développement et l’autonomisation de l’écosystème collaboratif sur
l’innovation sociale Coop-group.
J’aimerais remercier également mes éditeurs Florence Devesa et Philippe Bultez Adams
qui me font confiance depuis maintenant de nombreuses années et qui ont accepté de
m’accompagner avec ce livre dans l’aventure des licences libres Creatives Commons.
Enfin, merci à vous, amis lecteurs, qui allez mettre en pratique ces quelques conseils,
les expérimenterez, les enrichirez et les diffuserez pour permettre au plus grand nombre
de développer des grandes communautés au service du bien commun.
Je ne sais plus qui a dit : « Le lecteur est plus avancé que l’auteur, car le lecteur
commence là où l’auteur finit. » Peut-être le savez-vous ?

179

Une heure par semaine
pour animer une grande communauté
Vous animez une communauté, participez à un projet collectif ou vous aimeriez le faire ?
Mais comme nous tous, vous manquez de temps, vous êtes débordé !
D'un autre coté, tout ce qu'apporte une vrai communauté active - développer les échanges et
l'entraide, mutualiser certaines tâches, monter en compétence collectivement, obtenir plus de
plus de visibilité - vous ferait gagner un temps précieux.
Comment résoudre ce dilemme ?
De plus, nous souhaitons aller plus loin que le “community management” qui anime et fédère
“des communautés sur internet pour le compte d’une société, d’une célébrité ou d’une
institution”. Ici nous parlerons de grands groupes pas forcément virtuels, mais surtout
d’échanges ENTRE les membres, d’entraide et aussi de faciliter le développement de projets
collectifs et collaboratifs.
De nouvelles méthodes d'animation en présentiel et en ligne se sont développées depuis une
quinzaine d'années, qui permettent de tenir la distance sur le long terme dans l'animation de
grands groupes. Elles s'appuient sur l'étude des groupes qui fonctionnent et sur les progrès
dans plusieurs domaines scientifiques (neurosciences, sciences cognitives, anthropologie,
psychologie, théorie des jeux...).
“Une heure par semaine pour animer une grande communauté” propose une méthode pour
organiser et faire vivre des communautés de plusieurs centaines de personnes et des
écosystèmes de communautés de plusieurs dizaines de milliers avec seulement une heure par
semaine de suivi. Moins, pour la plupart des animateurs et bien sûr plus si certains le
souhaitent. Elle s’appuie sur la synergie entre des petits groupes de projets et une communauté
nombreuse ainsi que sur 4 activités pour faire vivre naturellement la communauté avec peu de
temps d'animation. De plus en plus de groupes l'utilisent un peu partout dans le monde.
« Une heure par semaine pour animer une grande communauté » est un véritable manuel
pratique qui vous donnera les bases pour comprendre le fonctionnement des communautés et
vous accompagnera pas à pas dans la mise en place ou la réorganisation d'une communauté,
puis dans l'animation au jour le jour.

Jean-Michel Cornu est un spécialiste de l’innovation, de la coopération et de l’intelligence
collective. Il est l’auteur de nombreux livres et à initié de très nombreux groupes virtuels ou
locaux dans le monde depuis plus de vingt cinq ans. Il est en particulier le fondateur de
l’écosystème international Coop-group.org qui rassemble une trentaine de groupes
thématiques et territoriaux autour de l’innovation sociale.

180



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